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Opinion Publique C/ Ministère Public

Nous avons rarement vu un auxiliaire de justice, à un niveau aussi élevé, violer le secret de l’instruction et rabaisser sa charge que dans l’exercice qu’il nous été donné de supporter ce vendredi 03 mars 2017 par le procureur de la république monsieur Bassirou Gueye. De mémoire de lecteur jamais perte de crédibilité institutionnelle n’a été aussi fulgurante qu’après cette désastreuse conférence de presse à tous points de vue. Seul face à sa conscience, monsieur le procureur devrait en tirer toutes les conséquences à moins que sa hiérarchie ne le fasse.

L’opinion, les acteurs politiques et la webosphère sénégalaise n’ont pas encore fini depuis vendredi de s’émouvoir de ce dérapage incontrôlé qui n’a pas laissé de marbre même les spécialistes du droit tels que Mes Assane Dioma Ndiaye, Amadou Sall, EL Hadji Diouf pour ne citer que ceux-là.

On l’aura compris, nous vivons une autre époque. Qui peut imaginer l’ancien procureur Ousmane Diagne dans cette situation? Il est bien loin ce temps où juste la qualité de la preuve au dossier suffisait à rabattre le caquet au plus tonitruant truand politicien.

Mais quelle mouche a piqué monsieur Gueye pour se lancer dans cet avilissant exercice de divulgation, humiliation de justiciables et menace du public? Rappelez-moi le rôle d’un procureur déjà? Nous avons beau fouiller dans ses attributions dans le code de procédure pénale, nulle part un rôle de censeur de la critique ne lui est assigné, nulle part la faculté d’intimider les populations ne lui est attribuée.

Sachons raison garder et admettons que les populations sénégalaises peuvent raisonnablement affirmer à la suite d’éminentes personnalités du monde juridique que la justice sénégalaise N’EST PAS indépendante. Ce que les sénégalais veulent c’est la même rigueur judiciaire pour tous, le sentiment d’injustice est loin d’être une simple perception. L’enjeu social comme l’a si bien illustré le chroniqueur Birame Waltako Ndiaye : « … c’est surtout que la confiance des sénégalais envers les magistrats soit au beau fixe…». Il s’agit de la confiance des sénégalais envers leur système de justice, appelons cela la confiance du public. Voila un concept bien immatériel que le «public» ou sa «confiance» mais gageons que les politiques savent fort bien l’appréhender quand il s’agit de solliciter le suffrage électoral.

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Qu’est-ce donc que la confiance du public?

La confiance est un élément fondamental pour assurer la légitimité du système judiciaire et la participation du public à l’administration de la justice (p. ex. signalement de crimes à l’autorité, collaboration dans le cadre de poursuites criminelles et acceptation du déroulement de l’instance et de l’infliction des peines).

Ce qui est présenté comme le dénigrement ou la remise en cause de l’institution judiciaire n’est que l’expression souveraine de leur ras-le bol de la perception d’une justice qui ne traite pas tout le monde de la même manière.

Cette défiance à l’égard du système de justice (pénale en particulier) appelle le gouvernement et les professionnels de la justice améliorer leurs façons d’informer le public quant à leurs rôles et mandats. C’est peut-être à cet exercice qu’à voulu se soumettre le procureur Bassirou Gueye mais de manière si consternante de mauvaise foi, de mépris et d’abus de pouvoir qu’il en a perdu toute crédibilité si l’on en juge par le tombereau de critiques cinglantes du plus humble citoyen si jaloux de sa liberté aux personnalités ou juristes les plus respectés.

Qu’attentons-nous du procureur?

Que dans tous les dossiers de l’heure, il se soit assuré que la preuve qu’il a soumis à l’instruction soit digne de foi et présentée équitablement en Cour de façon à ce que justice soit faite au moyen d’un procès impartial. Tout représentant du ministère public qu’il soit, il se doit d’assurer la population qu’il est prêt à envisager l’innocence d’un accusé à tout moment au cours des procédures. Et surtout en tout temps, respecter la présomption d’innocence!

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On attendait un procureur de la République agissant de manière objective et libre de toute influence politique partisane sans exprimer son opinion personnelle quant à la culpabilité ou l’innocence d’un accusé.

Au contraire nous avons vu un réquisitoire tous azimuts tendancieusement orienté pour convaincre l’opinion publique que les sieurs Abdoul Mbaye, Bamba Fall, Khalifa Sall et compagnie étaient de vulgaires criminels qu’il fallait humilier sur la place publique. Honte!

De quel public parle-t-on?

Est-ce que nous parlons des militants ou sympathisants de Karim Wade, Idrissa Seck, Barthémy Diaz, Abdoul Mbaye, Bamba Fall (j’en oublie surement) venus manifester aux abords du tribunal, à chaque interpellation/convocation, pour réclamer la liberté de leurs champions ou une justice équitable? Est-ce qu’il s’agit de l’opinion de cet aréopage de personnalités de l’opposition flanquées du soutien d’un dignitaire religieux dans une salle comble et survoltée tout acquise à la cause de Khalifa Sall ce dimanche 05 mars 2017?

Certes, ils charrient une arrière-pensée politique mais il en faut tenir compte. Cependant nous considérons un public suffisamment informé des faits, de nos lois, capable de juger sans passion, soucieux de la présomption d’innocence. C’est la promesse que les sénégalais attendaient du procureur et non la violation du secret de l’instruction des affaires en cours, les menaces aux citoyens et la morgue affichée pendant toute la durée de cette catastrophique opération de communication qui doit faire le lit des prochaines interpellations dont personne ne doute.

Le procédé est tellement gros, grotesque et cousu de fil blanc que le public en arrive à ignorer ce dont il est question : la gestion «sobre et vertueuse» des deniers publics dont Khalifa Sall est comptable pour n’y voir que le dernier avatar d’un plan diabolique de disqualification des opposants en instrumentalisant les corps de contrôle de l’État et la justice. C’est assez!

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Monsieur le procureur en appelant par des menaces, intimidation et abus de pouvoir au respect de la magistrature et de l’administration de la justice contre toute voix critique a été lui-même le premier à discréditer l’institution judiciaire et l’administration de la justice. Il s’est discrédité lui-même et sa charge avec. Pour preuve aussitôt que cette opération de «Gaindé Simb» terminée, le tumulte de la volée de bois vert qu’il a reçu sonne encore dans nos oreilles. Il ne faut jamais proférer des menaces qu’on ne peut mettre à exécution.

Parcourez un peu le web, tendez l’oreille à clameur de la rue, ce procureur n’inspire plus confiance ni respect, nous en appelons au ministre de la justice pour sauver ce qui reste de la crédibilité et dignité de cette charge et de l’institution judiciaire en général en commençant par le «débranchement» sans délai de monsieur Gueye.

 

Pape Kanté

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