L’imam de la grande mosquée se déclare favorable au mandat présidentiel de 7 ans et les pauvres bienpensants s’excitent en exorcisés. Comme pour exiger des guides religieux qu’ils le deviennent par intermittence, il faut les cloisonner et s’attendre à ce qu’ils soient aphones sur la chose politique. Un peu de cohérence! Si les religieux sont à part entière des acteurs sociaux, il faut bien leur reconnaître un espace d’expression sur les choses courantes. Pas question de les cantonner dans la sphère de la spiritualité quand ça fait notre affaire et se prévaloir de leur influence à chaque fois que coïncident nos intérêts et l’orientation des prêches.
Quand des petits fils de marabout se dévoilent pour apprécier ou attaquer, forts de leurs images sacrées, nous tergiversons entre la légalité citoyenne et leur légitimité filiale. Sinon comment admettre et allouer tant de crédits au responsable moral du Cercle des Soufis, Serigne Fallou Dieng, par simple fait d’ascendance? Comble d’ironie! Ce dernier condamne « l’incursion prétorienne et le jugement partisan et politicien » de l’Imam de la grande mosquée de Dakar pour ses propos relatifs au mandat du président Macky.
Et les « ndiguels » et les suggestions favorables à tel ou tel autre pourvoyeurs bienfaisants? Parce que l’imam Samb n’est pas draineur de foule protectrice, parce qu’il manque de force attitrée et de capacité de nuisance qu’il est critiqué au nom de la laïque séparation des pouvoirs. Imam, ou cheikh, ça fait accrochage dans le décor alambiqué des principes républicains superposés aux affections et aux adorations des sénégalais. Nous cherchons sans cesse à ménager les autorités religieuses sans jamais prendre la peine de les intégrer dans le décor institutionnel. Après tout, c’est aussi de la société civile.
« Les marabouts sont des citoyens ordinaires », avait dit le candidat Macky Sall, et pour le faire passer impie et impoli, ses détracteurs l’ont cloué au pilori. Les Jeunes Tidjanes dirigés par Imam Mamour Fall qui avaient auparavant « organisé un wazifa pour exiger le départ de Wade » ont par la suite changé d’avis en faveur de ce dernier. Franchement! Des prières pour les politiques, mais point de politiques dans les prières, semblent exiger confusément les enflammés. Cherchez l’erreur, elle est dans la subordination conditionnelle, elle est dans l’adepte fervent en sanglot, elle est dans l’indistinct repère entre dévotion et démocratie.
À présent, l’État constitue un cadre d’expansionnisme des sensibilités religieuses à la condition que leur loyauté politique soit assurée ou que leur opposition soit manifeste. Et pour tous les autres qui refusent toute compromission, ils resteront en marge avec leurs réflexions marginales et leurs sincérités ruineuses. En boucle, des tentatives timides d’isolement des religieux dans les limites de la spiritualité et des directives sur leur citoyenneté à part entière s’alternent. Dans les deux cas, de vagues banalités sont martelées selon la posture du guide en question ou les intérêts politiciens en jeu.
Babacar Gaye, porte-parole du Parti démocratique sénégalais, s’est illustré en ces termes : « En toute liberté, il aurait dû attendre le scrutin référendaire prévu pour s’exprimer valablement dans le secret de l’isoloir. L’Imam Samb aurait mieux fait de délivrer à ses ouailles musulmanes, un sermon se rapportant plus sur des questions pour lesquelles son avis est d’une pertinence avérée ». Mon dieu! Ces raides ancrages constituent un déni de citoyenneté. Ils privent abusivement le guide religieux de son droit fondamental à l’expression afin de convaincre ses « ouailles musulmanes » à adhérer à ses propres convictions.
Lorsque l’imam Ndour de Thiès, fustige dans ses sermons le pouvoir et ses positions et ses prétextes, c’est silence radio. Une fois pour toute, le temps est venu pour nous d’intégrer formellement ou de débusquer sans tri la réalité et la force du religieux dans le déroulement des choses publiques. Affiliation pour affiliation, quand des groupes d’intérêt du nord demandent à voter ou à ne pas voter Jean ou Paul, c’est vu sous l’angle d’une participation responsable de la société civile au rayonnement de la démocratie.
Birame Waltako Ndiaye
waltacko@gmail.com
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