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« de L’islam Sénégalais Et De La Charlie Française »

« de L’islam Sénégalais Et De La Charlie Française »

« La vanité consiste à vouloir paraître ; l’ambition, à vouloir être ; L’amour-propre, à croire que l’on est ; Et la fierté, à savoir ce que l’on vaut » le Compte de Rackzinski

L’islam fait débat et c’est le moins qu’on puisse dire. Et nous musulmans, nous assistons d’une part à des faits barbares et d’autre part à des actes islamophobes. Mais toujours est-il que ces faits terniraient notre foi si nous nous taisions, baissions la tête ou faisions la sourde oreille. Au Sénégal, et en réaction à ce climat international difficile à assumer, on magnifie l’exception sénégalaise comme le bon islam qui serait un modèle particulier et même différent. La nouveauté n’est pas la propension des nations à se croire exceptionnelles, mais le fait est que jusqu’ici ce discours nombriliste était plutôt populaire. Mais il commence à prendre forme dans le champs de la recherche scientifique avec des voix sénégalaises qui défendent mordicus l’existence d’un modèle islamique sénégalais. Partant de ce constat, j’aimerais aujourd’hui exposer une réflexion plus large et une fois n’est pas coutume, ma réflexion aura une dimension sociologique et portera sur l’actualité internationale avec Charlie.

Dans un premier temps, nous devons comprendre que l’universalité du message de l’islam est en soi l’unique modèle. Nous les sénégalais, nous n’apportons donc rien de  nouveau aux fondamentaux, aux piliers et aux textes islamiques. Cependant, la particularité du Sénégal est que notre société a été capable d’exprimer le vrai visage de l’islam et pas forcément un nouveau modèle islamique. Cette particularité de la société sénégalaise repose sur deux éléments sociologiques fondamentaux qui caractérisent la société sénégalaise en ce qui concerne sa cohésion sociale et surtout la construction de  son identité :

Ainsi, le Sénégal n’a pas un modèle islamique, mais un modèle de société qui permet à chaque individu de vivre et de pratiquer sa spiritualité, d’afficher ses traits ethniques et d’avoir des habitus de son territoire sans avoir à s’en justifier, ni en à subir des ségrégations.

Par ailleurs, il faut avoir le courage de dire que les intellectuels qui défendent l’idée d’un modèle islamique sénégalais le font pour des relents nationalistes et panafricains qui expriment en réalité un complexe vis-à-vis de la prédominance de la pensée arabe dans le monde musulman. Je suis d’accord qu’il y’a une disproportion évidente entre la minorité arabe faisant moins de 20% des musulmans, par rapport à leur surnombre dans les porteurs de la voix de l’islam sur le champs médiatique. Cependant, cela n’est pas une raison pour développer des thèses orientées et donc biaisées. Car l’épistémologie et les méthodes de recherche en sociologie  nous apprennent que quand un projet scientifique démarre par des intentions de positionnement, alors la méthodologie de recherche est de fait biaisée en amont, car le résultats de la recherche compte moins que la nationalité du chercheur et moins encore que le besoin d’aboutir à une thèse différente de la thèse normée.

Voilà pourquoi je suis sceptique vis-à-vis de tous travaux scientifiques ayant pour but de réécrire l’histoire des peuples ou du positionnement d’une nation. Je ne récuse pas la nécessité de revisiter certaines pages de l’histoire d’une manière générale, mais, dans la démarche, nous devons rester cohérent  en termes de méthodologie et de distance critique de notre objet d’étude et faire ainsi preuve de neutralité axiologique. Nous devons prendre comme exemple la posture épistémologique de Cheikh Anta Diop dont les recherches et découvertes scientifiques ont, par la suite seulement, amené à défendre une position politique et pas l’inverse. Ainsi, la volonté d’avoir un positionnement et d’exister par sa posture ne doit pas être la motivation de la recherche, car elle en biaiserait ainsi la problématique, orienterait la thèse et induirait des théories, des méthodes et des techniques impropres. Ceux qui défendent cette thèse, se satisferont de vous faire un descriptif de la composition confrérique et des brises de renouveau comme le modèle islamique sénégalais. J’aimerais rappeler à ceux-là, que ceci est plutôt une configuration d’acteurs spécifiques à un contexte social précis et qu’on ne saurait le transposer ailleurs. Ceux qui font la promotion de l’existence d’un modèle doivent savoir qu’un modèle doit être exportable et n’a pas pour but de démontrer une spécificité. En effet, l’objectif scientifique de la méthodologie de la modélisation est de faire ressortir une structure fonctionnelle, un schéma gagnant pour ensuite  pouvoir le transposer dans d’autres configurations d’acteurs et d’autres contextes sociaux.

Nous devons donc comprendre une bonne fois pour toute que l’islam n’est pas une culture. Cette approche est réductrice pour l’islam et ne lui rend pas service. L’islam c’est des principes pour une spiritualité dotée d’une adaptabilité dans tout contexte social. Et la preuve en est que l’islam est présent en Asie, en Afrique, en orient et fait une progression fulgurante dans les sociétés occidentales où la quête d’une spiritualité devient de plus en plus importante devant le niveau de luxure et de rationalisme.

Les principes universels, dont  la vie du prophète (PSL) fut un exemple pratique dans un contexte social précis (arabe), sont aujourd’hui une  référence dans plusieurs nations dispersées sur les continents et ces nations appartiennent à des civilisations profondément différentes, avec des races différentes et des traits ethniques d’une pluralité insoupçonnée. Ainsi, soit dit en passant, cette hétérogénéité de la ouma islamique bat en brèche les propos xénophobes de certains hommes politiques et intellectuels de l’occident qui veulent réduire le message et les principes de l’islam à une civilisation arabe qui représente en réalité moins de 20% des 1,5 milliard de musulman. Rappelons que cette civilisation arabe comporte en son sein une richesse et une diversité ethnique et que les arabes sont organisés depuis des siècles en nations fortes ayant affirmé leur volonté  de prendre en main leur propre destinée.

En conclusion, nous réitérons que le message de l’islam est universel et que l’islam est compatible avec toute démocratie et avec toutes les sociétés  qui ont fait de la Liberté,  de l‘Égalité et de la Fraternité le ciment de leur cohésion sociale. Ces sociétés, si elles sont respectueuses de ces principes en toute équité et sans pratiquer un double langage hypocrite à géométrie variable, verront éclore le vrai visage de l’islam  et d’autres formes d’appartenances raciales ou culturelles sans que cela puisse nuire à la république. Et c’est là tout le mérite de la société sénégalaise, mais aussi de la majorité des nations qui composent la Ouma islamique et aussi les sociétés à travers le monde occidental  qui ne seraient point dans le nihilisme de la dimension spirituelle et de ses pratiques inhérentes.

Aujourd’hui, ce qu’on veut faire passer comme une exception, c’est à dire que l’islam est paix, est en fait la règle qui prévaut dans les textes et les faits. Ainsi, théoriser le modèle d’exception sénégalais est non seulement une contre vérité mais un danger pour l’islam, car nous faisons croire au monde que la paix en islam est une particularité sénégalaise. Alors que la paix est l’essence de l’islam et l’exemple le plus répandu. Mais comme tous les trains qui arrivent à  l’heure, ce fait majeur de l’islam terreau d’une paix sociale est enseveli par certains agendas de politiques étrangères. Ces agendas sont facilités  par une certaine presse ignorante et incendiaire. Mais ces agendas sont aussi légitimés par les actes inhumains, la barbarie et l’instrumentalisation des textes islamiques pour donner une forme divine à des penchants purement sataniques. Et je pense sincèrement que si une religion pratiquée par plus du quart de la population mondiale était réellement une religion de violence, alors le monde serait déjà plongé dans un véritable chaos.

Cependant, je suis d’accord qu’on fasse la promotion du Sénégal, mais sur les questions de cohésion sociale et d’une société exemplaire dans le respect des identités, des croyances et des différences. Tous les musulmans sont des frères dans la foi et cette foi n’enlève en rien les différences entre les races, les civilisations, les nationalités et les ethnies qui composent la Ouma islamique. Et c’est parce qu’on est frère, que nous devons rappeler à nos frères le respect de l’homme, de sa dignité et lutter contre l’interprétation machiste du Coran contre les femmes, contre l’esclavagisme envers les noirs et la haine vis-à-vis de l’Occident. A  l’Occident, nous demanderons le respect  de nos symboles, de nos pratiques  et de notre identité ethnique et raciale sans conditions. En retour, nous leur devons un respect d’égale valeur.

Si certaines civilisations définissent le progrès de l’humanité par la prépondérance de la rationalité au service de l’avoir et du désir, qu’elles laissent à d’autres civilisations, à d’autres nations et même aux citoyens qui vivent parmi eux, le droit de croire qu’en plus de la rationalité et de l’assouvissement des désirs, que l’homme est aussi spiritualité ! Que l’homme est aussi foi, car l’âme faim a besoin de lumière et il se trouve que la spiritualité et les pratiques inhérentes sont la voie de la foi qui apaise le croyant. L’islam n’est pas un problème, il est à l’image de l’eau, symbole de transparence et de paix, mais, la couleur, la forme et/ou l’opacité du contenant (comprenez ici la société) qui l’embrasse peut, comme un mirage, faire croire qu’il est opaque ou menaçant. Nous croyants, nous avons le droit de choisir entre les contraintes de la religion qui prodiguent la quiétude d’une spiritualité et les libertinages de l’athéisme qui au fil d’une vie tirant vers son crépuscule, entraîne l’amoncellement d’une douleur dont l’acquitté incandescente vous plonge dans un désert de solitude.  Et c’est de cette souffrance de l’athéisme, que vient l’intolérance, l’ insupportable vue de tous signes et pratiques religieuses qui rappelleraient l’existence de la foi et de la soumission en toute liberté. Voila ce qui explique, sans le justifier, ce comportement désinvolte, irrespectueux et lâche  envers tout ceux qui est sacré. Cependant, parce que La liberté des uns s’arrête là ou commence celle des autres, nous refusons d’être les charlots de haine, les objets de railleries irresponsables et de stigmatisation à des fins pécuniaires ! Et parce que aussi nous sommes attachés à la liberté et à son prix, nous pensons que pour être digne de cette liberté pour laquelle des hommes sont morts en la défendant, il faudrait l’exercer avec responsabilité. Ce n’est donc pas rendre service aux valeurs humaines de liberté que d’invoquer ces principes universels pour cautionner l’insulte des symboles de l’autre pour des raisons purement mercantiles, irresponsables et pour assouvir une souffrance du vide. Pour moi la liberté rime avec la connaissance de l’autre, l’ouverture, le respect et le dialogue.

Et pour nous sénégalais, devant la menace terroriste dans la sous-région, nous espérons que l’État est suffisamment responsable, conscient et conséquent pour prendre les dispositions militaires, diplomatiques et stratégiques pour faire face à tout scénario dans la sous-région. C’est sa responsabilité, il ne peut la déléguer à une autre nation. Il en va de notre souveraineté, de notre crédibilité et du peu de fierté qui nous reste de ne pas toujours compter sur l’autre à tel point qu’on en adopte des positions inconfortables. Car rappelons nous, que si l’hyène fait marcher un lion au pas et à l’oeil, c’est parce que ce dernier a vendu toute la fierté qui lui restait depuis belle lurette…et comme disait Richard Sibbes, « La pauvreté et le malheur détruisent l’essence qui alimente la fierté », et la fierté est la condition sine qua non de la survie d’une nation.

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