«Les agents de l’Etat doivent adopter le culte du résultat et cultiver davantage la probité, la loyauté, l’humilité, le respect et la courtoisie. L’Administration doit être au service des usagers par sa proximité, sa simplicité, sa disponibilité, sa célérité, la lisibilité et l’efficacité de son action» (Président Macky Sall).
Après vous avoir offert cette belle réflexion du chef de l’Etat, je voudrais commencer mon propos par féliciter le Docteur Ousmane Aly Pame, président de Global écovillage network (Gen) qui a eu le courage et la sincérité de publier, il y a quelques jours, un article de haute facture qu’il avait titré «Le ministère de l’Environnement du Sénégal : une institution en hibernation». M. Pame a ainsi passé en revue les indices manifestes d’incompétence, de népotisme et de contre-performance qui prévalent au ministère de l’Environnement et du développement durable de notre pays.
Je m’en vais emprunter les conclusions du Docteur Pame pour appeler respectueusement la haute attention du chef de l’Etat sur cette grave situation qui prévaut au ministère de l’Environnement : «Le ministère de l’Environnement regorge de jeunes cadres compétents et expérimentés, mais quand le chef d’orchestre manque de charisme ou n’est pas à la hauteur des défis, cela conduit nécessairement à une impasse institutionnelle préjudiciable à l’amélioration des conditions d’existence de nos compatriotes.»
J’ajouterais que j’ai servi dans différents ministères de l’Environnement de 1970 à 2009, soit près de 40 ans. Je dois avouer que je n’ai jamais rencontré un ministre aussi incompétent et discourtois que celui à qui le chef de l’Etat a confié présentement la gestion des ressources forestières et fauniques de notre pays. Dans ma longue carrière, j’ai travaillé avec d’éminents ministres de l’envergure de M. Abdourahmane Dia, premier secrétaire d’Etat aux Eaux et forêts du Sénégal en 1973. J’ai également travaillé dans ce ministère avec diverses appellations, sous l’autorité de M. Moctar Kébé, M. Cheikh A. Cissokho, le Pr. Abdoulaye Bathily, le Dr. Mamadou Lamine Bâ, M. Modou Diagne Fada, M. Thierno Lô, M. Djibo Leyti Kâ. Tous ces ministres se sont distingués avec bonheur par des qualités professionnelles louables que leurs collaborateurs et compatriotes ont souvent bien appréciées.
Mais ce qui se passe actuellement au ministère de l’Environnement est un vrai scandale. C’est le règne du népotisme, du favoritisme et de l’arrogance. La plupart des postes de responsabilité ont été confisqués par le ministre et redistribués à ses proches et à ses partisans. Le cas de l’éviction injuste et arbitraire de Madame Ndao, coordinatrice de la Cellule d’éducation et de formation environnementale (Cefe), a ulcéré tous les acteurs de l’éducation environnementale. Les immixtions intempestives du ministre dans les affectations des agents des corps paramilitaires des Eaux et forêts et des parcs nationaux ont démoralisé les troupes de ces deux corps. Il est à signaler le cas de ce conservateur, officier supérieur des Parcs nationaux, qui est mort de stress et de chagrin, car il ne pouvait guère supporter la suprême humiliation qui lui a été faite à travers une affectation arbitraire. En effet, il a été relevé de son poste de conservateur du Niokolo Koba pour être affecté à la réserve de faune de Popenguine, un poste beaucoup moins prestigieux pour un officier de son rang. C’est comme si un gouverneur de région était affecté quelque part comme sous-préfet.
Ignorant royalement les directives du président de la République, le ministre de l’Environnement semble méconnaître l’étymologie du mot «ministre». C’est la raison pour laquelle je voudrais lui rappeler que le mot «ministre» vient du latin classique «minister» qui signifie «serviteur». Voilà pourquoi lors du Forum national de l’Administration, le Président Macky Sall a rappelé la recommandation suivante à tous les agents de l’Etat : «L’Administration doit être au service des usagers par sa proximité, sa simplicité, sa disponibilité, sa célérité, la lisibilité et l’efficacité de son action.»
Tout le monde sait que c’est sous l’autorité de l’actuel ministre de l’Environnement que la destruction des ressources forestières des régions de Ziguinchor, Kolda et Tambacounda a atteint le seuil de catastrophe écologique jamais vue au Sénégal. Les peuplements de vén, de teck, de dimb, de fromagers et de caïlcédrats ont été ravagés par des fraudeurs étrangers et leurs complices sénégalais, équipés de moyens mécaniques et logistiques jamais utilisés au Sénégal. Tout cela se passe sous le regard impuissant des agents forestiers découragés et sans moyens. Comme on dit dans l’Armée, les agents des Eaux et forêts et des parcs nationaux ont le moral au talon parce que leur chef est incompétent et inactif.
Tout récemment, un procureur de la République, maître des poursuites, a reproché aux agents des Eaux et forêts la mauvaise qualité des procès-verbaux qu’ils dressaient contre les délinquants qu’ils déféraient au Parquet suite à des délits forestiers. C’est dire que là également, le ministre a fait preuve d’incompétence en négligeant la formation permanente et le renforcement des capacités de ses agents.
S’agissant de la gestion lamentable des ressources forestières, je dois avouer que c’est la première fois que je constate au cours du mois de Ramadan la visite de trois ministres de la République et de leurs techniciens dans une région du Sénégal en vue de la mise en œuvre d’une stratégie concertée de lutte contre l’exploitation massive et frauduleuse d’arbres protégés par le Code forestier du Sénégal. C’est dire que l’heure est grave. Cela prouve que les délinquants en matière forestière n’ont plus peur. Ils n’ont plus peur de rien et de personne pour s’attaquer frauduleusement au patrimoine forestier national. Ils n’ont surtout pas peur d’un ministre qui dort au lieu d’aller sur le terrain en affrontant la chaleur et les intempéries du Ferlo, du Sénégal oriental et de la région de Ziguinchor. Le ministre de l’Environnement ayant prouvé son incapacité, il est temps de prendre des mesures radicales et salutaires pour sauver notre environnement en déconfiture, à l’image des décisions courageuses prises récemment par le chef de l’Etat pour extraire de la rue les enfants errants.
J’ai la preuve que le ministre de l’Environnement n’applique pas les directives du chef de l’Etat. En effet, le 21 mai 2015, je lui ai adressé une lettre de demande d’audience pour lui soumettre les deux projets de réédition de mes livres d’éducation environnementale et qui ont pour titre : L’arbre est la vie et L’eau, source de paix et de sécurité. Malgré mes multiples rappels, le ministre s’est toujours barricadé. Il n’a jamais eu la courtoisie de me répondre. Finalement, j’ai été obligé de capituler et d’adresser à sa secrétaire avec copie à lui-même le texto suivant : «Madame C.B. après plusieurs mois d’attente pour une demande d’audience avec M. le ministre, toujours sans réponse ni résultat, je vous informe que j’ai renoncé à ma demande. Merci et bonne journée.» (Colonel Moumar Guèye).
Quand un ministre n’arrive pas à trouver dans son agenda quelques minutes pour parler d’éducation environnementale avec un spécialiste en la matière, il doit tout simplement démissionner ou être démis pour le bonheur du Peuple sénégalais.
Je terminerais en adressant mes chaleureux compliments aux ministres Mbagnick Ndiaye, Pape Abdoulaye Seck, Mansour Faye, Abdoul Aziz Tall, Mary Teuw Niane, Mankeur Ndiaye, Khoudia Mbaye, Sidiki Kaba et Diène Faye. J’ai eu l’occasion d’apprécier personnellement auprès de ces ministres le culte du résultat, l’attachement à la probité, la loyauté, l’humilité, le respect et la courtoisie envers les usagers.
Moumar GUEYE
Écrivain/Lanceur d’alerte
Grand Officier de l’Ordre du Mérite
moumar@orange.sn
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