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Réponse à L’honorable Député Mamadou Lamine Diallo

Dans l’édition du quotidien Enquête du mardi 17 août 2016, l’honorable député, économiste et homme politique, Monsieur Mamadou Lamine Diallo, pose trois questions à son Excellence Monsieur le président de la République. Il demande : «Si le choc positif de la baisse des cours du baril de pétrole doit toujours profiter uniquement à l’Etat qui a déjà obtenu pour 2016, 35 milliards de plus-value de recettes fiscales ? Les transporteurs et les usagers ne doivent-ils pas en profiter ? Qu’est-ce qui est plus bénéfique à l’économie ?  Conserver le gain par l’Etat ou le partager avec ce dernier c’est-à-dire les transporteurs et les usagers.»

Economiste reconnu, sachant parfaitement ce que c’est un Etat et son mode de fonctionnement, nul doute que Monsieur Diallo détient assurément les réponses à ses interrogations. Mais ce préjugé favorable que je lui dois, compte tenu de son rang, m’amène à croire qu’il utilise juste une démarche pédagogique connue et prisée par les spécialistes en la matière, consistant à poser la question pour les non-sachants, offrant ainsi à nous autres, commis de l’Admi­nis­tration, l’opportunité d’expliquer à nos compatriotes ce que l’Etat fait des deniers tirés de cette situation conjoncturelle très favorable. Je l’en remercie.

Dans ses interrogations, il demande en substance si la baisse des cours du baril du pétrole devait toujours profiter à l’Etat ou si elle devait être redistribuée. Sa question m’a poussé à me demander qui était l’Etat et qu’est-ce que le concept pouvait englober comme dimension exclusiviste de vous, lui ou moi. Le juriste Carré de Malberg nous éclaire en le définissant comme une «communauté d’hommes, fixée sur un territoire propre et possédant une organisation, d’où résulte pour le groupe envisagé dans ses rapports avec ses membres une puissance suprême d’action, de commandement et de coercition». Me fondant sur cette définition de l’Etat, je suis tenté de lui répondre «Oui, Honorable, l’Etat doit garder cela pour lui».

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Toutefois le lisant, c’est à croire qu’il était envisageable de considérer l’Etat comme une entité autonome dotée d’une existence propre qui ferait totale abstraction de vous (lecteur), lui et moi ; hérésie ne saurait être plus grande.

Honorable, est-il besoin de vous rappeler que l’Etat c’est vous, les autres et moi, en somme : nous tous ? Ceci étant, nous sommes tout à fait à l’aise pour expliquer à l’économiste que vous êtes où vont les revenus tirés de cette baisse des cours qu’il faille relativiser au passage d’ailleurs, parce qu’étant concomitante à une variation à la hausse, très significative, du dollar américain.

L’Etat a tout d’abord procédé à une redistribution de revenus aux différents acteurs intervenants dans le secteur par : la hausse de la marge des grossistes et des distributeurs (les prix étant fortement régulés), la hausse de la marge des détaillants de 10,4 francs à 14,4 francs, soit près de 40%, deux baisses des tarifs à la pompe au bénéfice des usagers (16 janvier et 17 février 2016). Il s’y ajoute qu’avec la révision des tarifs de transport d’hydrocarbures, la péréquation transport des produits blancs (le prix du litre de carburant étant le même partout sur le territoire national), qui est un élément de la marge de distribution de ces mêmes produits, a été revalorisée ; faisant varier les marges de distribution de +3%.

Il s’y ajoute qu’afin de soutenir les prix au consommateur et assurer l’approvisionnement correct du pays en produits pétroliers tout en évitant toutes tensions sur les stocks des différents produits, l’Etat a consenti à prendre en charge les pertes et manques à gagner nés du blocage des prix au consommateur de certains produits comme le butane.

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C’est ainsi qu’en 2015, l’Etat a pris en charge les pertes de la Sar ainsi que celles de certains opérateurs sur l’achat et la vente de supercarburant suite à l’arrêt du reforming du 26 février au 7 avril 2015 ; le manque à gagner suite au blocage des prix des essences entre le 7 juin et le 29 août 2015 à des niveaux inférieurs aux prix réels, ainsi que le différentiel de Ppi suite au blocage des prix du gaz butane à un niveau inférieur au Ppi réel en 2015. Il est aussi important de souligner que pour dissuader les consommateurs de se tourner vers le charbon de bois et nous faire ainsi perdre tous les bénéfices de la politique de «butanisation», l’Etat a renoncé à la Tva et aux droits de douanes pour un montant avoisinant 10 milliards rien que sur 2015.

Pour le reste de la manne comme vous avez l’habitude de la nommer, l’Etat dispose de deux instruments financiers que sont le Prélèvement de soutien au secteur de l’énergie (Pse) et le Fonds de soutien aux importations de produits pétroliers (Fsipp) qui lui servent de leviers pour assurer les équilibres du secteur et qui sont alimentés par ces ressources tirées du secteur. En témoignent les importants résultats indéniables qui, aujourd’hui, font la fierté des autorités étatiques et recommandent de vous et de nos compatriotes des félicitations à leur endroit. J’en citerai seulement :

  • Un approvisionnement en combustible maîtrisée (loin de la période des fiouls impropres et des bateaux dont l’arrivée était attendue de tout un Peuple et suivie par la presse)
  • Une production d’électricité excédentaire depuis juin 2015
  • Des réseaux de transport et distribution en rénovation et extension
  • Une gouvernance du secteur révolutionnée
  • Une raffinerie en vitesse de croisière et qui fait des bénéfices (elle était condamnée par un ancien Pm aujourd’hui donneur de leçons et peinait même à trouver acquéreur)
  • Une meilleure qualité de service aux usagers

L’autre partie constituée des taxes fiscales, vous connaissez mieux que quiconque leur destination qui n’est autre que le financement des innombrables projets de l’Etat dans l’éducation, l’enseignement supérieur, la santé, les infrastructures, les bourses familiales, la couverture maladie universelle, l’agriculture et j’en passe.

Parlant des bourses familiales, je vous ai lu décrier leur pertinence et leur impact peu significatif, je considère que c’était le politicien, même pas l’homme politique encore moins l’économiste qui s’exprimait. Oser affirmer que 25 milliards de francs injectés en une année dans une économie comme la nôtre et qui ne sont ni thésaurisées ni épargnés, mais plutôt immédiatement consommés en première nécessité constitue une action dépourvue d’impact ferait retourner Friedman dans sa tombe, lui qui a démontré de manière irréfutable que la fonction keynésienne sur la consommation utilisait une variable erronée : sûrement que vous êtes keynésien.

Enfin sur la question des ressources pétrolières et gazières qui passionne tant, il est très facile de poser des questions traduisant des insinuations fallacieuses ou de parler au conditionnel comme le font souvent ces sentinelles autoproclamées de la bonne gouvernance qui tentent de jeter l’anathème sur nous autres à qui est confiée la gestion du secteur, mais je les mets au défi de prouver à l’opinion un seul acte posé qui serait de nature à hypothéquer ces ressources qui appartiennent à la Nation tout entière intégrant les générations futures.

Le débat constructif reste ouvert, Honorable.

 

Mor Ndiaye MBAYE

DC/Meder

Membre de la Ccr

Blog : morfattah.blogspot.com

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