Dimanche 3 juillet 2016, l’émission « le débat africain » d’Alain Foka sur RFI traitait du thème « Comment le Sénégal fait-il face à la menace djihadiste? ». L’un des invités M. Ahmed Khalifa Niasse, pourtant (re)connu pour ses turpitudes, s’est distingué en franchissant un cap dans l’ignominie.
Il a affirmé qu’une mosquée sise Malick SY, « à côté de la Cité Police » serait une « mosquée wahhabite ou salafiste qui prépare des terroristes». Il a poursuivi en disant que « le président (de la République) cautionne en y priant ». Étant connu de longue date que M. NIASSE refuse de compter parmi l’Islam sénégalais celui se réclamant non confrérique alors qu’il existe depuis des temps immémoriaux. Il est donc exclu qu’il cible la Mosquée omarienne ou la Grande mosquée de Dakar, toutes deux sont aussi sur l’avenue Malick SY. Le rappel, par Monsieur Niasse, de la participation (…) du président de la République à une prière hebdomadaire l’an dernier ne laisse pas de doute. Il désigne, sans la citer, la Mosquée du Centre Islamique pour l’Appel au Coran et à la Sounnah (CIPACS) également appelée Mosquée Soninké.
(Les) effets de tels propos, dans un média international comme la RFI, restent incalculables .Nous les ressentons chaque jour. Ils jettent l’opprobre et la suspicion sur notre honorable institution, sur ses milliers de fidèles et sur la communauté soninké en particulier. Devant l’effroyable accusation et l’émoi suscité, le Centre a décidé d’apporter une triple réponse : d’abord judiciaire, ensuite historique et enfin religieuse.
- LA REPONSE JUDICIAIRE : CALOMNIE & INCITATION A LA HAINE
(Le) mardi 5 juillet, nous avons saisi notre avocat afin de porter plainte contre Monsieur Niasse pour calomnie, diffamation, incitation à la haine et mise en danger de la vie d’autrui. En effet, si le pire venait à se produire au Sénégal, qu’Allah (SWT) nous en garde, notre mosquée et ses fidèles désignés par un irresponsable pourraient devenir de parfaits bouc-émissaires pour d’autres déséquilibrés. Un huissier a constaté les propos tenus sur RFI, une « sommation interpellative » doit parvenir incessamment à Monsieur Niasse. L’affaire suit son court.
Par ailleurs, le Centre Islamique interpelle le Ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique, Monsieur Abdoulaye Daouda Diallo et le Garde des Sceaux, ministre de la Justice, Maître Sidiki Kaba, sur les allégations tenues qui, selon nous, incitent à des troubles à l’ordre publique.
Le Centre va aussi saisir le Procureur de la République afin que Monsieur Niasse soit entendu et qu’il fournisse, sans délai, les preuves de ses graves et dangereuses élucubrations ou alors qu’il en réponde. Il serait inconcevable dans un Etat de droit comme le Sénégal que ses propos restent sans suite.
- LA REPONSE HISTORIQUE:LES SONINKE DU 8EME SIECLE A NOS JOURS
Notre réponse historique est utile une fois de plus pour ceux qui ne nous connaissent pas et qui sont de bonne foi. Voilà pourquoi nous rendons publique, ci-après, les principales lignes de notre courrier, daté du 7 juillet 2015, afin que désormais nul n’en ignore. Il exprime notre infini gratitude à Son Excellence Macky SALL suite à sa venue à la Mosquée. Il rappelle surtout qui est la communauté soninké du Sénégal à l’origine du Centre et de la Mosquée dite Soninké.
(Voici, le contenu de la lettre:)
« (…) Vendredi 26 juin dernier (2015), à l’occasion de la grande prière hebdomadaire et durant ce mois béni du Ramadan 2015-1436, vous avez joint le geste à la parole donnée suite à notre invitation. Vous êtes venus communier avec les fidèles musulmans de la Mosquée du Centre Islamique Pour l’Appel au Coran et à la Sounnah (CIPACS), sise Avenue Malick SY à la Médina, communément appelé «Mosquée Soninké ».
Votre geste est désormais gravé, en lettres d’or, dans le livre d’histoire de la communauté soninké.
En 1956 déjà, à la veille de l’indépendance, l’illustre poète – futur Président de la République, Léopold Sédar SENGHOR usait de sa plume pour nous rendre un vibrant hommage. Dans le mémorable poème « Kaya – Magan » Roi de l’Or – il célébrait les vertus de ce 1er empire africain appelé WAGADOU ou GHANA. Il en appelait à une Afrique fière, indépendante et héritière de son glorieux passé.
Votre auguste présence à nos côtés exprime toute la reconnaissance et l’égard que vous avez à notre endroit. Nous y sommes sensibles. Le Coran (49:13) dit d’ailleurs à ce propos : « …Nous avons fait de vous des nations et des tribus, pour que vous vous entre-connaissiez Le plus noble d’entre vous, auprès d’Allah, est le plus pieux. Allah est certes Omniscient et Grand- Connaisseur. »
Vous nous rendez hommage ainsi qu’à ce trait distinctif de la communauté soninké : son rapport quasi-consubstantiel à l’islam. Au 8ème siècle déjà, l’Islam avait pleinement droit de cité dans l’empire du WAGADOU. Au 10ème siècle, c’est sous la dynastie des MANNA qu’il faisait son entrée au « Sénégal », dans le Royaume du TEKROUR.
Excellence,
Notre rapport à l’Islam est donc ancien, savant et ouvert. Le Centre Islamique, entend rester fidèle à ses principes. Il propose, outre la mosquée, des enseignements, des conférences, de la recherche et des partenariats avec d’autres institutions islamiques du Sénégal et des pays frères de la Oumma.
Les ressortissants à Dakar de chacun des villages de l’ensemble des provinces traditionnelles soninké du Gajaaga, Guidimakha, Haire, Fouta, Boundou qui correspondent aux départements de Bakel, Kanel, Matam, Goudiry et Tambacounda notamment réunis autour de leur « Konpe Xoore » ou « Refuge villageois » respectif notamment à Niayes Thioker puis à la Medina depuis 1880, ainsi que les ressortissants de la diaspora, de la France et de l’Afrique Centrale en particulier sont d’honnêtes travailleurs et commerçants, ils assurent depuis 2002 (…) la totalité du financement du centre.
En cela, l’appellation de « Mosquée Soninké » ou « Soninko Konpo Xoore » comme le lieu de convergence, d’identification et de refuge de l’ensemble du « Soninkara » à Dakar c’est-à-dire de tous les Soninkés et de ceux qui vivent en harmonie avec eux depuis des siècles – Peuls, Wolofs, Bambaras, entre autres, est une parfaite réalité. La portée de votre acte n’en est que plus symbolique. Il atteint tous les lieux d’origine et de migration de cette communauté pieuse et pacifique. Il fait vibrer son cœur. Il exalte sa fierté.
Une fierté républicaine car la République reconnait par là son apport cultuel et culturel à un Sénégal pluriel, ouvert et de paix. Elle connaissait déjà l’apport financier substantiel de cette communauté dont la diaspora – solidaire, travailleuse et patriote – participe pleinement par des colossaux transferts de fonds à l’édification de toute la nation et au développement sur ses fonds propres de ses terroirs d’origine en particulier. »
- LA REPONSE RELIGIEUSE : DE L’ABOMINATION DU MENSONGE
Notre réponse à ce propos ne sera pas longue, d’autres occasions plus solennelles serviront à informer les ignorants. Nous nous référons à un Hadith rapporté par Boukhari et Mouslim car nous avons cru comprendre qu’il pose un problème à certains.
D’après Abd ALLAH Ibn Massaoud Radia ALLAH Anhou, le Messager de DIEU (PSL) a dit:
«Certes, le fait de dire la vérité conduit vers « al-birr » (l’obéissance), et « al-birr » conduit au Paradis. L’homme ne cesse de s’enquérir de la vérité jusqu’à ce qu’il soit inscrit auprès de DIEU parmi les véridiques. D’autre part, le mensonge mène au vice, et le vice mène en Enfer. L’individu qui ne cesse de forger les mensonges sera inscrit auprès de DIEU comme menteur.»
Que Dieu nous garde de figurer parmi les menteurs.
CONCLUSION : LE RESPECT RECIPROQUE
La communauté soninké, nous tenons à conclure par là et avec force, est une communauté pieuse, pacifique et de bons voisinage où qu’elle soit dans ses provinces soninké d’origine, à Dakar et en particulier ici à la Médina ou dans les pays où son labeur l’a conduit, en Afrique centrale, aux Amériques ou en Europe. Et c’est du fruit de ce labeur qu’elle a construit les centres de santé, écoles et autres mosquées de ses villages d’origine. C’est du fruit de ce même labeur de ses travailleurs et commerçants qu’elle construit sur ses fonds propres cette Mosquée dite Soninké et qu’elle en assure le fonctionnement sans un Franc CFA de la part d’un Etat étranger, de l’Etat du Sénégal ou de quelques autres organisations islamiques nationales ou internationales.
Elle n’est ni moins sénégalaise ni moins musulmane que quiconque. Elle se garde d’entrer dans les affaires qui ne la concerne pas, parfois même à son propre détriment. Notre désignation Sarakholé par les autres ne doit rien au hasard puisque Sarakholé signifie en Soninké : personne qui ne fonctionne que sur des choses claires.
Nous ne laisserons donc jamais personne, fusse-t-il dérangé mentalement, nous donner des leçons ou jeter en pâture notre dignité ou nous salir en nous faisant passer pour des extrémistes et des terroristes auprès de personnes qui ignorent tout de nous. Voilà la raison de notre réponse. Nous ne demandons rien de plus que le respect que nous accordons à chacun. A défaut nous saurons faire valoir nos droits.
Face à l’abomination d’ôter ne serait-ce qu’une seule vie, a fortiori sur la base d’une divergence d’idées, le Centre Islamique est catégorique : la seule réponse est l’unité, la cohésion et la tolérance. La Oumma islamique sénégalaise dans sa diversité, courants confrériques et non-confrériques, doit donc être uni face à un ennemi commun. Il se nourrit de l’ignorance, de la division et de la stigmatisation.
Enfin, nous félicitons et encourageons nos autorités locales (Le Maire de la Médina, le préfet et le gouverneur de Dakar) et nationales (Le Président de l’Association des Maires du Sénégal (AMS), Monsieur Aliou Sall, les Ministres Amadou Ba, Me Sidiki Kaba et Seydou Gueye, pour leur confiance. Ils ont eu à prier avec nous, et en premier lieu Son Excellence, le président de la République, Monsieur Macky SALL. Que Monsieur le Président de la République poursuive sa démarche de reconnaissance de tous les fils du Sénégal comme des citoyens à part entière, d’égale dignité, sans distinction religieuse, confrérique, ethnique ou géographique. Nous lui assurons notre plein soutien dans son combat républicain pour la sécurité et le développement du Sénégal.
Sadio CISSE
Président du CIPACS – Ancien Sénateur-Maire de Waoundé
Pr. Abdoulaye BA
Imam Ratib de la Mosquée – Secrétaire général du CIPACS
Membre de l’Académie Royale à Amman