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Electricité Et Délestage Au Sénégal : Pour Que La Lumière Soit …

Depuis quelques années, le secteur énergétique sénégalais vit une crise récurrente, notamment en ce qui concerne le sous-secteur de l’électricité. L’instabilité de la fourniture d’électricité enregistrée depuis plus d’une décennie, est la contrainte d’infrastructure la plus sérieuse pour le développement d’une industrie moderne et compétitive et justifie les faibles performances économiques du Sénégal et l’accentuation corrélative du chômage et du sous-emploi. En effet, malgré l’existence d’un important potentiel énergétique, le pays peine à développer ses capacités de production et ne parvient pas à atteindre une puissance installée totale de 1 000 MW en raison d’une infrastructure vétuste et mal entretenue aggravée par des moyens financiers insuffisants. Sur l’étendue du pays, la puissance totale installée sur le réseau interconnecté est de 747,8 MW dont 512,8 MW pour les installations propres à la SENELEC et 235 MW par des producteurs privés. Quant au réseau de distribution de la SENELEC, il comptait en 2011 au total 8 643 km de lignes MT 30 et 6,6 kV, 4 320 postes de transformation MT/BT et 7 822 km de lignes BT.

Outre la faiblesse des capacités de production, le réseau de distribution de la SENELEC est également très vétuste, avec des goulots d’étranglement et des chutes de tension excessives sur certaines artères, particulièrement sur le réseau 6,6 kV.
Les faibles capacités de production de la SENELEC et l’important déficit énergétique observé ces dernières années expliquent le faible niveau d’accès à l’électricité. Au total, le niveau de consommation par habitant est de l’ordre de 60 KWh par habitant et seulement 33% de la population ont accès à l’électricité (57% en zone urbaine et 10% en zone rurale) tandis que la grande majorité (54%) utilise la biomasse avec pour conséquence une dégradation de l’environnement.

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L’électricité est inégalement répartie entre les grandes villes et les campagnes et les énergies renouvelables sont marginalement utilisées (l’énergie solaire représente 0,36% de la puissance totale installée de la production). S’y ajoutent les contreperformances de l’économie sénégalaise qui se mesurent notamment par un déficit des finances publiques du fait des subventions consenties par l’Etat sur le prix de l’électricité et la politique de soutien à la SENELEC.

En cohérence avec l’objectif de développer le potentiel attractif du Sénégal et améliorer la compétitivité de notre économie, l’accent doit être mis pour renforcer le secteur énergétique et sécuriser la fourniture d’énergie électrique en quantité suffisante, en qualité satisfaisante et au moindre coût. A ce sujet, il est vital d’initier et de mettre en œuvre un ambitieux programme d’investissement pour la réalisation de nouvelles unités de production, avec comme objectif de doubler, voire tripler les capacités de production. Il s’agira à cette fin, de : i) soutenir la réalisation de centrales solaires photovoltaïques dans les zones à fort potentiel, notamment dans les régions de Diourbel, Fatick, Kaolack, Tambacounda et Kolda ; ii) construire deux ou trois (3) centrales à charbon de 200 MW chacune et une (1) centrale thermique à cycle combiné de 150 MW ; iii) réhabiliter et remettre à niveau toutes les centrales existantes et iv) renforcer et étendre les réseaux moyenne et basse tension par la construction de 6 000 km de lignes de transport MT et BT (pour porter le réseau total à environ 20 000 km).

Eu égard aux moyens colossaux nécessaires pour réaliser ce programme (une centrale solaire photovoltaïque de 20 MW peut coûter environ 30 milliards de francs CFA et une centrale à charbon de 200 MW peut revenir à environ 370 milliards FCFA), l’Etat doit inciter le recours au secteur privé ou producteurs indépendants. Pour ce faire, l’Etat doit engager des réformes et actions prioritaires qui devront se traduire par la :

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1. Restructuration du cadre institutionnel : pour résorber définitivement la faiblesse de la capacité de production, l’Etat doit procéder à la réorganisation de la production, du transport et de la distribution de l’énergie électrique. Dans ce cadre, il doit procéder au dégroupage des fonctions de la SENELEC. Outre le renforcement de l’autorité de régulation du secteur de l’énergie, le dispositif institutionnel du secteur de l’énergie pourra être constitué :

  •  de la SENELEC qui sera chargée de la gestion dans le cadre d’une concession avec l’Etat, du patrimoine, du secteur électrique, de la planification et de la sélection des projets privés ainsi que de la négociation des contrats avec les producteurs indépendants ;
  •  d’une coentreprise à capitaux privés nationaux et étrangers éventuellement qui sera chargée de l’exploitation.

2. Mise en œuvre d’une politique tarifaire adaptée : pour susciter l’attrait du secteur privé et soutenir l’équilibre financier du secteur électrique, l’Etat doit adopter une politique de tarifs qui refléteront les coûts et les risques, avec comme principal objectif, le rétablissement de l’équilibre financier du secteur de l’électricité, en vue de permettre l’accroissement de la capacité de production et la mise à niveau des infrastructures de transport et de distribution.

3. Définition et l’application de mesures incitatives : pour soutenir et encourager les investissements privés, l’Etat doit mettre en place un cadre incitatif favorable qui concernera : une exonération d’impôt sur les bénéfices commerciaux pour les deux (2) premières années d’exploitation ; la prise en charge à frais partagés, des dépenses d’investissement dans la réalisation des infrastructures de transport et de distribution ; etc.

Par ailleurs, pour assurer une couverture satisfaisante des besoins en produits pétroliers qui avoisine environ trois (3) millions de tonnes, l’Etat doit procéder à une mise en œuvre d’un ambitieux programme de modernisation et d’extension des capacités de la Société Africaine de Raffinage (SAR).

De surcroît, pour soutenir la politique de création d’emplois et assurer la durabilité de nos infrastructures de transport routier, l’Etat doit initier et soutenir la réalisation d’un réseau de pipeline multi-produit de transport d’hydrocarbures sur l’axe Dakar-Kidira long de 645 km et d’un dépôt de produits pétroliers à Kidira qui pourra s’accompagner de l’aménagement d’un port sec dans la même zone.


Amadou Oumar Mballo
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