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Daaras, Talibés Et Mendicité Au Sénégal: Ce Qu’on Ne Dit Pas Souvent Des Grands Daaras Du Pays

Daaras, Talibés Et Mendicité Au Sénégal: Ce Qu’on Ne Dit Pas Souvent Des Grands Daaras Du Pays

(Vu sous le prisme de l’ecole coranique de Thierno Mollé à Thilogne vieille de 2 siècles)

Que d’amalgame ! De confusion ! De méconnaissance et beaucoup de manipulation. C’est un fléau pour notre pays la mendicité des enfants de la rue qui prend de plus en plus d’ampleur dans nos villes. Les enfants subissent une situation que tout homme sensé et humain doit dénoncer. Quand on les regarde, ceux qui sont parents en premier, ne peuvent étouffer leur révolte, de cette exploitation honteuse de la situation de ces enfants démunis que certains affairistes envoient dans nos rues, pour qu’ils leur ramènent de l’argent, ces enfants les enrichissent. Ceci est révoltant, et doit cesser. C’est l’affaire de l’Etat, des gouvernants, de l’opinion aussi qui doit tirer sur la sonnette d’alarme.

« Grands Daaras et mendicité » quête d’humilité et de piété

Aprés, il y a les Daaras ou Dudal en poular. Des endroits dans certains foyers religieux où des enfants débarquent, depuis plus de deux siècles pour certains daaras, afin d’acquérir de la connaissance et de l’éducation. Le daara de Pire étant le premier de l’Afrique subsaharienne selon les historiens.

J’ai une certaine fierté à dire, que la maison de mes grands parents les « Thierno mollé » de Thilogne dans le quartier de Mollé et il est largement admis que c’est le 2e, mais pour plus de prudence disons que le Daara de Thierno Mollé est aussi un des premiers grands foyers d’apprentissage du coran au Sénégal et en Afrique de l’Ouest après Pire. Une vraie université, qui a perdu son recteur, un des plus érudits contemporain qu’on ait eu: Thierno Abdoul Gadir Ly il y a 8 ans. La reléve étant assurée aujourdhui par Thierno Abdoul Wahab Ly Charane.

Dépositaire de cette histoire, vous comprendrez aisément que je puisse être sensible encore plus que d’autres quand un certain amalgame est entretenu entre les enfants qui errent dans la rue, exploités par de faux dévots comme l’expliquent très bien le doyen Mandiaye Gaye dans son récent article sur le sujet, et les enfants qui apprennent le coran, qui sont dans des foyers religieux sérieux pour faire l’apprentissage de la vie. Ils y apprennent le coran mais aussi le loukha, le tafsir, le Siireu, le fikkou, la charia etc…

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Ces foyers nous ont donné les plus grands érudits dont nous nous targuons aujourd’hui, ces gens qui guident la majorité des sénégalais dans leur foi. Ces foyers de savoir et de lumière méritent donc notre respect et il mérite qu’on s’intéresse à eux, à leur daaras et à leur systéme. Le chemin initiatique pour les enfants qui y viennent a suggéré qu’on les mette à la mendicité pour la recherche de la pitance quotidienne afin de leur inculquer surtout l’humilité et la démystification des choses matérielles. Les plus grands érudits sont passés par là, et le livre « l’aventure ambiguë » du respectable Cheikh Hamidou Kane, nous conte d’une très belle façon, ce que c’était ce cursus dans notre cher Fouta éternel , surtout avant l’arrivée de l’école coloniale et le déchirement qu’a été cette rupture dans l’apprentissage des enfants observée dans le milieu haal poular.

Thierno Seydou Nourou Tall ( almoudo chez El Hadji Amadou Moctar Sakho) , Thierno Bocar Sidikh Ly (almoudo chez El Hadji Amadou Moctar Sakho) , Thierno Hamet Baaba Talla ( almoudo Chez Thierno Yéro Baal Hane de Guidjilone), Thierno Ahmadou Ba (Serigne Touba), El Hadji Malick Sy, Baaye Niasse, Thierno Mody Bocar de Bokidjiawé, Thierno Mamadou Saidou Ba (almoudo chez Thierno Hamet baaba à Thilogne ) tous ces érudits ont tous suivi ce cheminement.

Rôle des Daaras: l’exemple contemporain de Thilogne

L’université de Thilogne dirigée par feu Thierno Abdoul Gadir Ly a vu passée de grands noms qui sont des guides, des Khalifs actuels: Thierno Baaba Gallé Ndiath (Medina ndiathbé), Thierno Amadou Tall de Thierno Muntaga, Thierno Bocar Alpha BA (Horéfondé), Serigne Mbaye Sy dit « Ndiol Fouta » de Seydi Abdoul Aziz Sy Dabbaakh, imam Mouhamadoul Habib Ly, Thierno Mamad Cheikhou de Galoya et la liste d’hommes de science respectable qui ont fait ces types de daara est longue.

Ceux-ci étaient des « fils de » il y avait aussi dans ces différentes promotions des étrangers, des maliens, des mauritaniens et beaucoup de nigérians et de guinéens….. Mais aussi, et c’est là où se trouve mon sujet, des fils d’anonymes. Des jeunes venus de familles modestes, venus de familles pauvres matériellement, de jeunes garçons qu’on déposa à la porte des foyers comme ceux de Thilogne, de Tivaouane, de Coki, de Pire, de Touba, de Medina Baaye, De Medina Gounass, Horéfondé, Matam etc… sans que les parents ne paient quelque chose.

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Ces foyers traditionnels avec les recteurs qui les ont dirigé, comme les daaras récents de Thierno Samassa à Matam de Thierno Bousso ou de Mariama Niasse, pour ne citer qu’eux s’acquittent encore d’un rôle honorable d’éduquer, d’instruire, de loger et de nourrir des milliers d’enfants jusqu’à leur âge adulte sans qu’on leur ai demandé de payer quoique ce soit. C’est un engagement moral et divin que se sont donnés ces maisons, ces foyers religieux et aidés des habitants de leurs villages, qui recueillaient des talibés pour leur faire le linge, leur donner le manger et défois leur offrir le toit. Tous n’y ont attendu que de la baraka et la miséricorde d’Allah.

Donc ces daaras là, on leur doit reconnaissance pour oeuvre d’utilité publique dans une délégation de mission publique implicite, surtout nous musulmans, mais aussi pour nous citoyens. Ils se sont substitués pour certains jeunes et pendant des siécles à la force publique, pour l’éducation et l’instruction de ceux-ci. Aprés l’instruction de ces jeunes futurs guides, des cérémonies leur étaient organisées, chez eux dans leur village, pour les revaloriser, avec le « lizzeu » diplome très valorisé pour ceux qui ont emprunté l’enseignement arabo-coranique en main comme sésame.

Si aujourd’hui l’Etat réfléchit sur une réforme des daaras pour aider ces Daaras là à se financer, à se moderniser, à se développer, à mieux se structurer et à se réformer, il faut l’encourager car, les grands daaras accomplissent une mission d’utilité publique.

Sinon ils continueront dignement à accomplir leur serment fait devant Allah de servir l’enseignement du coran et de la Sunnah de Mohammad, et ceci avec l’aide des associations de leurs anciens élèves et des bonnes volontés, ils s’en sortiront tant bien que mal inchallah. MAis il est du rôle de l’Etat d’arrêter cette exclusion organisée des arabisans.

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Quelles solutions contre la mendicité des enfants de la rue

Quant aux enfants de la rue c’est un système qui s’apparente à un trafic d’humains tout simplement. Il faut proposer des solutions viables et opérationnelles à ce fléau et arrêter le sensationnalisme béat. On se révolte et s’indigne depuis longtemps et ça ne change en rien pour ces « pauvres » enfants de la rue.

Il faut que l’Etat mettre en place des solutions prenant en charge

– leur hebergement avec des structures spécialisées

– la prise en charge de leur éducation et de leur insertion sociale

– la prise en compte psychologique et médicale par rapports aux nombreux enfants qui vivent un comportement addictif vis à vis de la drogue, avec des structures médicales spécialisées pour l’enfance.

Tout ceci aura un coup financier de façon certaine et coutera des milliards en terme d’investissement à la communauté. L’état doit prendre en charge ce problème de façon structurelle et sérieuse. Ces problèmes que connaissent notre capitale ont été réglées ailleurs avec une relative facilité du moment où la volonté politique est réelle.

Le misérabilisme qu’on aime afficher sur ces enfants de la rue accompagné de l’acquis de conscience que se donnent certains à leur offrir ndogou et ndékki (peti’dej , repas, lait …) ne sont pas la solution pour éradiquer ce fléau. Mais chez nous on aime ne pas régler nos problèmes, on les traine et adorons nous lamenter devantl’oeil impuissant du pouvoir politique.

Tout ceci est révoltant ! Le ministère de la femme de la famille et de l’enfance et celui de l’éducation sont interpellés sur le sujet. L’épineux probléme des enfants de la rue ménent souvent à des amalgames dangereux contre les daaras qui ont besoin de l’appui de l’Etat et de notre estime.

 

Mohamed Ly

Un Ceerno Mollé dans temps modernes.

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