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Opinions, Idées et Débats des Sénégalais

Du Besoin De Renaissance Politique Au Sénégal

Le débat politique au Sénégal est à un niveau très bas, et bien sûr, ce n’est pas faire dans l’originalité que de le constater. Mais, au regard de l’importance institutionnelle d’une Assemblée nationale, il est quand même déplorable qu’à moins de 6 mois des élections législatives de 2017, il n’y ait pas de propositions programmatiques des différentes forces politiques et de débats sur les orientations, réformes et autres mesures phares pour réaliser les avancées politiques, économiques et sociales tant attendues par notre Peuple. Au contraire, tout le débat est structuré autour de positionnements personnels d’acteurs politiques : «Je veux diriger la liste de la coalition…», «si la coalition ne nous donne pas le quota de députés que nous méritons…» ou, plus subtilement, «si on ne nous montre pas assez de considération…» Au passage, ils en ont oublié le Sénégal. Depuis 2000, notre pays est sans nul doute entré dans une phase active de bouleversement social et politique. L’Alternance politique du 19 mars 2000, a été saluée comme étant la preuve du dynamisme de la démocratie au Sénégal. Pourtant, depuis lors, une confusion généralisée s’est instaurée dans l’espace politique et social sénégalais, avec l’accroissement exponentiel des partis politiques, des mouvements de soutien, et puis tout simplement, des mouvements bâtis autour d’une personne qui soutient (ou pas) un parti ou le président de la République. A cela, on pourra rajouter la pléthore de syndicats dans tous les secteurs sociaux et économiques avec la fragmentation des organisations historiques. Bref, l’espace politique et social est totalement miné par la course au positionnement personnel pour avoir une parcelle de pouvoir et de l’argent au moyen de multiples reniements et trahisons. A la grâce de la seconde alternance politique intervenue en 2012, avec l’avènement du premier président de la République né après l’indépendance du Sénégal, beaucoup d’espoirs avaient été fondés quant à la prise en charge des droits économiques et sociaux fondamentaux et immédiats des citoyens, mais également quant à la refondation de notre système politique pour créer les conditions-cadres favorables à l’enclenchement d’un processus de développement durable. Si on peut débattre sur les performances économiques et sociales du régime de Macky Sall (ce n’est pas l’objet de cet article même si en tout état de cause le système politique actuel affecte négativement ces performances), dans le domaine de l’amélioration de notre système de partis politiques il ne fait aucun doute que nous n’avons fait aucun progrès. Mieux, ou pire, «sa» législature 2012-2017 n’a pris aucune initiative visant à réformer ce système, sinon pour modifier un règlement intérieur qui affaiblit l’opposition parlementaire. On pourrait nous opposer les modifications apportées à la Constitution suite au référendum de 2016 avec des objectifs de «modernisation du rôle des partis politiques dans le système démocratique», et de la possibilité pour les candidats indépendants de participer à tous les types d’élection (qui viennent se rajouter au plus de 250 partis pour renforcer la cacophonie au cas où il y’en aurait pas assez). Mais le fait est qu’à 6 mois de la fin de cette 12e législature, et, à un an de ce qui aurait dû être la fin du mandat présidentiel en cours, notre système de partis politiques continue de se déliter. Si on peut lui reprocher son immobilisme sur la question, ce délitement ne saurait cependant être entièrement imputé au Président Sall. En effet, les citoyens sénégalais qui s’engagent dans la politique doivent questionner le sens qu’ils donnent à cet engagement, et les partis politiques ont la responsabilité de promouvoir l’éthique politique et d’asseoir une démarche qui mette en avant le débat d’idées et l’offre programmatique. La presse également a un rôle important à jouer, en particulier dans l’élévation du niveau du débat politique, et, mieux, dans l’élévation de la culture politique des citoyens à travers des choix adéquats des participants et animateurs du débat politique et des options éditoriales responsables qui s’éloignent de ce divertissement et de ce sensationnel qui priment actuellement. L’enjeu est de taille : il s’agit tout simplement de sauver notre démocratie. Lors de la dernière consultation populaire, avec leur abstention (+60%), les Sénégalais ont donné un message fort aux politiques, qu’ils soient du pouvoir ou de l’opposition. Désabusés par la mal-gouvernance chronique, désorientés par les retournements de position et les incohérences de certains acteurs, et écœurés par la transhumance politique, les citoyens sénégalais affirment de plus en plus leur dégout pour la politique. Or, la politique, expression des engagements qui orientent notre destin commun, étant impérissable, le choix ne réside que sur comment nous la voulons. Car si la politique, comme le dit André Comte-Sponville «n’est pas là pour faire le bonheur des hommes», elle devrait au moins être là «pour combattre le malheur – et elle seule, à l’échelle d’un pays ou du monde peut le faire efficacement.» Il nous reste maintenant à poursuivre le combat (et le débat des idées) avec les citoyens sénégalais, militants des partis et des autres forces sociales qui ont à cœur de réaliser enfin les ruptures essentielles. C’est le sens de l’initiative lancée par la Ligue Démocratique lors de ses Rencontres hivernales des 29 et 30 octobre 2016 à Dakar pour la constitution d’un Club de réflexion et d’orientation ouvert à tous les intellectuels démocrates, dont le seul souci est l’avenir du Sénégal et qui sont capables de contribuer à restaurer le débat d’idées autour des questions politiques, institutionnelles, économiques, sociales et culturelles qui interpellent notre pays. Les renoncements présents étant meurtres des générations futures, il est de la responsabilité de tous ces intellectuels démocrates de se mobiliser et de travailler à promouvoir un système politique qui nous assure un meilleur vivre-ensemble, un système dans lequel, pour paraphraser Claude Adrien Helvétius, il est de l’intérêt de chacun d’être vertueux. Ousmane NDOYE Membre de la Coordination des Cadres et du Bureau politique de la Ligue Démocratique (Ld)

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