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Et Quelle Dia-sporà Pour Un Sénégal émergent ?

Et Quelle Dia-sporà Pour Un Sénégal émergent ?

 « La politique c’est éphémère mais une équation est éternelle » Albert Einstein

La DIA-SPORÀ est devenue une actrice qui se fait de plus en plus entendre sur les grands enjeux  politiques. La Dia-sporà est subitement devenue une entité à part, avec son ministre, son électorat, sa presse, ses revendications et la dernière trouvaille de nos gouvernants, un Secrétaire d’État.

Cependant, la dérive est qu’on parle de la diaspora comme d’un groupe doué d’une conscience collective. Ma préoccupation est qu’à aucun moment la Dia-sporà n’a été l’objet d’une programmation stratégique dotée d’un dispositif organisationnel et qui matérialiserait la vision politique d’une émigration comme un pilier de croissance, d’émergence, de développement ou un phénomène à atténuer.

Mon postulat est que les émigrés n’ont pas besoin de représentant, de député ou que sais-je encore. Mais plutôt d’un programme d’action publique  basé sur une vision politique globale faisant le lien entre les réalités de notre état de pauvreté et  les opportunités de développement qu’offre l’émigration. Il faut comprendre que les partis d’opposition cherchent à amadouer la diaspora dans le seul but financier (cotisation, carte de membre, création de sites web, hébergement et financement lors des tournées politiques). Et au même moment, le parti au pouvoir déverse de l’argent dans cette diaspora pour acheter leur vote afin de pouvoir légitimer les résultats sur le territoire national.

Ainsi pour des penchants purement électoralistes, nos politiciens passent à côté des potentialités et des opportunités de la diaspora, notamment en ressources humaines prédisposées à créer le déclic dans un pays qui aspire à la rupture. Car il se trouve que nous sénégalais qui vivons dans la Dia-sporà, évoluons dans les systèmes de recherche, de planification et de gestion (financiers, commerciaux, universitaires, hospitaliers, technologiques, agricoles, énergétiques, industriels, etc.) les plus performants au monde.

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Et Il se trouve que le Sénégal a un problème de système à tous les niveaux. Le postulat de mon assertion se fonde sur le fait que l’immigration est une condition d’abord individuelle et situationnelle. L’étudiant en France n’a pas les mêmes problèmes que l’étudiant au Canada. Le commerçant du Baol qui va  en Italie n’a pas les mêmes aspirations que le fonctionnaire sénégalais qui émigre au Canada. Voilà la pertinence d’une approche localisée depuis  le pays d’accueil à travers des ambassades aux missions renforcées et adaptées aux besoins des émigrés et du contexte national.

In fine, on comprend alors que la diaspora est bien une « communauté imaginaire » pour reprendre l’expression popularisée par Benedict Anderson. Le terme est  initialement un terme botanique signifiant « dispersion des graines ». Du grec ancien et construit avec le préfixe dia et sporá, « ensemencement ») issu du verbe speíro, « semer » qui a aussi donné « spore » en français. Ce retour à la source du mot par l’étymologie, confirme l’état éclaté de notre objet d’étude et milite, par voie de conséquence, pour une approche diffuse et locale de l’action publique vers les émigrés.

Voilà l’enjeu de la gouvernance, elle se situe dans la capacité d’accompagnement des émigrés. C’est honteux que la FAO finance des études pour savoir comment inciter les émigrés originaires de Louga à investir dans l’agriculture et que notre État se complaise à des actes politiciens de distribution d’argent, de nomination politicienne et de déclaration creuse d’une diaspora qui serait la 15e région.

Il faut à ce régime, et c’est ce qui a qui a manqué à ses prédécesseurs, une vision politique exprimée à travers une stratégie nationale de l’émigration sur 20 ans, exprimant le rôle de l’émigré dans notre volonté d’émergence économique. Car retenons que si la diaspora juive est devenue l’un des atouts d’Israël, c’est bien parce qu’Israël en a compris les  enjeux, développé et appuyé  ces flux d’émigration, mieux évalué les opportunités d’affaires et de ressources humaines et tiré ainsi profit des opportunités de transfert de compétences, de technologie et de flux financiers.

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En somme, l’État du  Sénégal doit comprendre que l’émigré est un acteur potentiel de développement. Et il doit formuler sa logique d’action publique sur cette conviction et proposer une vision dotée d’objectifs globaux et d’objectifs spécifiques et ensuite incuber une stratégie dont la mise en œuvre doit suivre  les principes d’une gestion axée sur les résultats.

C’est en ce sens qu’un observatoire de l’émigration en bonne et due forme constituerait la tête pensante de cette stratégie politique. Rattaché aux milieux universitaires, son objectif serait de produire des données sur la typologie des flux d’émigrants, les origines régionales, les motivations, les parcours et les réalités du pays d’accueil et les formes d’absorption des fonds venant des émigrés. Il s’agit de produire la connaissance scientifique  nécessaire à une action publique qui se respecte, afin de bien saisir l’ampleur du phénomène, les opportunités et les risques, les tendances et les orientations stratégiques à prendre.

Nous sortirons alors de l’ère des politiques étrangères de représentation politicienne et bureaucratique, pour évoluer vers une diplomatie au service des émigrés, ayant le sens des affaires et  participant ainsi à l’effort de développement économique.

Nos ambassades cesseront alors d’être des mouroirs pour politicien à la retraite ou de joujou pour jeune politicien de la diaspora et pour enfin devenir des structures proactives, incubatrices et porteuses d’une stratégie de développement faisant de l’émigré un acteur à valeur ajoutée dans notre politique d’émergence.

 

Moussa Bala Fofana

Moussa Bala FOFANA
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