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Aux Responsables Des Syndicats De L’enseignement Et De La Fédération Des Parents D’élèves

Mes chers compatriotes

C’est un vieux militant de l’Education qui s’adresse à vous. Un militant qui a participé, de 1946 à 1967, à toutes les batailles menées pour :

– la revalorisation de la fonction enseignante ;

– l’élévation du taux de scolarisation ;

– la jouissance des vacances scolaires ;

– la gestion démocratique des enseignants ;

– le droit au logement ;

– les examens professionnels : leur démocratisation…

Pour ne citer que ces grands problèmes qui, pour la plupart, ont reçu des solutions.

Pour obtenir ces conquêtes, les syndicats ont usé de tous les moyens : pétitions, soutien des centrales syndicales des parents d’élèves, du Conseil de la jeunesse, campagnes de presse, tracts et enfin, grèves.

La grève, cette arme redoutable, a été utilisée maintes fois après décisions de la Commission administrative.

De l’autre côté, les élèves des établissements secondaires et ceux des écoles de formation utilisaient la grève pour faire aboutir leurs doléances.

Vers les années 1957, après les grèves répétitives du Cours normal de Mbour, l’Association territoriale des parents d’élèves, sur proposition de son président, El Hadji Momar Sourang, décida d’une rencontre avec les élèves pour leur demander, avant toute action, de saisir le bureau de l’association. En effet, nous avions estimé que toute grève portait atteinte à la formation qui nous paraissait vitale pour le métier qu’ils devaient assumer.

Cette initiative fut bien comprise, et j’étais chargé, en ma qualité de secrétaire général et d’enseignant, par le président Momar Sourang de Saint-Louis et son vice-président, Amadou Sow de Kaolack, d’assurer la liaison.

Je fis plusieurs voyages à Mbour, et la situation se calma. Cette expérience de l’Association des parents d’élèves fut saluée par beaucoup de responsables du Conseil de la jeunesse du Sénégal et par le Suel (Syndicat unique de l’enseignement).

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A la même période, devant le malaise politique créé après l’intervention musclée de Mamadou Dia, Premier ministre, au ministre français en visite à Saint-Louis, beaucoup d’assistants techniques français décidèrent de quitter le pays.

Le Conseil de la jeunesse du Sénégal, indigné par cette attitude, décida de demander à tous nos étudiants de France de terminer rapidement leurs études et de rentrer au pays pour assurer la relève.

L’école sénégalaise ayant un rôle déterminant pour la formation des cadres chargés d’assurer la relève de l’assistance technique, avec toutes les compétences requises pour le développement de notre jeune Nation, dans tous les domaines, il était évident que le fonctionnement normal de cette école était une nécessité vitale.

Dès lors, des cadres de différents mouvements, hélas disparus, s’étaient engagés d’organiser un débat profond et sincère sur les formes d’action que les enseignants devaient mener pour soutenir leurs revendications. Malheureusement,  le référendum de 1958 et la crise qui en découla dans le pays ne permirent pas le développement organisé de la réflexion. Le Suel fut combattu avec acharnement par le gouvernement et ne put même pas tenir ses réunions dans les écoles.

Ce climat d’ostracisme ne militait pas en faveur d’un tel débat qui pourrait être jugé comme une capitulation.

Les nombreuses idées qui circulaient, par ci et par là, à savoir le port vestimentaire, le rassemblement devant l’établissement pendant un moment avec prise de parole devant les populations, les mots d’ordre diffusés avant chaque début de leçon, les cours dans les quartiers en plein air, les visites des notabilités coutumières et religieuses…, la grève devenait ainsi le dernier recours.

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Il est dommage que vos ainés n’aient pas pu déclencher le débat qui serait enrichi maintenant que nous avons de nombreux cadres dans un environnement où la communication joue un rôle décisif.

Avais-je le droit de ne pas fournir l’information, étant, peut-être, le seul témoin encore en vie de cette période ?

Je suis certain que je n’ai pas pu rendre compte fidèlement de tout ce qui se discutait, mais je suis convaincu que les enseignants s’interrogent déjà sur leurs rapports avec la population, avec leurs élèves, et n’ignorent pas les jugements qui sont portés sur leurs moyens de défendre leurs revendications même les plus légitimes.

Aussi, il n’est point tard de réfléchir sur ces propos que j’ai eu à dire à notre regretté Iba Ndiaye Diadji avant son départ pour l’éternité – « Enseignants, éducateurs au service du peuple, la Nation entière vous écoute. Et malgré vos conflits avec l’Etat, vous devez vous souvenir que la jeunesse d’aujourd’hui formera le bataillon de citoyens qui, demain, tiendront tous les pouvoirs à tous les niveaux. Ils exerceront les pouvoirs grâce aux armes que l’école a mises à leur disposition. »

En m’excusant d’avoir, en ce moment, pris l’initiative de vous révéler les angoisses que vos aînés ont eues, il y a plus de quatre décennies, je vous conjure que le thème de cette discussion est plus d’actualité maintenant.

 

Amadou Ndéné NDAW

Ancien membre du Bureau du Synep (Syndicat de l’enseignement primaire)

Ancien secrétaire général du Saes (Syndicat autonome des enseignants du Sénégal)

Ancien secrétaire général adjoint du Suel

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Ancien vice-président du Conseil de la jeunesse du Sénégal

Ancien secrétaire général de l’Association territoriale des parents d’élèves du Sénégal

Membre des bureaux politiques de l’Uds–Rda du Bps, de l’Ups et du Pras de 1949 – 1970

Touba Dieppeul I villa n°2 370 Dakar

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