« Le plus grand mal que la fortune puisse faire aux hommes, est de les faire naître faibles de ressources, et ambitieux, » a dit le Marquis de Vauvenargues.
Cette pensée cadre parfaitement avec l’histoire de Macky Sall, si l’on veut comprendre qu’est ce qui fait agir cet homme.
En effet, Macky Sall n’a pas toujours été l’homme ayant gravi tous les besoins de la Pyramide de Maslow pour n’avoir plus que celui d’estime et de reconnaissance que les sénégalais auront connu à travers son ascension fulgurante sous Me Wade qui s’en mord encore les doigts, et son accession surprenante à la magistrature suprême sur fond de conflit de leadership entre ses deux fidèles alliés du moment, les vieux ennemis ridiculement sages sous son aile Tanor et Niasse, chacun rongeant son fromage dans le calme, indifférents au triste sort fait à leurs compatriotes, et au pillage en règle de notre pays.
L’histoire perturbée de Macky Sall, ses échecs multiples et ses renoncements à tous les rêves des gosses de son âge à l’époque de son enfance ont forgé en lui un caractère introverti accompagné d’un ressentiment généralisé contre tous ceux qui étaient bien mieux nantis que lui, à un moment où tout lui était inaccessible. De là vient son penchant naturel pour la méchanceté envieuse qui le foudroie dès qu’il a le sentiment d’être en présence d’une personne qui fait peu cas de sa stature ou semble lui en imposer par une indifférence que lui seul perçoit en ses circonstances comme une provocation, car il souffre d’un terrible complexe d’infériorité qui explique sa propension à en imposer à ses collaborateurs et à réagir de manière disproportionnée en de nombreuses occasions.
Il a laissé tomber toutes formes de relations issues de la période de sa vie marquée par la gêne et l’indigence. Il n’y a dans l’entourage de Macky Sall que Mamadou Talla comme réminiscence de sa vie de jeune adulte, car c’est lui qui avait voulu de bonne grâce en son temps, présenter Macky Sall à celle qui sera plus tard son épouse, Maréme Faye.
Macky Sall s’est accroché avec l’énergie du désespoir à tout ce qui pouvait le sortir de la misère ambiante dans laquelle il a baigné toute sa tendre enfance et une partie de sa jeunesse. Il s’est attaché à tous ceux qui pouvaient à son gout changer son destin, et l’homme qui aura cristallisé cet espoir fut un certain Abdoulaye Wade, sans doute pour son charisme et son accessibilité, à un moment où le PS faisait office de forteresse imprenable et qu’AJ où il a fourbi ses armes se perdait dans des considérations communistes inopérantes qui ne lui offraient aucune perspective de changement de vie, dans l’immédiat.
C’est de cette période sans doute que date la logique de Macky Sall à adopter une attitude de servitude qui s’ancrera si fortement en lui avec tellement de visibilité que Me Wade détectera rapidement qu’il était l’homme de la situation, au moment où il fallut se débarrasser d’Idy, après toutes les péripéties qui auront jalonné la collaboration entre les deux hommes, dont le point d’orgue sera la fameuse scène chez Pape Diop qu’Idy rapportera lui-même plus tard.
Il est sans doute vrai que, comme le Rastignac de Balzac, Macky Sall au contact d’un Me Wade à l’apogée de sa gloire et de sa toute puissance financière a très tôt « [vu] le monde comme il est : les lois et la morale impuissantes chez les riches, et [il a vu] dans la fortune l’ ultima ratio mundi ». Et comme Rastignac aussi, sans doute a-t-il dû se dire : « la fortune est la vertu »!
Utilisé par Me Wade, il a gardé ce réflexe de servir, pour le bon plaisir de tous ceux qui ont eu besoin de l’utiliser. « Le caractère d’un homme fait son destin », a dit le sage Démocrite.
Aujourd’hui encore il est l’instrument des lobbys, de son clan, de son ethnie et surtout de Maréme Faye qui a mis la main sur l’État, par la domination totale qu’elle exerce sur lui : elle a la haute main sur « les dossiers lourds » crane t’elle fièrement, car son époux n’aurait pas le cœur suffisamment accroché pour trancher ; « c’est un sentimental, » dit-elle.
Quand on a grandi et qu’on s’est forgé une personnalité de servant, de suiveur, on ne se transforme pas du jour au lendemain en leader, cela n’est pas possible. Souleymane Jules Diop qui le connait très bien l’a d’ailleurs fort à propos admirablement dépeint comme personne ne le fera après lui.
A sa personnalité de servant, il a ajouté pour le malheur de notre pays à son accession au pouvoir, la rage de se servir !
Ce monsieur ignore le sens des mots honneur, noblesse, reconnaissance, justice dès lors qu’il a le sentiment que ses intérêts sont en jeu, et qu’il s’agit pour lui de les faire valoir, coûte que coûte.
Il règne sans gloire, dirige sans éthique, agit avec méchanceté, encourage le vol, le détournement et l’enrichissement illicite avec une fausse pudeur éhontée, viole la loi avec le fracas d’un éléphant dans un magasin de porcelaine, foule au pied avec une violence ignominieuse les règles établies de démocratie et de bonne gouvernance, éructe des chants d’autoglorification sans vista car il finit toujours par la menace avec sa fameuse allusion au lion qui dort, parce que, il faut le reconnaitre, il aime le sommeil après la ripaille, comme un Don Juan adore le repos du guerrier.
Une vie de plaisir, de course à l’enrichissement frénétique comme pour guérir une névrose liée au traumatisme de la pauvreté et de l’indigence ajoutée à une gourmandise bien apparente, voilà la vie de Macky Sall, toujours désormais entre deux avions. Montrer aux sénégalais qu’il est un homme important ne lui suffit plus en effet, il faut qu’il affiche sa présence partout, sur tous les continents et plastronne au milieu des hommes puissants de la planète pour se convaincre qu’il a vraiment pris une revanche sur l’histoire, son histoire à lui.
L’autoglorification, premiers pas que franchit n’importe quel dictateur en puissance est bien
revendiquée aussi bien par lui qui chante ses propres prouesses pour avoir réalisé un pont
immergent que par ses propres thuriféraires qui le célèbrent comme la première merveille de
notre pays. Il est malheureusement bien vrai que l’« on a de tout avec de l’argent, hormis
des mœurs et des citoyens », a constaté avec justesse Jean-Jacques Rousseau, et Macky Sall
grisé par les chants à sa gloire et les flatteries de ses conseillers a oublié, pour son malheur très prochain que « la flatterie n’ émane jamais des grandes âmes ; elle est l’ apanage des
petits esprits, qui réussissent à se rapetisser encore pour mieux entrer dans la sphère vitale de la personne autour de laquelle ils gravitent. La flatterie sous-entend un intérêt. »
Désormais, le pouvoir qu’on lui a confié n’est plus un moyen de changer le Sénégal et de travailler à l’émergence de notre pays, mais c’est une fin pour lui : c’est l’occasion d’assouvir son obsession de possession de tout ce dont il avait rêvé, et de mener une existence de prince dont il ne veut surtout plus sortir. Avec le régime de Macky Sall, on peut dire dorénavant que « La soif de l’ or est devenue tellement impérieuse au jour d’ aujourd’hui, que beaucoup de gens n’ hésitent pas, pour se procurer des sommes, à employer (…) la félonie, parfois même l’ indélicatesse» ou pire, l’ignominie et les deals à la Al Capone!
Ce qui est grave, c’est que malgré que notre pays lui a tout donné, Macky Sall en veut toujours plus encore. Il devrait méditer cette pensée bien de chez nous : « Kou khiifé sa birou waadiour, alalou adouna yeup doula sour ».
Les sénégalais sont excédés par les frasques d’un Macky Sall de plus en plus hautain et cassant à la limite paternaliste et un brin méprisant, comme si c’est le peuple qui devrait lui rendre grâce d’avoir bien voulu présider à sa destinée.
« Baadolo khamoul ndiowaane », aurait sans doute chanté Youssou Ndour, avant d’enchainer avec « douma tope diw, fa ngène dieum mo souriwoul » !
Le peuple en a désormais assez, et il est venu l’heure de siffler la fin de la récréation, en rappelant pour conclure ces propos de Souleymane Jules Diop qui se sont tous révélés vrais : « Voter Macky c’est élire Maréme », après nous avoir avertis que la faute revenait à Me Wade, qui a mis dans la tête d’un pauvre monsieur qu’il était intelligent, compétent et brillant, et qu’il avait le profit de haut serviteur de l’Etat, en le nommant aux plus hautes fonctions, alors que ce dernier n’aspirait qu’à un destin de petit chef de service.
Avec Macky, nous avons désormais la preuve au Sénégal que « le pouvoir absolu corrompt absolument ».
Bientôt il sera le moment de découvrir aussi les affres de l’anomie, de la répression sanglante, d’arrestations d’opposants et de liquidations d’adversaires politiques, quand il faudra le chasser du pouvoir qu’il n’est absolument pas prêt de quitter, tellement il est désormais l’otage de ses deals qui le perdront surement, ses proches et autres prêtes noms y compris.
Quant à nous, nous continuerons de nous ancrer surement dans « deux engagements difficiles à maintenir, quelles que soient par ailleurs nos infirmités personnelles : le refus de mentir sur ce que l’on sait, et la résistance à l’oppression ».
Cissé Kane NDAO
Président A.DE.R
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