Lors de son adresse à la nation du 31 décembre 2015, Monsieur le Président de la République en rappelant la démarche recommandée à la Commission nationale de réforme des institutions (CNRI), avait annoncé : « Il en résulte que, sur le fondement de nos acquis, l’assise démocratique de notre système politique est solide et qu’en définitive, nous pouvons apporter à notre Constitution les changements consensuels appropriés sans provoquer de rupture normative dans la nature même de notre régime politique ».Il apparaît dans ces propos une certaine équivoque qui fait croire que le Chef de l’Etat va consulter la classe politique sur la réforme des institutions. Mais comment pourrait-on envisager l’ouverture de concertations autour de la révision constitutionnelle alors que le projet de texte y relatif a déjà été soumis au Président de l’Assemblée nationale et au Président du Conseil constitutionnel dans le cadre de la procédure édictée par l’article 51 de la loi fondamentale ?
Il ne reste plus au Président qu’à soumettre son projet de loi constitutionnelle, éventuellement modifié, au peuple souverain en fixant, au préalable, les modalités de préparation et d’organisation de la consultation par décret de convocation du référendum.
Ainsi, il reviendra
• aux états-majors politiques de battre campagne,
• aux organisations de la société civile de vulgariser le texte,
• aux médias d’organiser et d’animer des débats avec les leaders politiques et les OSC,
• aux électeurs de se prononcer à travers les urnes ou de s’abstenir,
• au Conseil constitutionnel de proclamer les résultats.
Si la date du 29 mai annoncée par la presse se confirme pour la tenue du scrutin référendaire, la loi constitutionnelle adoptée par le peuple ne sera promulguée qu’à la mi-juin 2016. A partir de ce moment, la revue du code électoral, telle qu’annoncée dans le titre premier du projet « …Ces dispositions seront prolongées par l’adoption d’une nouvelle loi sur les partis politiques et de modifications subséquentes du code électoral… », devrait être initiée durant le mois de juillet et bouclée par l’adoption de ces modifications avant fin août 2016 en vertu des dispositions du Protocole Additionnel de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance, en son article 2, alinéa 1 : « Aucune réforme substantielle de la loi électorale ne doit intervenir dans les six (6) mois précédant les élections, sans le consentement d’une large majorité des acteurs politiques. »
Le calendrier suggéré par le Ministère de l’Intérieur, chargé d’initié tout projet de décret en matière électorale et référendaire, est certainement dicté par les impératifs de la révision des listes électorales à l’intérieur du territoire et à l’étranger pour l’enrôlement des nationaux Sénégalais établis ou résidants à l’extérieur.
Une fois ce délai respecté, n’empêche qu’on sera à quatre (04) mois de la date fixée pour le début des déclarations de candidatures puisque la réforme ne concerne nullement l’Article 29 de la constitution qui énonce : « Les candidatures sont déposées au greffe du Conseil constitutionnel, trente jours francs au moins et soixante jours francs au plus avant le premier tour du scrutin ».
Evidemment, il faudra envisager ces procédures dans le cas de la réduction du mandat. Pour l’heure, de nombre d’événements se déroulent avant l’avis du Conseil constitutionnel, qui tiennent encore les esprits en suspens et nous rapprochent de 2019. Il s’agit de :
• la publication d’une mouture intégrale du projet de révision constitutionnelle,
• l’inscription de la rétroactivité de la réduction du mandat du Président de la République dans le dispositif et non en tant que disposition transitoire,
• la subite adhésion du Secrétariat Exécutif National de l’APR en faveur de la réforme,
• la déclaration de Monsieur Ousmane Tanor Dieng du PS à propos de l’exigence républicaine pour le Président de tenir compte de l’avis du Conseil Constitutionnel.
Toutefois, j’ose espérer que le Président de la République détachera la question de la réduction du mandat en cours comme il l’avait indiqué le 17 mars 2015 lors d’une rencontre à Dakar avec l’Association de la presse étrangère au Sénégal (APES) : « une révision de la Constitution, d’abord sur le mandat et ensuite sur quelques autres aspects pour consolider notre démocratie ».
Dans ce cas, et surtout avec le verrouillage constitutionnel des dispositions encadrant le mandat présidentiel préconisé après d’incessants allers et retours (5 ans et 7 ans) depuis les indépendances, le Peuple souverain devrait avoir la possibilité de choisir entre plusieurs options :
• Un mandat de sept (7) ans renouvelable une seule fois,
• Un mandat à cinq (5) ans renouvelable une seule fois,
• Un mandat de quatre (4) ans renouvelable,
• Un mandat unique de huit (8) ans.
Quant au fond, je rappelle que ma position est exposée dans ma 7e contribution sur la réforme des institutions sous la forme d’un discours intitulé « La consultation du Peuple: les précisions du Président de la République ».
En tout état de cause, l’opinion sera édifiée d’ici le 31 janvier 2016 car le décret de convocation du référendum devra normalement être pris avant le démarrage de la révision ordinaire des listes électorales prévu du 1er février au 31 juillet de chaque année selon l’article R.32 du code électoral. Par conséquent, ce décret précisera entre autres la période de la révision exceptionnelle en vue du prochain référendum.
Sénégal, le 26 janvier 2016
Ndiaga SYLLA, Analyste électoral
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