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Sénégal : Le Dialogue Ou La Mort à Petit Feu

Sénégal : Le Dialogue Ou La Mort à Petit Feu

Le dialogue avec les forces vives de la nation, initié par le Président de la République, a fini de nous réconcilier avec nos bonnes mœurs politiques.

En effet, nos aînés nous avaient habitués à une gestion intelligente des contradictions politiques et sociales avec des périodes d’accalmie qui permettaient de renouer le fil du dialogue, souvent très tendue.

Cette nouvelle posture du Président était attendue par les démocrates de ce pays qui ne considèrent pas l’opposition et les forces sociales comme une bande de pestiférés qu’il faut embastiller et nous renvoie l’image naturel du Président Macky Sall que nous avons connu et adulé. Celui-ci n’a jamais eu la haine tenace et les habits de « Terminator » que veulent lui faire porter ses nouveaux amis sont trop petits pour lui.

Sans faire dans la dérision, Tanor, Niasse ou Dansokho sont des nains politiques à côté de Macky Sall, qui a certainement besoin des voix de leurs électeurs, mais moins de leurs conseils. La pertinence de leur stratégie leur aurait sans nul doute permis d’être Président ou d’arriver deuxième à l’élection ; ils en sont loin. Leur formation politique postcoloniale et leur angle d’attaque des problèmes économiques et sociaux du pays les mettent en marge. L’immense majorité des sénégalais les considèrent comme des boulets repus de faveurs, pour le Président, et certains de ce simple fait compare ce dernier, par un abus de langage peut être, à un otage.

’’En politique, les morts-vivants ont pour principe de survie l’inertie propre aux institutions établies et l’ossification des intérêts matériels’’ disait Frédéric London dans le monde diplomatique, il ne savait pas si bien dire.

Sans aller jusque là, je sais que le président élu s’appelle Macky Sall et il est hors de question qu’on lui indique la direction vers laquelle il doit tourner son regard. Si certains de ses alliés ont des problèmes avec l’opposition et il y’en a, ils ne doivent pas s’abriter derrière le paravent que constitue le Président pour décocher leur flèches empoisonnées au risque de le fragiliser. La noblesse républicaine voudrait qu’ils prennent leurs responsabilités et leur courage à deux mains et qu’ils affrontent leurs ennemis à visage découvert.

Il est facile d’entendre d’ici leurs commentaires exclusivement destinés à ballaster le dialogue :

– C’est un deal sur le dos des sénégalais car le pays n’est pas en crise. Pourquoi attendre une crise pour dialoguer ?

– Le dossier Karim Wade ne sera pas à l’ordre du jour, car c’est un détenu comme les autres. Pourquoi inviter quelqu’un à discuter et lui fixer des sujets tabous ?

– Tous les partis politiques doivent être concernés. Pourquoi inviter les partis nouveaux- nés et les mort-nés ?

– L’opposition accepte de dialoguer pour entrer au gouvernement. Et après ?

Après un pillage de 40 ans de nos ressources nationales, ils nous inventent une nouvelle vertu qui ressemble étrangement à ces mouches des troupeaux. Plus la vache est proche du troupeau, plus on en trouve. Dés qu’elle s ‘en éloigne, les mouches se font rare. Plus on est proche du Président, plus on est vertueux ; plus on s’en éloigne, plus vite la félonie nous rattrape.

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Eh bien ! laissez nous nous rebiffer face à cette façon d’envisager les choses qui ne nous laisse pas de marge de manœuvre pour combattre l’injustice et la duperie dans notre pays de la façon dont nous savons qu’elle doit l’être et qu’elle ne l’est pas encore. La plupart des hommes et des femmes qui sont voués aux gémonies ne sont coupables que d’être militant dans un parti d’opposition pour certains, pour d’autres d’être en désaccord avec les politiques menées dans ce pays et d’avoir le courage de le dire.

Alors que dans une démocratie normale, la nécessité de leur présence ne se discute pas, quant on sait qu’ils forment une sorte de contrepoids pour le pouvoir en place et véhiculent une autre opinion qui permet au citoyen d’avoir plus de discernement au moment de décider.

Dans le but de restaurer la confiance entre tous ces acteurs proches ou pas, le Président doit s’atteler à la mise en place d’une plateforme de convergence d’idées autour de la République en vue de bâtir des consensus sur des questions d’intérêt national, au premier rang desquels figurent les sujets que voici :

– D’abord, il s’agit avant tout de travailler à renouveler le crédit de l’Assemblée Nationale largement entamé par des pratiques puériles et antidémocratiques, en veillant à la qualité des dirigeants, des débats et des sujets qui doivent principalement épouser les contours des préoccupations des populations. L’Assemblée Nationale doit être un creuset de riches débats et de dialogues fructueux entre groupes qui mettent le curseur sur l’intérêt supérieur de la nation et non cette véritable foire aux empoignades, au sein de laquelle, les acteurs n’ont rien à envier à nos comiques de la petite lucarne que sont Sa Ndiogou et Kouthia ;

– Ensuite il s’agit d’éviter les juridictions d’exception notamment la CREI, cette Cour décriée par la société civile et l’ONU, est peut être légale mais loin d’être légitime, et qui, en organisant une traque des biens mal acquis (qui par définition ne sont donc pas acquis), a entrainé le Sénégal dans un véritable traquenard économique qui renforce la stratégie conçue par les européens pour limiter les flux financiers des pays arabes vers les pays africains. Cette cour qui n’existe qu’au Sénégal et qui n’aura en définitive enrichi que ses fonctionnaires doit être réformée, ou mieux encore, purement et simplement supprimée et Karim Wade et autres libérés ;

– De même, l’éducation, ce pilier du devenir de la nation doit faire l’objet d’une attention particulière et d’une prise en charge de qualité. Cela passe par des efforts de la part de l’Etat pour régler les droits acquis des enseignants. En retour, ces derniers doivent éviter cette désagréable habitude qu’ils ont de réclamer des avantages attachés à tous les autres corps de la fonction publique, sans souffrir de leurs sujétions particulières et en gardant, soit dit en passant, leurs propres avantages. L’Etat ne peut transformer l’administration en armée du salut, et les concours sont ouverts à tout le monde. Il est par contre de son devoir de veiller aux conditions de vie des enseignants, notamment en organisant une traque féroce contre les usuriers, pourchassés sous Wade et, qui semble-t-il, sont entrain de reprendre leur sinistre besogne, dont les enseignants sont les principales victimes ;

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– En dernier lieu, Il nous faut nécessairement clarifier et acter nos rapports avec la Gambie. Sur ce versant, nous sommes d’avis qu’il ne nous appartient pas de défaire son Excellence Cheikh, Professeur, El Hadji, Dr Yahya Abdul-Aziz Jemus Junkung Jammeh en lieu et place des gambiens, qui se doivent de prendre eux -même leur destin en main. La Gambie est un Etat souverain, même si elle abrite une forte colonie sénégalaise. Son Président qui en a fait un Etat Islamique, bénéficie du soutien de certains membres de l’OCI et son offre pour organiser le prochain sommet de l’organisation islamique mondiale a été retenue. Une bonne stratégie ne milite donc pas en faveur de la confrontation voulue par des va-t-en guerre de salon, mais d’une diplomatie du soft power en lieu et place des sorties intempestives du régime qui ont fait désordre par leur contradiction et leur virulence. Au moment où le président du groupe parlementaire fusillait Yaya Jammeh ’’ Il est inadmissible que le Sénégal continue à supporter un dictateur de la trempe de Yaya Jammeh. Le Sénégal ne doit plus continuer à avoir un tyran dans son ventre’’, El H Diouf, conseiller du Président, parlait de lui en des termes élogieux “Je soutiens le président Jammeh parce qu’il est un leader qui sait ce qu’il veut et où il va”, allant jusqu’à inviter les jeunes sénégalais à aller chercher du travail en Gambie.

Dans cet exercice, celui qui se sera le plus distingué est sans conteste Madiambal Diagne, journaliste de son état, qui se définit comme un collaborateur du régime et qui n’y est pas allé avec le dos de la cuillère. A l’occasion d’une sortie fracassante dont il est le seul à avoir le secret, il s’est livré à une évaluation macabre du régime gambien, demandé de monter un coup d’Etat contre lui avant de suggérer à l’armée les moyens militaires susceptibles de les mener à la réussite de l’opération. Il a poussé la témérité jusqu’à affirmer qu’un plan similaire à Fodé Kaba 2 existait au sein de l’armée. Cette sortie imprudente dans un domaine qui lui est complètement étranger est inopportune et lui fait franchir la ligne rouge à ne pas dépasser dans sa profession. C’est vrai qu’en voulant tout faire et partout, nos actes ont de fortes chances de souvent se transformer en bévues, qui, dans ce domaine précis, conduisent souvent à des tragédies. C’est vrai qu’à force de hurler avec les loups, on en oublie qu’il est possible de faire tomber les dictatures sans les massacres massifs mutuels que comporte la guerre et qu’on appelle pudiquement ‘’dégâts collatéraux’’, mais encore et surtout, que les mots tuent. Nous ne pouvons avoir déjà oublié la fameuse Radio-Télévision libre des Mille collines, qui a joué un grand rôle dans le génocide rwandais, au cours duquel, entre avril et juin 1994, entre 800 000 et un million de Tutsi et de Hutu ont été sauvagement assassinés ;

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Une des solutions pour normaliser nos rapports avec notre remuant voisin serait par contre de régler le problème né au sud du Sénégal, qu’on appelle abusivement problème casamançais, en transformant la paix armée constatée sur le terrain en paix de satisfaction. Il s’agit de s’arrimer aux efforts notables consentis par le chef de l’Etat, par un système 3R2D (Réconciliation, Réinsertion, Réintégration/ Développement, Désarmement) et d’utiliser les méthodes de négociation de dernière génération qui ont fait leurs preuves dans d’autres pays, pour arriver à cette paix définitive que l’ensemble des protagonistes appellent de tous leurs vœux. Cela aura le mérite de relancer durablement l’économie des régions frontalières avec la Gambie et réduire l’influence de cette dernière sur ces territoires, tout en nous évitant le chantage auquel se livrent notre voisin et ses amis sénégalais.

Enfin aux futurs participants à cette concertation nationale, nous rappelons qu’il ne peut y avoir de dyarchie au sommet de l’Etat. S’il est naturellement admissible que les uns et les autres puissent nourrir des ambitions légitimes pour leur pays, il n’en demeure pas moins qu’ils doivent reconnaître qu’une seule personne a été élue pour présider aux destinées de la nation et c’est à cette personne et elle seule que le peuple demandera de rendre compte. Il suffira, comme je le rappelais déjà en 2007, de susciter et d’élargir la réflexion pour aboutir à des propositions de la base dans le sens down-up, et de permettre ainsi un renforcement de la pertinence des décisions des autorités au plan politique, économique et social.

Les hommes politiques sénégalais étant déjà mal en point (le suicide collectif n’est pas loin), il ne sera pas question d’en rajouter au point de devenir nos propres fossoyeurs et de donner en plus raison à Giorgos Farklas qui disait : ‘’vous avez raison, nos propres hommes politiques nous ont détruits. Et c’est nous qui les avons élus’’.

 

Boucar DIOUF 

buuks@yahoo.fr

Coordonnateur National de la CIAR (Convergence d’idées Autour de la République)

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