La viande consommée par les sénégalais est produite dans des conditions inappropriées, distribuée par des moyens de transports inadaptés et vendue dans des conditions d’hygiène indignes d’un pays indépendant depuis 56 ans. Tous ceux qui fréquentent les abattoirs de Dakar savent que notre pays a beaucoup reculé dans la filière de la viande.
Avec des vétérinaires bien formés, des associations de consommateurs à la pelle, des opérateurs de haut niveau intellectuel, un Etat conscient de sa mission de responsable de la santé publique, il est surprenant que le Sénégal ne soit pas en mesure de garantir aux populations que la viande qu’elles consomment est produite dans des conditions d’hygiène irréprochables et qu’elle est exempte de toute fraude.
Les abattoirs de Dakar montrent à suffisance l’état de sous développé de notre pays et mettent à nu le retard du sous secteur de l’élevage. Les animaux y sont abattus sauvagement sans respect des’ règles élémentaires en la matière. C’est horrible, insalubre et insoutenable.
Aux abattoirs de Dakar, la viande qui est produite devrait être déclarée impropre à la consommation humaine au regard des normes internationales. Le comble de tout cela est la non traçabilité de la viande des abattoirs de Dakar. S’il arrivait une intoxication suite à une consommation du produit, il serait impossible de remonter la chaine jusqu’à l’éleveur. Pour cette raison, la viande sénégalaise n’est pas exportable et est inutilisable dans certains grands hôtels.
Depuis une décennie ou plus, chaque année, on nous parle de construction d’abattoirs modernes pour délocaliser ceux de Dakar. Ce vieux projet pourtant très important pour la filière viande est toujours reporté à l’année suivante.
Dans les capitales régionales, départementale et d’autres grandes agglomérations, la viande qui est consommée est produite dans des conditions pires qu’à Dakar. Si les consommateurs vivant dans ces zones faisaient un tour dans ces lieux d’abattage, certains allaient devenir végétariens. L’état de ces abattoirs est répugnant et montre l’insouciance de certaines autorités locales par rapport à la sécurité sanitaire des aliments.
Il est temps que les autorités publiques se penchent sérieusement sur les abattoirs au Sénégal de façon global. Un conseil présidentiel ou ministériel devrait être organisé pour qu’enfin qu’on s’engage dans la modernisation de ces infrastructures stratégiques. L’émergence doit s’accompagner d’infrastructures modernes c’est à dire conformes aux normes internationales.
Des abattoirs au lieu de commercialisation de la viande, le transport est fait dans des conditions inadaptées : propreté du moyen de transport, rupture de la chaine du froid, habillement du livreur … Ces conditions insalubres exposent la viande à une contamination de toute sorte de nature à provoquer une intoxication du consommateur. Le transport d’une denrée aussi périssable que la viande doit être règlementé avec un dispositif de surveillance sans complaisance et ce n’est pas le cas actuellement.
Le lieu de vente de la viande au Sénégal est également inadapté. Souvent le vendeur ne dispose même pas de système de réfrigération ; la viande est laissée à l’air libre. Pourtant, découpée, cette denrée doit être conservée obligatoire à basse température (+4°C). Le vendeur coupe la viande en utilisant un tronçon de bois comme support et cela devrait être formellement interdit.
Le Sénégal modernise ses infrastructure, ses exploitation agricoles, ses universités, ses bâtiments administratifs,…Il est temps que l’Etat modernise aussi, de façon global, dans le cadre du PSE, la filière viande qui est un secteur moteur de l’élevage, pilier de la sécurité sanitaire des aliments et créateur d’emplois et de richesse.
Depuis quelques temps on ne parle que de viande d’âne vendue frauduleusement aux consommateurs sénégalais. C’est préoccupant. La consommation de viande d’âne ne fait pas partie de nos habitudes alimentaires sénégalaises. L’âne est au Sénégal un animal de traction mais pas de boucherie ou de laitière. Abattre pour vendre sa viande ou la consommer est une violation des règles non écrite de notre société. Les auteurs de telles violations de nos habitudes alimentaires et leurs complices doivent être traqués, attrapés et punis à la hauteur de leurs fautes.
Sur le plan purement scientifique, consommer de la viande d’âne bien portant n’expose pas à une maladie. Toutefois, l’abattage clandestin d’ânes ne garantie pas une viande salubre. Les bouchers fraudeurs, cherchant le gain facile, vont se ravitailler préférentiellement avec la population d’ânes divagants, composés essentiellement d’animaux malades, sans propriétaires. Il est raisonnable de penser que la viande d’ânes commercialisée frauduleusement comme le rapportent les médias est de la viande insalubre, donc impropre à la consommation humaine. La manière dont les ânes divaguant se nourrissent permet aussi de dire encore que la viande d’âne pourrait être porteurs de parasites très dangereux pour l’homme.
L’interdiction de l’abattage d’âne est une excellente décision prise par le Ministre de l’élevage. La commercialisation et la consommation de la viande d’âne doivent également être formellement interdites.
Demba SOW
Professeur de Génie des Procédés Alimentaires
Ecole Supérieure Polytechnique de Dakar
Département Génie Chimique et Biologie Appliquée
Tel: 00221 77 569 71 79 / 00221 77 555 35 80