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N’avoir Pas Confiance En Idrissa Seck Serait Désormais Plus Qu’un Délit!

Dans une contribution parue à « Dakaractu » et au quotidien « L’AS », Monsieur Thierno Bocoum m’a, comme d’habitude, abreuvé d’injures grossières. Je me suis toujours gardé d’ailleurs de répondre à ses pamphlets, non point faute d’arguments, mais plutôt parce que je pensais qu’il avait bien le droit de défendre son leader. Cette fois, je vais déroger à la règle pour clore définitivement, pour ce qui me concerne en tout cas, la page Idrissa Seck.

Quand on lit la diatribe de M. Bocoum, on a le sentiment que toute l’émission à laquelle j’étais l’invité (le « Grand Jury » de Rfm du dimanche 26 août 2012), tournait autour de la seule personne d’Idrissa Seck.

L’ancien président Senghor rappelait souvent que quand on fait l’historique d’un problème, on l’a à moitié résolu. Les questions relatives à Monsieur Idrissa Seck m’ont été posées au tout dernier moment, aux toutes dernières minutes de l’émission. Á la question « Que pensez-vous d’Idrissa Seck ? », j’ai répondu, tout naturellement, que j’avais de sérieuses réserves par rapport à sa candidature et que l’homme ne m’inspirait pas confiance. L’animateur, Monsieur Mamoudou Ibra Kane ne pouvait pas, bien sûr, se contenter de cette réponse et m’invita à expliquer pourquoi M. Seck n’avait pas ma confiance. J’ai évoqué alors très rapidement quelques-uns des arguments que j’ai plusieurs fois développés aussi bien dans mes livres que dans mes contributions que M. Bocoum – comme toujours d’ailleurs –, a tenu à rabougrir manifestement. C’est ainsi que j’ai rappelé que, comme son ancien mentor, M. Seck a toujours rusé avec nous et que, en particulier, à une question sur l’origine de sa fortune, à la même émission (celle du 29 octobre 2006), il fit cette réponse renversante : « Je ne me suis pas enrichi à la faveur du pouvoir. Les seules ressources que mon passage au pouvoir a mises à ma disposition et qui renforcent mes moyens d’intervention politique et sociale, ce sont les fonds politiques que le président de la République lui-même m’a alloués de façon discrétionnaire.»

Et j’ai ajouté, pour terminer, que jusqu’à présent, nous ne sommes pas encore suffisamment édifiés sur ce fameux « butin » qui aurait empoisonné les relations entre M. Seck et son ancien mentor. « Il a bénéficié du non-lieu non ! », m’a alors fait remarquer M. Kane, qui me demanda en passant ce que je pensais de ce non-lieu. « Je ne suis pas convaincu que Monsieur Idrissa Seck doive en bénéficier », répondis-je.

Voilà les échanges que j’ai eus avec M. Kane sur le leader de Réew mi, et qui me valent les injures de celui qui se considère comme son bouclier, sa « cuillère ». Ainsi, pour ce dernier, ce bon M. Bocoum, je serais « un menteur », un « faux illuminé qui règle des comptes au moment où le pays croule sous le poids des inondations », « un bras armé qui s’attaque lâchement à ses adversaires politiques au moment où l’heure est à l’unité pour relever les multiples défis du pays », un « aigri qui divertit des priorités (…) », un homme « qui fait preuve de légèretés manifestes dans l’analyse et d’ une incohérence insolite quand il s’agit d’aborder la rubrique Idrissa Seck ». Un homme qui donne l’impression que « l’essentiel pour lui c’est de se défouler sans retenue ». Sans compter « la bouffonnerie » ou la « simplicité d’esprit » qui suinterait de tous mes propos et qui « n’est pas un souci majeur pour moi ».

M. Bocoum n’est vraiment pas tendre avec moi. Je ferais ainsi partie « des personnes qui construisent leur aura sur le défaut de réactions des autres (…), qui gravitent les échelons et se rangent au rang des vertueux jusqu’à apparaître .…. au grand jury ». Mon objectif ultime serait donc d’être, un jour, l’invité de l’émission « Grand Jury » ! Je rassure ici le bouclier de M. Seck, en prenant à témoins tous les journalistes. Je n’ai jamais, jamais proposé à aucun d’entre eux une interview, ni demandé à aucun autre de m’inviter à une émission de radio ou de télévision. Au passage d’ailleurs – cela relève de la simple honnêteté –, je remercie Monsieur Mamoudou Ibra Kane de m’avoir invité au « Grand Jury » du dimanche 25 août 2012.

Voilà donc le pauvre Mody Niang décrit sans complaisance par la « cuillère » de Monsieur Idrissa Seck. Je ne serais que cela, à travers mes plus de trente ans de présence dans l’espace politique et syndical.

Le lecteur comprendra parfaitement, qu’à mon âge, je ne suive pas ce M. Bocoum sur son terrain. Je lui laisse le style et le ton de son texte. Je ne prendrai même pas ma propre défense. J’ai bien retenu la leçon du proverbe wolof selon lequel « saabu du fóot boppam ». C’est à mes compatriotes qui me lisent, m’entendent et me côtoient régulièrement dans les défilés depuis de nombreuses années, que je laisse le soin d’apprécier ma trajectoire, s’il est vrai que j’en ai une.

Pour le reste, je persiste et signe : Idrissa Seck avoue avoir construit sa fortune sur la base des « fonds politiques » du président de la République. Des « fonds politiques » certainement alloués par l’Assemblée nationale, mais aussi alimentés directement par des fonds diplomatiques et des aides budgétaires qu’il ramenait de ses nombreux voyages. C’est M. Seck lui-même qui a fait ces terribles révélations, avec de nombreuses autres, devant la Commission d’Instruction de la Haute Cour de Justice. Ce n’est point de rumeur qu’il s’agit : ses propos étaient mot pour mot dans au moins quatre quotidiens de la place dès le lendemain ou le surlendemain. Les journalistes pouvaient-ils les inventer ?

Il s’est donc notamment enrichi sur la base de l’argent détourné de sa place naturelle qu’est le Trésor public. Au lendemain de la proclamation des résultats provisoires de l’élection présidentielle du 25 février 2007, j’ai exprimé ma surprise, ma grande déception et mon indignation dans une contribution où j’affirmais que le « père » et le « fils » qui étaient alors respectivement premier et deuxième, avaient plutôt leur place à Reubeusse. Si nous vivions alors dans une grande démocratie comme celles des USA, de la France, de l’Allemagne, de la Grande Bretagne etc, les deux anciens acolytes n’auraient même pas eu l’opportunité de se présenter : ils seraient, dans le meilleur des cas, disqualifiés pour leurs nombreuses forfaitures.

Même foncièrement hostile à mon endroit, le bouclier de M. Seck ne devrait pas avoir le droit de me prêter des propos que je n’ai jamais tenus. C’est ainsi que, renvoyant à ma contribution « Comme son ancien mentor, Idrissa Seck nous prend pour des demeurés », il me fait dire ceci : « Quiconque ne porte pas plainte reconnaît l’accusation et que quiconque a été accusé a certainement fait quelque chose. » Quand même ! Je ne perdrai vraiment pas mon temps à démentir. Que le lecteur intéressé se reporte à l’article incriminé !

La vérité, c’est que je me suis toujours posé des questions, quant aux silences assourdissants derrière lesquels s’abritait Monsieur Idrissa Seck, face à des accusations d’une rare gravité. Il en a été ainsi de celles, particulièrement méchantes et compromettantes de Me Ousmane Ngom, qui regagnait la « maison du père » au lendemain du limogeage de M. Seck de son poste de Premier ministre (« L’Observateur » du lundi 26 avril 2004). On peut évoquer aussi ce fameux « Protocole de Reubeusse » dont le contenu a été livré dans les moindres détails par le quotidien « Walf Grand-Place » du lundi 6 février 2006 qui affirmait sans ambages, être en mesure, de sources dignes de foi, de « révéler qu’Idrissa Seck (était) en train de verser de l’argent, objet de son différend avec le président Wade ». « De l’argent, précisait le quotidien, qui n’a rien à voir avec l’affaire dite des Chantiers de Thiès ». Le journal estimait le montant de l’argent que « le père » et « le fils » se disputaient âprement à quelque 60 milliards de francs Cfa et allait plus loin encore dans ses révélations. Il affirmait qu’ « un long et serré marchandage » avait permis de convaincre Idrissa Seck de verser une partie de l’argent à son « père ». C’est ainsi que, poursuivait le journal, toujours sûr de son fait, le Maire de Thiès avait déjà versé 7 milliards, devrait encore verser 10 milliards à sa sortie de prison et 10 autres dans les mois qui suivent. Ce qui ferait un total de 27 milliards sur les 60 qu’Idrissa aurait planqués quelque part dans le monde ».

Je n’affirme pas que toutes ces accusations soient fondées, mais je m’étonnais, qu’avec de telles révélations publiques, le quotidien n’ait pas du tout retenu l’attention de la Dic. Je me suis étonné autant que M. Seck restât muet comme une carpe, devant cette affaire comme devant les accusations gravissimes de Me Ngom. Mes réponses à Mamoudou Ibra Kane concernant M. Seck sont quand même infiniment moins graves – la comparaison n’est même pas possible. Pourtant, elles ont provoqué la réaction immédiate de la « cuillère » de M. Seck. Á l’époque (avril 2004 et février 2006), personne n’avait levé le plus petit doigt, malgré la gravité des accusations portées contre l’ex-fils putatif de Me Wade. Ce sont mes interrogations légitimes qui soulèvent chaque fois l’ire de M. Bocoum. Ce même M. Bocoum qui m’accuse – il m’accuse de tout – « de renier à Idrissa Seck son non-lieu total ».

Je ne renie rien. J’affirme, et c’est mon droit le plus absolu, que je ne crois pas à l’innocence totale de M. Seck, dans toutes les affaires où son nom était mêlé. Je ne crois pas, non plus, que tout non-lieu soit forcément synonyme d’innocence totale. Selon M. Bocoum, j’aurais également pour but de « laisser le doute subsister pour affaiblir, salir, vouer aux gémonies ». J’ai vraiment bon dos ! Le doute est déjà installé depuis plusieurs années par son leader lui-même. On se rappelle notamment ses interminables va-et-vient entre son domicile et la présidence de la République, à quelques encablures de l’élection présidentielle du 25 février 2007. On peut évoquer aussi le fameux « Protocole » qui est loin d’être une vue de l’esprit, ainsi que sa justification calamiteuse de la fortune qu’il se serait construite. Je ne suis donc pour rien dans le doute qui lui a valu les maigres 7 % et une peu enviable quatrième place lors de la dernière élection présidentielle, pour quelqu’un qui clamait sur tous les toits qu’il serait le quatrième président de la République du Sénégal ! Si j’étais de taille à donner un conseil à M. Bocoum et à ses camarades, ce serait d’aller chercher ailleurs les vraies raisons qui expliquent la descente aux enfers de leur champion. Ma modeste personne n’y est pour rien du tout.

Ce bon M. Bocoum s’est même permis de me « retirer du cercle restreint des intellectuels ». D’abord, Je n’ai jamais prétendu, ni oralement, ni par écrit, que je me réclame de ce cercle restreint prestigieux. Qu’il se rassure : je ne lui dispute pas le statut d’intellectuel, ni à lui ni à personne d’autre. Ce que je revendique, par contre, et que je clame haut et fort, c’est ma qualité de citoyen ayant le droit, chaque fois que de besoin, de s’exprimer sur la manière dont son pays est gouverné. J’ai mon opinion et ma vision sur les hommes, les femmes et les événements qui se succèdent dans mon pays. Monsieur Thierno Bocoum et ses amis m’auront beau attaquer, me couvrir des injures les plus grossières, ils ne changeront pas, comme par enchantement, mes sentiments vis-à-à-vis de leur leader. Je leur reconnais le droit de le prendre même pour un dieu. Qu’il me reconnaisse au moins celui de ne pas lui faire confiance, jusqu’à preuve du contraire !

Mody Niang

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