À la différence des autres chefs de parti, Idrisa Seck est le seul dans l’opposition qui soit contesté à l’intérieur de sa famille politique pour s’être tenu loin du pouvoir et de ses faveurs. Les autres sont critiqués pour tout le contraire : s’être cramponnés sur Macky Sall pour jouir dans l’intimité de leurs seuls intérêts. En clair, les détracteurs du patron de Rewmi lui reprochent un manque de démocratie interne. En vérité, ils réalisent avoir trop à attendre loin des guichets automatiques du régime pendant que la classe politique, de la gauche à la droite libérale transhumante, bougonne mais s’empiffre de privilèges et de planques.
« Refonder le parti à la dérive. Nous allons enlever Idrissa Seck totalement de cette direction. Il ne répond plus à nos aspirations », disait Omar Sarr. Deux facteurs dévastateurs permettent de comprendre que le tempérament d’Idy n’est pas en cause, mais bien son solitaire positionnement sans honoraires ni émoluments pour la clientèle. Rewmi se distingue de tous les grands partis par son retrait hâtif du carcan juteux du pouvoir. Idrissa Seck tarde à réconforter ses proches collaborateurs de dispositions imminentes à s’ériger tête de proue de l’opposition et alternative plausible et prometteuse.
Pour rester productif, ni Benno Bokk Yakkar, ni le PDS et encore moins ses détracteurs ne doivent le distraire dans sa nécessaire impulsion au devant de la scène politique. Ils sont beaucoup trop nombreux et embrouillés pour s’éliminer les uns après les autres. La bataille de l’heure, celle à livrer avant même celle de la proximité, est celle du leadership dans les rangs de l’opposition, d’autorité messagère principale des aspirations à la rupture. C’est maintenant ou jamais le temps de brandir aux yeux des sénégalais la pertinence du choix, celui d’avoir opté pour le renoncement, signe du devoir.
À la condition de démystifier la force des alliances-assemblages et des feintes habituelles, Idrissa Seck fera la différence à partir d’un discours clair de rupture dans l’exercice du pouvoir et de dépassement des petites querelles de cour. Orienté résolument vers des propositions novatrices de sortie de crise et de saine gouvernance, il court-circuitera toute velléité de diabolisation de sa personne. Après tout, la « karimisation » du PDS et de sa destinée l’innocente trop bien des accusations de boulimie du pouvoir dont il continue de faire les frais.
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué… : un projet percutant sur la gestion des fonds politiques, sources de toute la dilapidation au sommet de l’État, doublée d’une résolution nourrie sur la réconciliation nationale et l’impérieux apaisement social suffisent largement à convaincre d’une nette propension à redorer le blason d’après Wade. Sa réputation d’homme de poigne et de vertu fera le reste. Il s’agit d’ouvrir d’abord les pompes aspirantes en s’imposant principal opposant pour ensuite pouvoir s’adosser sur le bloc imposant et non affilié des adeptes d’organisation nouvelle.
L’essentiel, c’est d’être le premier, d’être en tête, le plus à même de convaincre et de déboulonner l’adversaire d’en face. S’il est vrai qu’il faut aller vers les populations, c’est encore plus vrai que la gratification de la posture de porte-drapeau des mécontentements motive et intéresse davantage l’électorat. Si les candidatures indépendantes peinent à s’imposer sur l’échiquier politique, c’est parce qu’au Sénégal, tels les sondages dans les pays du nord, l’effet des mouvements de masse fait office de « prime à l’urne ». La majorité des citoyens sont « ramenés à la raison » et choisissent le candidat le mieux placé.
Difficile à comprendre : Idrissa Seck s’était inscrit dans une logique de sprint électoral pendant que tous les autres cherchaient à gagner du temps auprès de Macky Sall, répartiteur de refuges et de revenus. Ça lui a valu tant de reproches, tant de besoins inassouvis, tant de trahison. Et, maintenant qu’il en a subi tout ce revers, il ralentit la cadence comme dans une course de fond alors que le temps est venu de marquer la différence avec tous les autres plus prudents et moins courageux. Toujours à l’ordre du jour, la gestion sobre et vertueuse restera l’enjeu principal du débat public et, c’est en cela que la masse fluctuante et majoritaire ciblera puis, bien après, élira le 5eme président de la république.
Birame Waltako Ndiaye
waltacko@gmail.com
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