«Que celui d’entre vous qui voit une chose répréhensible la corrige de sa main! S’il ne le peut pas de sa main, qu’il la corrige avec sa langue! S’il ne le peut avec sa langue, que ce soit avec son cœur et c’est là le degré le plus faible de la foi. »
M. Le Procureur de la République, ce Hadith du Prophète (Psl), rapporté par l’Imam Mouslim, guide et explique ma démarche, surtout en ce mois béni de Ramadan. Qu’Allah exhausse nos prières et nous mette sur le droit chemin !
M. Le Procureur, j’aurais pu me taire, comme ces Sénégalais, en se disant que parler et dénoncer n’y feront rien. Le silence est donc une posture facile, certes, personne ne saura ce que vous pensez réellement, mais elle est lâche. Et surtout contraire aux enseignements du Prophète (Psl).
M. Le Procureur, cette société semble s’inscrire résolument dans une passivité telle, que combattre l’injustice, se dresser contre l’inacceptable et le répréhensible, lutter pour la restauration des valeurs de la République, devient iconoclaste. C’est le paradoxe sénégalais dont le nom de code est le «masla», cette hypocrisie qui enrobe la vérité, qui fâche de ses formules mielleuses, préférant rester superficiel par profondeur.
Pas au sens nietzschéen (qui en fait la marque des esprits libres qui prennent le réel pour ce qu’il est), M. Le Procureur, puisqu’ici, les apparences sont grosses de tous ces non-dits enveloppés dans les vocables de «yermendé» (pitié) et de «diam» (paix des cœurs). Permettez-moi alors d’aller droit au but en déclinant l’objet de cette missive : les accusations gravissimes de Samuel Sarr contre Idrissa Seck, nous interpellent. Dans une interview accordée au quotidien Libération, il dit du président du parti Rewmi : «Il a volé 74 milliards de FCfa dans un compte qu’il a manipulé avant de le clôturer. Je pèse bien mes mots : il a volé 74 milliards de FCfa avant de fermer le compte bancaire. Il sait très bien que je sais et il sait pourquoi il a été viré de son poste de Premier ministre». Cet homme – qui n’est pas à son coup d’essai – semble être dans le secret des dieux.
D’ailleurs, les silences de sa déclaration qui sont matérialisées par l’expression (Il sait très bien que je sais…) en disent long. De deux choses l’une, soit il dit la vérité, soit il est de mauvaise foi. Mais ce qui est constant, c’est qu’au cœur de cette accusation grave, il s’agirait du bien public. Cet argent (74 milliards de F Cfa), appartiendrait au contribuable. M. Le Procureur, pourquoi alors vous ne vous autosaisissez pas pour entendre Samuel Sarr dans le but de lui tirer les vers du nez? Et surtout pour que les Sénégalais en soient édifiés.
La personnalité mise en cause, en l’occurrence Idrissa Seck, doit aussi être entendue pour livrer sa part de vérité. D’ailleurs, ce qui est étonnant, c’est le silence de l’ex-maire de Thiès. Pourquoi, s’il est convaincu de son innocence, il ne porte pas plainte pour diffamation contre Samuel Sarr? Quid de l’accusateur dont le nom est sur les tablettes de la CREI? En plus, il n’est pas à sa première accusation.
Dans une de ses contributions, Samuel Sarr a accusé le président Macky Sall et l’avocat William Bourdon d’enrichissement illicite : «William Bourdon se tait lorsqu’il est grassement payé par ceux-là même, comme Macky Sall, qui crient au voleur alors que leurs comptes bancaires sont pleins d’argent mal acquis», écrivait-il. Et cela lui avait valu une garde à vue. Pourquoi les représentants des organisations de la société civile ne disent rien ? M. Le Procureur, le devoir vous appelle. Au nom de l’intérêt général, Samuel Sarr et Idrissa Seck doivent être entendus. Et je ne doute pas de votre engagement pour un Sénégal plus juste et prospère.
Bacary Domingo MANE