« La réforme morale est un effort pour sortir du sommeil » Henry David Thoreau
El Hadj et moi avons sympathisé sur la fameuse place de l’indépendance de Dakar en attendant le passage d’un taxi. Au bout de trente longues minutes de patience, nous nous engouffrons, enfin, tous les deux dans un taxi en direction de Rufisque et à qui il restait exactement deux places. El Hadj se met devant à côté du chauffeur. Je complète moi le siège de derrière.
Au cours de notre discussion El Hadj m’explique, qu’il est diplômé de la section « Impôts et domaines » de l’Ecole nationale de l’administration (ENA). Après un cours passage à la Direction générale des impôts et des domaines du Ministère de l’économie et des finances, il a créé et dirige un cabinet d’audit et de conseils. En dehors de quelques voyages de mission en France, aux USA ou dans d’autres pays de l’Asie, toute sa formation et sa carrière professionnelle se sont faites, pour le moment au Sénégal.
En montant dans le taxi, l’ami El Hadj n’avait pas fini de manger une orange. Après les salutations d’usage à l’endroit de nos co-voyageurs, nous poursuivons notre discussion sur un tout autre sujet mêlant français et wolof. El Hadj arrive à bout de l’orange après quelques kilomètres dans le véhicule. Mais se refusant de jeter la peau du fruit sur la route, El Hadj arrive, d’une main, à se procurer une feuille de papier d’une chemise cartonnée posée sur ses genoux. Avec ce papier, il enveloppe le reste du fruit et met le tout dans la poche gauche de son caftan.
Toute cette manie d’El Hadj se passe sous nos yeux et ceux du chauffeur qui le regardait du coin de l’œil. Surpris de ce geste, le conducteur lance à El Hadj en wolof, le sourire aux lèvres : Yow de wuute nga ak senegale yi ! (tu es vraiment différent des Sénégalais). L’un des autres voyageurs, convaincu qu’El Hadj vit en occident, réplique avec insistance : Non, ki dëkul fi ! Tugël ngë jogge xanaa ? (non, il ne peut vivre au Sénégal ; tu vis en France, n’est-ce pas ?).
Stupéfait, je ne puis m’empêcher de laisser entendre un bref rire. El Hadj n’arrive pas non plus à cacher son sourire gêné face à ces réactions sous-entendant que le Sénégalais résidant serait incapable d’un tel geste responsable et civique. El Hadj s’offusque – à raison d’ailleurs – et finit par raconter son parcours. La gêne change tout de suite de camp.
Ce fut alors le silence total qui s’en suivi jusqu’à ce que je descende du taxi ; prenant le soin d’échanger mes contacts avec El Hadj pour le revoir prochainement.
MD
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