Les sociétés, conscientes de l’importance de l’Education qui constitue le socle de leur épanouissement, ont toujours intégré dans leurs préoccupations l’apprentissage, l’enseignement afin que le savoir-être et le savoir-faire aient comme fondements le savoir, la connaissance. Les marabouts et les détenteurs de la pensée spirituelle et religieuse étaient accueillis dans nos contrées où ils bénéficiaient de toutes les commodités relatives à leur installation. On leur construisait des maisons, des daaras ; on mettait à leur disposition des champs que les villageois cultivaient pour eux. Certains prenaient même des épouses dans le village. L’illustration est que nous retrouvons dans beaucoup de localités des noms étrangers qui tirent leurs origines de ces respectables personnages qui ont apporté la science, la religion et les enseignements utiles aux populations autochtones.
Ces éducateurs d’une autre époque étaient animés d’un seul idéal : servir Dieu et la Société.
L’installation progressive de l’Ecole française a été l’occasion pour les colonisateurs de mettre en place de nouvelles mesures d’accompagnements méconnues.
Ils (les colonisateurs) ont été jusqu’à installer une fracture sociale avec la création des Ecoles des fils de chefs, et des otages ainsi que l’octroi de la citoyenneté aux communes de Saint-Louis, Gorée, Rufisque et Dakar alors que les habitants des autres villes et villages étaient considérés comme des sujets taillables et corvéables à merci car ne bénéficiant d’aucun privilège.
Il est malheureux de constater qu’après cinquante-six ans d’indépendance certains ressortissants de ces quatre communes se pavanent fièrement en affichant leur citoyenneté française « octroyée » et leur raffinement qu’ils évoquent avec nostalgie.
Ce rappel historique nous a amené à nous poser des questions sur l’avenir de l’Ecole sénégalaise.
Une rencontre tenue le lundi 25 juillet 2016 à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar et relative au financement de l’Education donne encore raison à l’Union nationale des parents d’élèves et d’étudiants du Sénégal (Unapees).
Point n’est besoin d’être un expert ou spécialiste pour savoir que l’Education n’as pas de prix, cependant elle a un coût. L’Unapees l’a tellement compris qu’elle en a fait une de ses préoccupations majeures. S’il est admis par tous que l’Ecole est une composante essentielle de la Communauté, il doit être accepté que cette dernière à un rôle fondamental à jouer dans sa construction du point de vue infrastructurel et superstructurel.
La Communauté n’a jamais attendu l’Etat ni les partenaires techniques et financiers pour s’atteler à la construction d’établissements scolaires. La plupart des fameux abris provisoires ont été réalisés grâce à la volonté des parents d’élèves qui ne pouvaient pas attendre que l’Etat crée des écoles. Rien que ces installations de fortune constituent une part contributive essentielle dans l’Education au Sénégal.
J’ai eu à servir pendant une quinzaine d’années à l’intérieur du pays et particulièrement dans le département de Bakel et c’est là où j’ai mesuré les efforts fournis par la Communauté dans les constructions d’écoles.
Les associations de ressortissants de certaines localités et résidant à l’étranger font beaucoup d’efforts dans ce sens. Ne faudrait-il pas, pour leur rendre hommage et susciter une émulation, évaluer ces acquis, les montrer afin qu’ils servent de succès-stories pour tous les Sénégalais qui, Dieu sait, ont une fibre patriotique réelle qui leur permet de s’investir dans la promotion de l’Ecole de la Réussite pour tous ?
L’Unapees a, dès sa création, demandé une étude sur les Comptes nationaux de l’éducation. Le Rapport annuel de performances 2015 présenté par les départements ministériels en charge de l’Education et de la Formation technique et professionnelle à l’occasion d’un atelier a mis en évidence un vide. Dans la partie réservée au ministère de l’Education nationale et relative au financement, il est écrit à la page 81 : « L’Education et la Formation est financée par différents bailleurs de fonds que sont : l’Etat, les ménages, le secteur privé, les collectivités locales et les partenaires techniques et financiers.
L’information sur le Financement des ménages, du secteur privé et des collectivités locales n’étant pas disponible, l’analyse va se limiter aux ressources (internes et externes) de la Loi de Finances ». La partie réservée à la contribution au financement du Programme de « Développement des offres de formation professionnelle et technique » du ministère de la Formation Professionnelle, de l’Apprentissage et de l’Artisanat ne révèle que des sources de financement intérieur (Etat) et extérieur (partenaires techniques et financiers) alors que d’autres pistes pourraient être explorées pour amener la Communauté à participer concrètement aux programmes de formation professionnelle et technique.
Quant au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, c’est la même litanie qui nous est servie comme avec le ministère de l’Education nationale « l’Information sur le financement des ménages, du secteur privé et des collectivités locales n’étant pas disponible, l’analyse va se limiter aux ressources (internes et externes) de la Loi de finances »
Les leçons apprises
De tout ce qui précède, l’Unapees tire comme leçon que la participation des ménages bien que réelle et effective n’a pas fait l’objet d’une étude qualitative et quantitative et devait l’être pour permettre une lisibilité et une traçabilité de ces ressources qui peuvent être déterminées du point de vue financier (frais d’inscription, impôts…) et infrastructurel (construction et réhabilitation d’écoles, de salle de classes et de murs de clôture). Il s’y ajoute l’investissement des Collectivités locales car l’Education est un des domaines de compétences transférées et les ressources proviennent pour l’essentiel des citoyens qui représentent la Communauté.
Nous avons également constaté que les crédits alloués aux établissements ont connu non seulement une baisse, mais tardent à être mis en place. Les budgets consacrés aux établissements scolaires et universitaires devraient être disponibles au plus tard fin août pour permettre un bon démarrage de la rentrée.
Les ressources provenant des frais d’inscriptions doivent être additionnelles.
Quelques alternatives
Nous pensons qu’il est trop facile de demander aux Sénégalais des contributions volontaires pour le financement de l’Education.
La Responsabilité sociétale des entreprises ne doit pas être un simple slogan ni un effet d’annonce pour être à l’air du temps ou se fabriquer une bonne conscience. Beaucoup de sociétés, d’entreprises agricoles, industrielles investissent dans le pays, tirent leurs matières premières, leurs intrants des ressources naturelles qui font partie du patrimoine national.
Que font-elles pour l’Ecole ? sinon pour certaines, apporter une assistance, un appui ponctuel lors des cérémonies de distribution de prix avec comme contrepartie une publicité sur des t-shirts à leur image et distribués aux élèves.
Nous Unapees pensons que le financement de l’Ecole doit être plus organisé, institutionnalisé avec des mesures incitatives pour les entreprises qui s’investissent le mieux dans le système éducatif.
Le partenariat public-privé semble être une opportunité à saisir pour amener toutes les structures qui s’implantent dans le pays avec un chiffre d’affaires d’un montant que les pouvoirs publics pourraient fixer, à consacrer un budget dans le financement de l’Education. L’avènement des Pôles territoires pourrait constituer un cadre local pour la mise en œuvre de cette initiative citée plus haut.
Nous pensons que les opportunités existent et une approche diversifiée pourrait jeter les bases d’une réflexion plus approfondie sur le financement l’Education. Cela en vaut le prix.
Abdoulaye FANE
Président de l’Union nationale des parents d’élèves et d’étudiants du Sénégal (Unapees)
Chevalier de l’Ordre National du Lion.
Email : unapeesenegal@gmail.com
blog : unapees-over-blog.com