Cette polémique stérile sur la double nationalité qui ne cesse d’alimenter la vie politique sénégalaise est un faux débat puisque improductive face aux enjeux majeurs et questions essentielles de notre Sénégal.
A mon humble avis, je pense que la sénégalité est un concept dangereux, haineux et stigmatisant, et, que surtout, il faudra éloigner le plus loin possible des discours politico-politiciens et des stratégies irréfléchies de reconquête électorale et de maintien illégal du pouvoir.
A titre personnel, je ne pense aucunement que posséder une autre nationalité outre sénégalaise est un facteur bloquant ou un handicap majeur pour la gestion sérieuse de notre Etat, de ses structures et d’un quelconque démembrement de notre république.
Par contre, je suis tout à fait d’accord, et, une fois de plus cela m’engage personnellement, intellectuellement et politiquement, qu’un Homme politique sénégalais doit être administrativement entièrement de citoyenneté sénégalaise ne serait-ce que pour le principe et le symbole. C’est l’unique gage crédible qu’il peut garantir aux électeurs. Et d’ailleurs, il est recommandé à tout Homme politique qui aimerait briguer un mandat, de posséder exclusivement une seule nationalité pour plus de crédibilité. Certains pays comme l’Australie, la Bulgarie, la Dominique, la Jamaïque, le Kirghizistan et Taïwan interdisent formellement à leurs mandataires politiques de détenir une autre nationalité. D’autres pays à l’instar du Commonwealth par contre tolèrent à leurs mandants politiques de détenir une autre nationalité si la citoyenneté en cause n’est pas un obstacle ou ne constitue pas un conflit d’intérêt sur l’exercice sérieux d’un mandat politique.
Si des pays ont légiféré sur cette question, le Sénégal est resté flou puisque le sujet est sensible, tabou et privé. Notre pays dans sa large ouverture d’esprit a toujours considéré que la double nationalité pouvait non seulement faciliter le passage de ses citoyens aux frontières mais aussi leur faire obtenir facilement des visas ainsi que les protéger consulairement par un autre pays. Le Sénégal a toujours considéré que la double nationalité était d’une part une richesse culturelle pour la diversité et d’autre part une opportunité pour les affaires mais aussi une astuce légale pour simplifier voire accélérer les procédures et formalités à travers le monde.
Maintenant, là où les apristes font hors sujet en passant à côté de la plaque, c’est lorsqu’ils impliquent tout le monde dans le même lot avec un mélange de genre inexplicable: Hommes politiques, Hommes d’affaires, Immigrés, sénégalais nés de l’extérieur, métis etc… Cet acharnement intempestif, violent n’est rien d’autre que de l’ingratitude, de la méchanceté gratuite… Et, en voulant politiser scandaleusement cette question le camp présidentiel a été ignoble. Notre majorité présidentielle a un intérêt majeur de présenter ses excuses aux sénégalaises et sénégalais binationaux, de varier sa position bancale en retirant ses arguments blasphématoires et xénophobes, de se rectifier et de recadrer les choses.
Une fois de plus, le sujet sur la double nationalité de nos dirigeants est un faux débat alimenté par les énergumènes de l’APR qui ne maitrisent ni le droit privé, ni le code de la nationalité sénégalaise et ni les conventions internationales ratifiées par le Sénégal. Et encore une fois de plus, cette question est improductive et n’apporte rien de significatif au vécu quotidien des populations sénégalaises qui ont d’autres préoccupations telles que les délestages à ne plus en finir en eau et en électricité, le chômage endémique des jeunes, la cherté vertigineuse des denrées alimentaires, les crises chroniques des secteurs clefs comme l’éducation, la santé et l’agriculture sans oublier les menaces terroristes sur notre sécurité intérieure comme extérieure, idem pour l’extinction de notre lustre diplomatique avili par des ivrognes et drogués etc… Cette question de la multinationalité est une diversion qui ne devrait pas être un commerce politique mais devrait plutôt se parer en une des questions d’enjeux majeurs où les hommes politiques de notre pays devraient dégager un consensus fort et large.
Avec plus de recul, il m’est aujourd’hui loisible de déclarer urbi orbi que cette sénégalité telle que posée par le concept de la double nationalité est injuste, opportuniste dangereuse et anticonstitutionnelle.
Elle est injuste puisqu’en naissant l’Homme ne choisit pas sa nationalité. Au contraire, c’est la volonté divine qui lui impose ses parents, son lieu de naissance et sa nationalité. C’est le cas où la nationalité provoque l’homme. Et, il existe deux cas d’origines naturelles de posséder une nationalité : le droit de sang et droit de sol. Par contre il existe aussi deux cas ou formes où l’homme provoque sa nationalité : c’est l’acquisition par la naturalisation et la réintégration.
Les exemples à titre illustratifs sont à foison.
Karim Meissa Wade, né en 1968 à Paris (France) de père sénégalais est sénégalais puisque bénéficiant du droit de sang. Il est né sur le territoire français, il est français puisqu’il bénéficie du droit de sol.
Amadou Sall, né en 1996 à Houston (Etats Unis) est sénégalais puisque bénéficiant du droit de sang. Il est aussi Etatsunien puisque né sur le territoire américain et bénéficiant du droit de sol.
Idem, pour mes enfants nés en France ainsi que la plus part des enfants d’immigrés, nés à l’étranger qui bénéficient du droit de sol et ou du droit de sang.
Jusqu’à l’extinction du soleil, on ne pourra pas les reprocher d’être nés à l’étranger et de père sénégalais.
Cette question de la nationalité est opportuniste puisqu’elle ne se pose pas lorsqu’il s’agit de défendre les couleurs du Sénégal ou de participer à l’émergence économique ou industrielle du pays. Quelles étaient les nationalités de Khalidou Fadiga, Elhadji Diouf, Ferdinand Coly, Habib Béye, Lamine Diatta etc. …au moment où ils défendaient l’équipe nationale du Sénégal ? Idem pour les Sénégalais de l’extérieur lorsqu’ils contribuaient à la hauteur de deux mille(2000) milliards de Francs CFA en participant activement au développement du Sénégal ? Idem lorsque plus de un (1) million de sénégalais de l’extérieur votaient et faisaient voter pour le candidat Macky Sall ? En aucun cas cette question de double nationalité ne s’est posé.
Le concept de la sénégalité soulevée par la classe dirigeante de l’APR est dangereux puisque conflictuel et attribuant régulièrement à X ou Y des nationalités diverses, inventées et mensongères. La sénégalité ne divise plus qu’elle ne rassemble. Elle stigmatise clairement des compatriotes dignes, illustres ayant beaucoup contribué au développement du Sénégal. Qu’ont fait des Grands Hommes comme Léopold Sédar SENGHOR, Abdou DIOUF, Abdoulaye WADE, Cheikh Anta DIOP, Kéba MBAYE, Amadou Mahtar MBOW, Habib THIAM pour être si invectivés? A ma connaissance, le Président Macky SALL doit recadrer ses laudateurs en mettant un terme à cette prolifération dense d’injures que rien ne justifierait surtout qu’il n’appartient pas aux hommes politiques ou à l’APR de distinguer la sénégalité de qui que ce soit ou de spécifier qui était sénégalais ou qui ne l’était pas, au contraire cette prérogative relève exclusivement de la compétence du code de la nationalité sénégalaise qui a déjà tranché.
En sus, cette question de la double nationalité telle que malencontreusement exploitée par les Apéristes, est anticonstitutionnelle puisque tout simplement la double nationalité n’est pas interdite par le code de nationalité sénégalaise. Non seulement tous ces marmots Apéristes qui s’agitent ne comprennent pas le français du droit et véhiculent un argument flou, sectarisme et contradictoire et qui se retourne petit à petit contre eux puisque ramenant sur la table la supposée nationalité du Président Macky Sall et de sa femme. Et, une fois de plus le code de la nationalité sénégalaise n’interdit pas la double nationalité mais la tolère comme d’autre pays comme la France, les Etats Unis, le Royaume Uni etc… Même l’Allemagne tant décriée contrairement à ce qui se dit sur les places publiques, a une tolérance conditionnelle puisqu’elle a signé des conventions avec des pays européens et américains. Pour en revenir à notre sujet, lorsque l’article 28 de notre constitution dit « exclusivement sénégalais » ce français basique voudrait dire privilégier et avantager le Sénégal par rapport à une autre nationalité. Sinon notre pays serait en contradiction avec son code de la nationalité et de toutes les conventions internationales que nous avons ratifiées telles que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, la déclaration Universelle des Droits de l’Homme ainsi que la charte africaine des droits de l’Homme.
En somme, le débat sur la nationalité est malsain, immoral, dangereux, conflictuel et contreproductif. Cette polémique stérile n’apportera que des ennuis à notre stabilité politique et n’offrira rien de significatif aux problèmes auxquels sont confrontés les sénégalaises et les sénégalais. Et surtout que c’est un débat gênant que les politiciens sénégalais sont mal placés d’animer encore moins d’en faire fonds de commerce.
Enfin, la nationalité d’un individu découle du privé. Et il est clairement immoral de s’immiscer illégalement dans la sphère privée des gens. Seules les administrations ou juridictions peuvent se permettre et d’une façon légale de procéder une quelconque requête.
Cheikh Sidiya DIOP
Secrétaire général de la Ligue des Masses
dcheikhsidiya@gmail.com