Drapeau hissé au cœur du palais, hymne en chœur, et le président compte inoculer une bonne dose de civisme à la jeunesse sénégalaise. Manie de suiveur! L’incivisme des sénégalais traduit une délinquance de désabusés, il indique surtout le manque de confiance des citoyens aux institutions et aux meneurs. Les populations négligent les codes et symboles de la république parce qu’elles s’estiment escroquées par ceux-là qui proclament valeurs et principes dans les airs.
Avez-vous vu ce député sur un plateau de la télé contrarié par une requête à chantonner l’hymne national ? Postulant gardien des valeurs républicaines, Mamadou Sy Tounkara l’a acculé jusqu’à ses derniers retranchements. Peur du ridicule ou manquement, l’idéal républicain livre ses limites en terre d’ébène. C’est important de maitriser l’hymne, c’est encore plus important d’inspirer confiance et foi à ses concitoyens. De cette assurance dépend la motivation de la jeunesse à se conduire en tout respect avec la chose publique et de ses représentants et de ses emblèmes.
Les parades fracassantes et les maniements médiatiques échoueront tant que les efforts de ralliement des couches populaires ne seront pas sous-tendus par l’exemple. Macky Sall et son gouvernement gagneront plutôt à convaincre par des actes de renoncement auxquels le peuple attend des bons dirigeants. Là, le citoyen lambda, convaincu de la rentabilité réelle des efforts civiques, se révélera résolu à la résignation par reconnaissance. Sinon, « préchident bi », il clame dans le vide habituel l’impalpable force des institutions républicaines que répète d’ailleurs l’élite sans jamais l’éprouver dans la gestion du bien commun.
Macky Sall pense adhérer tout ce beau monde au comportement civique en hissant le tricolore étoilé le temps d’un lundi matin et en fredonnant d’étranges couplets décalés. Ce civisme appliqué nous fait bouffon entre peur du ridicule et reproduction comique des révolutionnaires gaulois. Réciter l’hymne sur un plateau de télé témoigne d’un ancrage aux principes républicains dit Tounkara. Ça traduit un rabaissement que n’autorise guère la notabilité propre au chef de canton, semble dire le député réfractaire. Quel beau spectacle !
Macky l’élu, fanatique de la citoyenneté romaine et Tounkara, sénégalais typique, contrarié sans cesse dans le méli-mélo du placage institutionnel. Tout pour faire un pays, collectionneur d’emblèmes. Demander à un député de réciter l’hymne national pour faire la preuve de quoi ? Si c’est pour l’enseigner aux téléspectateurs, ce n’est ni le rôle, ni la fonction du député. Si c’est pour le mettre à l’épreuve, cette mesquinerie s’inscrit en faux contre les règles d’éthique du professionnel de la presse.
Civisme mais civilité d’abord. Dans le premier des cas, il n’est question que de respect sec certifié tout court pour les institutions et les fonctions d’autorité. Dans l’autre, il s’agit de relation de confiance entre les élus et les administrés, facilitée par une volonté manifeste de l’élite à servir. Macky Sall, tout comme ses prédécesseurs, veut décréter l’adhésion des couches populaires aux règles répertoriées de bonne conduite. Il peut toujours spéculer. C’est une chose que de pincer les koras tel une litanie, c’en est une autre que de persuader de la portée générale et de l’utilité des convenances.
Birame Waltako Ndiaye
waltacko@gmail.com
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