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Agriculture Et Eau : Grandes Avancees Et Prospectives

L’agriculture sénégalaise a connu différentes politiques et turpitudes au cours des dernières décennies. Mais, depuis 2012, une nouvelle volonté politique accompagnée de moyens financiers, humains et techniques pour sa mise en œuvre, semble vouloir changer la donne d’une manière radicale.

En effet, des programmes comme celui en autosuffisance en riz ont produit des résultats probants et permettent d’augurer à long terme une disponibilité suffisante du riz local.

Récemment, le Millenium Challenge Corporation (MCC) a investi près de 80 milliards de FCFA dans le delta du Fleuve. On ne peut que saluer cette aide de l’administration américaine qui vient renforcer l’irrigation des terres rizicoles et horticoles.

La bonne exécution du Programme d’Urgence de Développement Communautaire (PUDC) ayant un financement de 500 milliards de FCFA dont 113 milliards viennent de l’Etat du Sénégal est vu comme une bouffée d’oxygène dans le milieu rural qui a longtemps été en marge des politiques publiques et représente un apport non négligeable dans la politique économique du Sénégal.

Le mérite de tous ces efforts c’est d’avoir impulsé une envie de retour vers les terres des populations notamment celles vivant en ville et périphéries urbaines.

Il en est de même des domaines agricoles communautaires. Une réponse appropriée à la problématique de l’emploi en milieu rural.

C’est pour apporter des éléments de réponses concrètes et rapides à l’épineuse question de l’emploi des jeunes en milieu rural et de l’insertion que le Programme des Domaines Agricoles communautaires a été conçu et proposé. Lieu d’insertion de jeunes diplômés d’écoles de formation aux métiers de l’agriculture et disciplines connexes, mais également de promoteurs privés désireux d’investir le secteur aussi bien dans ses activités de production que dans celles de transformation et de services

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Le financement du PRODAC est assuré par le BIC (Budget d’Investissement Consolidé) du Sénégal, donc un financement propre avec la mission de promouvoir l’entrepreneuriat agricole pour mettre en orbite une nouvelle génération d’agriculteurs vu que le Sénégal dispose de 1700 km d’eau douce entre Bakel et Dagana.

Le PRODAC a pour but aussi de :

  • Contribuer à la réduction de la précarité sociale en milieu rural par la promotion de l’entrepreneuriat agricole des jeunes.
  • Créer en milieu rural les conditions favorables à l’investissement privé
  • Doter l’intérieur du pays, d’infrastructures agricoles et d’aménagements structurants permettant la mise en valeur de grands domaines allant de 1000 à 5 000 ha d’un seul tenant.
  • Aménager de vastes étendues de terres et de les doter d’infrastructures de qualité, permettant aux jeunes, en particulier, de s’adonner à des activités économiques en continu (production végétale, animale, aquacole, transformation, services, mise sur le marché).

A l’heure actuelle, quatre DAC sont mis en œuvre : Séfa, Niombato, Nianing et Notto Diobass sur les 10 de prévu et accueillent 42 techniciens agricoles sur place pour l’encadrement des volontaires sous forme d’incubation avec un engouement énorme, employant près de 12000 personnes (temporaires et vacataires). Le site de Notto diobass est le plus grand avec 2000 ha et chaque site est divisé en unités agricoles (UA) de 25 ha chacune.

Par ailleurs, notre agriculture est en train de se transformer par la mécanisation, la diversification des cultures, la mise à disposition de semences certifiées à temps, une politique de commercialisation arachidière bien menée.

Seulement, tous ces programmes sont tributaires d’une bonne maitrise et disponibilité de l’eau. Nous ne pouvons pas comprendre que dans un pays ayant des cours d’eau et un grand fleuve qui se déverse dans la mer, puissent exister des difficultés pour l’alimentation en eau potable et une agriculture irriguée.

Depuis notre indépendance, des efforts ont été faits. Mais le problème au Sénégal est le manque de suivi des projets. Des forages tombent en panne sans aucune maintenance, des bassins de rétention ont été aménagés mais deviennent inopérants. Pourquoi ne pas créer des retenues tout au long du cours du fleuve Sénégal ? Ces retenues pourraient irriguer des terres.

J’adhère entièrement à l’analyse de Mme Aïfa Fatima Ndoye Niane, agroéconomiste à la Banque Mondiale qui à l’occasion de « End Poverty Day » déclarait : «L’agriculture sénégalaise a une production agricole variable et dépendante de la pluviométrie. Ce qui montre, une forte vulnérabilité du secteur. La valeur ajoutée de l’agriculture fluctue fortement d’une année à une autre. 49,5% de la population sénégalaise s’active dans le secteur de l’agriculture, 70% du monde rural tirent leur alimentation et revenus de l’agriculture et des activités connexes, 57% de celle-ci vit en dessous du seuil de la pauvreté, soit une faible contribution au PIB comprise entre 12 et 15% ». La contribution de l’agriculture dans le PIB est encore très faible. Elle est de 12,5% en 2011 à 15,3% en 2015. Les projections pour 2016 se situent autour de 15,7% selon la Banque Mondiale (rapport octobre 2016).

Une agriculture pérenne et efficace ne peut se faire sans élucider et résoudre la problématique de l’eau. « Plusieurs pré requis conditionnent la réussite de la mise en place des lignes d’actions identifiées dans l’agriculture à savoir : la maîtrise de l’eau » (cf. PSE point 189)

Il faudra traiter la question de l’eau qui est uniquement de source pluviale et saisonnière et ne permettant pas d’accompagner une agriculture forte. Nous conseillons fortement la mise en place de politiques de protection des captages d’eau et en faire un levier pour accélérer la reconquête globale des terres abandonnées. L’objectif est de permettre à nos agriculteurs de pouvoir travailler au moins 9 mois dans l’année.

A l’étranger, des pays semi arides ont trouvé des solutions durables à leurs problèmes liés à l’eau. Nous pouvons citer l’exemple d’Israël qui a créé le système de goutte à goutte pour son agriculture, mis au point le dessalement de l’eau de mer, fait des campagnes d’économie de l’or bleu. Ces techniques lui permettent d’avoir de l’eau pour ses besoins (agricoles et domestiques). Quelques chiffres pour illustrer : eau disponible. (Chiffres 2015, en millions de mètres cubes) : eaux de pluies qui ont ruisselé dans les nappes phréatiques exploitées?: 1 500 ; recyclage des eaux usées?: 450 ; récupération des eaux de ruissellement pour l’agriculture?: 300 ; dessalement?: 600). Nous devons nous inspirer de ces exemples qui ont fait de l’Etat d’Israël un ‘orfèvre de l’eau’

Le programme de dessalement de l’eau de mer initié par le gouvernement (financé par le Japon) apportera, à terme, des solutions non moins négligeables aux angoisses des populations notamment au niveau de Dakar et de sa périphérie. Aussi, une redirection vers l’irrigation de l’eau du Lac de Guiers approvisionnant la région de Dakar est à prévoir.

En conclusion, tous ces efforts et programmes concernant l’agriculture peuvent tirer vers le haut l’élevage (sous-secteur du primaire) et booster l’agribusiness. Ces deux domaines sont intimement liés car les cultures fourragères et autres produits (mais, tourteaux) servent comme aliments de bétail.

 

Cheikh Bamba THIOYE

CCR France

bthioye@gmail.com

 

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