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Amadou Clédor Sène Dans Le Vent

Parler pour ne rien dire, parler pour se mettre au goût du jour, Clédor Sène menace ; il se dit victime pour mériter l’attention d’un peuple friand et attentif aux énigmes. C’est l’histoire d’un assassinat dont beaucoup de choses ont été dites sous le couvert des instructions juridiques, des investigations journalistiques et des intentions politiques. Pendant tout ce temps, M. Sène avait l’occasion de se dédouaner, de révéler ou de pointer du doigt celui ou ceux pour qui il avait payé finalement de sa liberté. Non Clédor, nous ne tomberons pas dans ce piège caractéristique de notre démocratie pêle-mêle faite de fantaisies, d’attirails et d’extorsions !

Aucune suite dans les idées ! Comme dans une campagne de charme, M. Sène aborde plusieurs d’ordre divers sans répondre à la préoccupation centrale, à savoir sa responsabilité et celle des commanditaires dans l’assassinat de Me Sèye. Il s’exprime notamment sur  la mauvaise gestion des ressources minières, sur la piètre communication dans le combat contre le terrorisme ainsi que sur la rocambolesque affaire Karim Wade. Ses positions politiques, parfumées de sourates coraniques par-ci et par-là, laissent croire que tirer les choses au clair est loin de motiver sa sortie fracassante. Bien au contraire, cette dispersion cocasse et futile l’éloigne de son ambition prétendue de se défendre contre des autorités politiques qui voudraient l’utiliser comme moyen de nuire à leurs adversaires.

Il a tenu à revenir sur les circonstances et les raisons de sa radicalisation en 1988, comme pour justifier le caractère particulièrement violent de la démarche entreprise par lui et ses compagnons contre le régime d’alors. À quoi bon, si sa sortie médiatique a pour seul objectif de ne pas servir de jouet aux combats que se livrent des acteurs politiques en féroce compétition ? Il lui suffisait alors juste de citer les personnes qui l’ont « supplié de ne pas pourvoir en cassation » pour donner une indication claire. Son discours clair-obscur est le propre d’un marchandage où il est simple question d’annone, de sommation et d’appel d’air.

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« Les sénégalais s’intéressent davantage aux faits alors qu’un jugement a déjà été rendu sur les circonstances de la mort de Me Sèye », dit-il. Autrement dit, celui qui a tiré la balle tuant le magistrat est connu, reste à savoir qui en est l’instigateur. Clédor Sène trouve là les moyens de raviver un intérêt populaire pour une cause vieille de 22 ans. C’est son droit le plus absolu. Mais, il lui suffit pour ce faire d’être précis en apportant ou en provoquant un fait nouveau. Toute autre démarche vise vraisemblablement à garder au frais une matière mystérieuse qui lui a valu jusque-là une renommée peu reluisante mais rentable au point d’avoir été aidé par Macky Sall, premier ministre sous Wade.

En insistant sur le caractère politique de sa condamnation, il tente de légitimer ainsi un acte fût-il d’assassinat. Clédor révèle : « la magistrate, Andrésia Vaz, n’a pas voulu proclamer les résultats provisoires, Kéba Mbaye avait démissionné ». Cet exercice inapproprié d’enchantement renseigne sur le déroulement trouble des élections de 1993, mais il ne peut associer joliment l’assassinat du juge à un devoir de résistance. Il y a quand même lieu de faire la part des choses : confisquer le vote populaire est une forfaiture, mais éliminer un père de famille, de surcroît brillant et pieux, est une ignominie.

Hélas, le parcours de Clédor Séne ne prédispose guère ce dernier à la charge de redresseur de tort. En 2008, le journal Walf Gran Place avait publié ceci: « Pourquoi Clédor a été extrait de prison ? Emprisonné dans une histoire de trafic international de drogue, Amadou Clédor Sène a été remis en liberté sans explication convaincante. La vérité est que, selon nos sources, c’était pour éviter que l’embarrassant Clédor croise en prison des détenus à qui il aurait pu faire des confidences comme il eut à en faire au jeune leader Talla Sylla sur l’affaire Me Sèye ».

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Birame Waltako Ndiaye

waltacko@gmail.com

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