La régulation du paysage audiovisuel sénégalais aussi bien public que privé et, également, de la presse écrite et de la presse en ligne (en période électorale) relève de la compétence du Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel. Le CNRA assure la régulation de toutes les élections nationales et locales organisées au Sénégal depuis sa création en 2007.
Dans sa mission de régulation du secteur de l’audiovisuel ainsi que de la presse écrite et celle en ligne, le CNRA envoie, parfois, des mises en demeure à des organes de presse, où il dénonce de manière systématique certaines dérives des média en période électorale. Ce pouvoir de régulation en période électorale lui est attribué par le Code électoral en son article 125 qui dispose « L’organe en charge de la régulation des médias assure l’égalité entre les candidats dans l’utilisation du temps d’antenne ; il intervient, le cas échéant, auprès des autorités compétentes pour que soient prises toutes mesures susceptibles d’assurer cette égalité nonobstant les sanctions prévues par Les textes régissant l’organe de régulation ».
Cependant, le processus électoral du référendum du 20 mars 2016, à l’image des précédents, laisse constater une violation flagrante et permanente du Code électoral par des média et l’inefficacité des décisions du CNRA suite aux infractions incriminées, très souvent, reproduites par les média mis en demeure. Depuis le début du processus électoral référendaire, il ne serait pas exagéré de soutenir que la RTS, fidèle à sa logique, porte les couleurs de l’APR. A des degrés divers, presque tous les autres organes de presse s’adonnent à la propagande violant ainsi la loi électorale. Dans les télévisions, cette violation s’est traduite par la diffusion de meetings ou de publi-reportage; dans les radios, il s’agit d’annoncer des événements de campagne des candidats; et, enfin, dans la presse en ligne elle se traduit par des bannières dans la page d’accueil.
Youssou Ndour, propriétaire de la TFM, excelle dans sa continuité à violer la loi électorale. Déjà entre les deux tours de la présidentielle de 2012, il a profité d’un temps d’antenne à la TFM pour appeler les Sénégalais à voter en faveur de Macky Sall. Cette émission où il n’y avait pas de représentant de la coalition FAL 2012 a amené le CNRA a adressé une mise en demeure le 10 mars à la TFM en vue d’offrir un temps de réponse similaire à la coalition FAL 2012. Non seulement, cette injonction n’a pas été respectée, pire la TFM a rediffusé l’émission incriminée le 18 mars 2012. Pour ce référendum, Youssou Ndour persiste en s’octroyant des temps d’antenne pour appeler à voter OUI et un concert, qui sera diffusé en direct sur la TFM, est même prévu le 18 mars. Malick Thiandoum de la SEN TV profite du combat de lutte Boy Niang II-Garga Mbossé pour faire la propagande en faveur du président Macky Sall. Pourtant, toutes ces pratiques violent l’article LO.63 du Code électoral qui dispose « Pendant la campagne électorale, sont interdites : 1) l’utilisation à des fins de propagande électorale de tout procédé de publicité commerciale par la voie de la presse, de la radio diffusion et de la télévision ; 2) l’utilisation des biens ou moyens publics aux fins de cette campagne sous peine de sanctions pénales prévues par le présent Code (…)».
L’analyse de la persistance de la violation flagrante de la loi électorale révèle les limites objectives de l’organisme de régulation des média (CNRA) de mener à bien sa mission conformément aux articles L.125 et L.131 du Code électoral. Ainsi, les questions qui s’imposent, au regard du verdict des faits, est de savoir :
Pourquoi le CNRA n’arrive-t-il pas, malgré tous les moyens en sa disposition, à faire respecter la loi électorale par les média en dépit de ses multiples mises en demeure ?
Ne faudrait-il pas supprimer certaines dispositions du Code électoral en vue de légaliser les publi_reportages comme aux Etats-Unis ?
En attendant que le CNRA fasse respecter notre loi électorale, sinon sa raison d’être serait très discutable.
Adama SADIO ADO
adosadio@yahoo.fr