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Référendum Du 20 Mars 2016 – De Quoi Le « non » Est-il Le Nom ?

Dieu Seul sait ce que seront les résultats du référendum du 20 mars prochain. Ce qui paraît certain par contre, c’est que les tenants du «Oui» éprouvent d’énormes difficultés à asseoir un argumentaire pertinent qui réponde aux grosses nébuleuses contenues dans le projet de référendum, au plan politique, économique et sociétal. Leur ligne de conduite consiste à brandir quelques concepts comme «révolution», «grande avancée», «réforme consolidante» et autres charabia linguistique. De temps à autre, ils sont renforcés dans leur rhétorique par les généralités de quelques mercenaires officieux de la «politologie» locale ombilicalement liés à des lobbies économiques de la place et dont certains représentants crèchent à la présidence.

Bien évidemment, il ne faut pas être dupe du jeu politicien auquel se livre une certaine frange de la classe politique que le peuple sénégalais a renvoyée à la galère d’opposition au lendemain de la présidentielle de 2012, et qui semble compter sur l’amnésie dont souffrirait l’électorat sénégalais pour revenir un peu plus vite que prévu au pouvoir.

Mais si cette opposition là rebondit aujourd’hui et se positionne en porte-parole des populations, si elle se fait entendre, si elle n’est pas huée dans les artères de la capitale, si le discours qu’il tient accroche et séduit une certaine cible de la population, c’est qu’il y a des raisons qui lui en ont donné la force. Et on en revient à cette tâche ineffaçable qu’a été le reniement du chef de l’Etat sénégalais. De là, découle l’aura d’un «Non» substantiel dont seules les urnes détermineront la portée et la puissance.

Le peuple souverain

Le «Non» n’est pas une posture du diable. Il est affirmation et expression de la souveraineté inaliénable du peuple souverain du Sénégal contre les coteries institutionnelles manipulées par des pouvoirs occultes. Il est un refus contre le je-m’en-foutisme de politiciens soucieux en permanence de s’affranchir des règles de bonne conduite démocratique et morale établies, contre le relativisme que les hommes politiques attachent à leurs serments républicains. C’est une vraie réforme de nos mœurs politiques : tout en respectant la légalité qui sied au mandat intégral du chef de l’Etat le mieux élu de l’histoire électorale de notre pays, il combat la ruse, l’autoritarisme et l’envie solitaire de conduire le pays dans des réformes dites d’envergure.

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Le «Non» est une dénonciation de cette propension virale du Président de la république et de son pouvoir à placer l’étalon argent au cœur de la Politique. Comment appeler autrement que corruption active ce procédé qui consiste à acheter les votes potentiels des électeurs, dans un environnement pollué par la pauvreté et la misère ? On croyait avoir dépassé cette exposition débridée d’argent et de produits alimentaires au-dessus de la dignité des gens, on constate que le pire est sous nos yeux !

Le «Non» est un réquisitoire contre une télévision nationale style Pravda entièrement dédiée à véhiculer la pensée unique découlant de la «vision» du prince vénérable. Une télévision du service public dont le Directeur général n’a pas honte de dire, pour sa défense, que le programme des manifestations de ses adversaires d’en face sur le référendum n’a pas été déposé sur son bureau !

Transparence

Le «Non», dans la substance qu’il porte, est vecteur de transparence et d’honnêteté. Par exemple, concernant l’homosexualité, le problème n’est pas que le Président Sall le légalise ou pas, car le ferait-il qu’il décréterait sa propre mort politique. Le débat est donc ailleurs sur ce point : il est dans l’opacité qui entoure ce qui est écrit dans le projet de référendum : «la reconnaissance de nouveaux droits aux citoyens : droits à un environnement sain, sur leurs ressources naturelles et leur patrimoine foncier.»

La question primordiale est de savoir si cette liste (ultra-courte) est définitivement limitative ou non. Le Président de la république n’en dit rien en dépit de ses multiples interventions, les interprètes de sa «pensée» encore moins. Ne donne-t-on pas ainsi à des organisations de la société civile sénégalaise dont la sympathie pour les causes homosexuelle et lesbienne est avérée, une base juridique qui leur permettrait de réclamer demain des «droits inaliénables» pour cette catégorie de citoyens ? Qu’en disent les chevaliers du président ? Rien, où presque, alors qu’ils auraient pu suggérer que ces «nouveaux droits» constitutionnalisés soient strictement encadrés par des lois clairement écrites. 

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«Slogans-gadgets»

Le «Non» est une alerte contre ce discours rassurant et tranquillisant qui placerait le Sénégal dans une situation post-démocratique, comme une personne riche le serait sur la pyramide des besoins de Maslow. Nous sommes en 2016, sous la gouvernance d’un Président de la république qui, quatre ans auparavant, avait retenu l’attention de son peuple, l’avait regardé droit dans les yeux pour lui faire la promesse suivante : je réduirai mon premier mandat de sept à cinq ans.

Ce type de volte-face, d’ailleurs défendu sans conviction devant les caméras de «sa» télévision, n’est pas acceptable dans une démocratie, encore moins lorsqu’il est  gonflé par des slogans-gadgets du genre : «renforcement des droits de l’opposition », «augmentation du nombre des membres du conseil constitutionnel», «élargissement des pouvoirs de l’assemblée nationale», etc. C’est pourquoi, il faut décourager hic et nunc les petits malins qui, dans le pouvoir comme l’opposition, seront un jour tentés de recourir au forcing pour assouvir leurs «ambitions nocturnes». D’où cette question de fond qui résulte de la précipitation suspecte avec laquelle le chef de l’Etat est passé aux actes : pour qui travaille réellement Macky Sall ?

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