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Monsieur Le Président, à Quand Le Dialogue Avec Les Journalistes ?

Monsieur Le Président, à Quand Le Dialogue Avec Les Journalistes ?

Le Syndicat national des professionnels de l’information et de la communication du Sénégal (Synpics), par ma voix, vient vous demander à quand une audience avec son Bureau exécutif national ? La voie de presse peut naturellement paraitre choquante et saugrenue, mais c’est parce que nous avons épuisé notre encre à force d’introduire des demandes d’audience sans succès.

Depuis votre accession à la Magistrature suprême, nous sommes certainement l’une des rares organisations syndicales pour ne pas dire la seule, à ne pas avoir le privilège d’être reçue au Palais de la République. Plusieurs fois, nous avons tenté de passer par la voie officielle, tracée par les services de la Présidence, pour respecter les formes, mais à chaque fois, nous constatons avec regret, que la demande est restée sans suite.

Naturellement, tout le monde dans la corporation, se pose la question de savoir pourquoi le Synpics n’est jamais reçu au moment où la cour présidentielle est remplie de journalistes ? Pour beaucoup de confrères, c’est justement parce que vous êtes entouré de beaucoup de journalistes, que vous continuez à snober certaines organisations de la presse nationale, certainement les plus représentatives. C’est peut-être assez compréhensible au regard des jeux d’intérêt entretenus par les uns et les autres, qu’ils soient patrons de presse ou anciens patrons de presse «reconvertis», mais au Synpics, on s’émeut d’un tel état de fait. Pour dire vrai, on est sidéré de voir que les couloirs du Palais de la République sont autorisés à tout le monde, sauf au seul syndicat qui regroupe les professionnels de l’information et de la communication de ce pays.

Monsieur le Président, le Synpics que certains s’évertuent à vouloir tuer, ne mourra jamais ! C’est lié à son histoire et aux Hommes qui ont jusque-là, présidé à ses destinées. Ce Syndicat a survécu dans les moments les plus improbables, grâce notamment à la combativité de Mame Less Camara, à la détermination de feu Alpha Sall et à la pugnacité débordante d’une dame de fer du nom de Diatou Cissé, qui a toujours su se faire respecter et faire respecter la corporation et ses membres. Ce syndicat va vivre aussi longtemps que le Sénégal va exister, malgré les coups bas des patrons de presse, les complots des régimes en place et les dénigrements de certains parmi nous, qui n’ont jamais eu une carte du syndicat et qui se permettent de juger sans raison nos actions, sans se remettre en question.

Le dernier coup porté à notre syndicat à l’occasion de la journée du dialogue national au Palais de la République en dit long sur le mépris de certains de vos collaborateurs à notre endroit. Ce jour-là, notre Secrétaire général national, Ibrahima Khaliloulah Ndiaye, a été royalement ignoré dans la distribution de la parole, alors qu’il voulait profiter de cette belle occasion, pour attirer votre attention sur les dérives et tares qui gangrènent le secteur des médias au Sénégal. Personne n’est plus légitime que lui dans ce pays, pour le faire. Personne !!!

Monsieur le Président, le Synpics ne peut être aimé par certains de vos proches, qui ont eu à fréquenter des Rédactions et qui, du jour au lendemain, se sont retrouvés patrons de presse et maintenant membres du «cercle présidentiel». On n’envie personne ! Au contraire d’ailleurs…Mais on est en droit de se demander au nom de quoi, ils vous empêchent de nous recevoir en audience ? On vous pose la question, parce que l’un d’eux a eu une fois, le toupet de nous regarder dans les yeux et de nous demander de passer par lui, pour accéder au Palais de la République. Certains en riront sans doute. Mais cela ne nous amuse pas du tout ! Depuis quand un patron de presse, qui qu’il puisse être d’ailleurs, contrôle votre agenda au point de nous proposer son entregent ?

Si vous vous rappelez bien, le 1er mai 2015, vous nous aviez rassurés en ces termes, au moment de recevoir notre cahier de doléances, au même titre que les autres centrales syndicales : «Mes amis du Synpics (sic), je vous entends dire que je refuse de vous recevoir, mais je ne refuse pas. Est-ce que vous en avez fait la demande ?» Devant l’affirmative, vous nous dites ceci : «On est le 1er  mai aujourd’hui, mais je vous recevrai avant la fin du mois, je verrai ça avec mes services !» C’était l’année dernière. Depuis, on attend toujours….

Entre temps, que de monde reçu au Palais. Des artistes-chanteurs, des danseurs et même des lutteurs, sont reçus au Palais de la République. On n’a rien contre eux. Absolument rien ! Parce qu’ils sont des Sénégalais comme nous autres. Mais, ce qui est quand même apparent, c’est que vous semblez accorder plus d’importance à ces gens qu’aux journalistes, qui ont quand même joué un rôle dans la consolidation de notre Démocratie. Qu’on le veuille ou pas ! Nous ne nous prévalons pas d’incarner un quelconque quatrième pouvoir, mais nous savons que nous sommes tout aussi importants dans ce pays, que les autres secteurs d’activités.

Voir le ballet des mêmes personnes et associations au Palais depuis votre élection à la tête du Sénégal, ne fait que nous conforter dans nos convictions : on vous empêche de nous rencontrer ! Pourtant, nous ne viendrons pas au Palais, pour vous soumettre des doléances, que vous ne pourrez pas résoudre en tant que Président de la République de ce pays. Soyez-en sûr.

Pour rappel, depuis six ans, nous courrons derrière le vote du projet de Code de la presse au Sénégal. Depuis cinq ans, nous plaidons pour l’adoption du projet de nouvelle Convention collective des journalistes et techniciens des médias. Depuis toujours, nous nous insurgeons contre les licenciements abusifs dans les Rédactions, nous nous battons contre les précaires conditions de travail des journalistes et techniciens des médias ou encore, contre l’absence de protection sociale. Bref, nous voulons un secteur normal, encadré par des textes législatifs et contrôlé par des services compétents et sans complaisance de l’Etat, pour que n’importe qui ne vienne y investir, étendre son influence, s’enrichir et sacrifier ses employés, une fois que son dessein est assouvi.

Monsieur le Président, une audience avec vous, ce n’est pas trop vous demander. Nous voulons simplement, que vous nous aidiez à protéger les journalistes et techniciens des médias contre cette nouvelle race de prédateurs qui ne se soucient guère de l’avenir de cette corporation. Avoir le statut de «patrons de presse» leur donne tout simplement une certaine reconnaissance, mais ils n’ont pas cette légitimité de «représenter» la presse à la salle des banquets du Palais de la République. Le fait de leur distribuer plus de 700 millions de francs Cfa par an sous forme «d’aide», sans aucun audit de la Cour des comptes, ou de leur offrir une amnistie fiscale, ne doit pas vous amener à croire que les problèmes des journalistes et techniciens de ce pays sont résolus. Oh que non ! Si seulement cette amnistie était assujettie à une cotisation régulière des entreprises de presse pour leurs employés, dans les institutions sociales (Ipres et Caisse de sécurité sociale), mais hélas…

Il nous faut au Sénégal, une bonne politique de développement des médias, comme proposée dans le projet de Code de la presse. Celui-ci doit certes être revu et renforcé, à l’image des autres codes en vogue en ce moment, avant d’être adopté. Ce qui devrait permettre un tant soit peu, d’assainir la profession, de contrôler les deniers publics ou encore de s’assurer la pérennité des entreprises de presse et la protection, à tous les niveaux, de leurs travailleurs.

Mais au plus fort des débats sur la dépénalisation des délits de presse au Sénégal, des députés nous ont plusieurs fois saisis, pour nous «ouvrir les yeux» sur le «double jeu» de certains journalistes, qui vous seraient très proches. Mais, nous pensons et nous en sommes convaincus, que votre seule volonté en tant que chef de l’Etat, investi des pouvoirs publics, suffit pour mettre de l’ordre dans cette corporation.

 

Aly FALL

Journaliste  – Secrétaire général national adjoint du Synpics et porte-parole

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