Madiambal Diagne défendant de manière dithyrambique le Président Macky Sall nous informe qu’ «en septembre 2015 à Antalya (Turquie) et l’année suivante à Ghuanzhou (Chine), le chef de l’Etat du Sénégal se fera applaudir, à tout rompre, devant le gotha du G20 pour sa vision du monde et sa gouvernance.
Le 1er juin 2016, Macky Sall était l’invité d’honneur du Forum économique de l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE), tenu à son siège à Paris, [où il a recueilli ] les éloges à l’endroit de la politique économique du Sénégal ».
Heureusement qu’il concède quand même que le Président Macky Sall est le « Chef d’Etat d’un pays dont le poids économique est des plus faibles au monde », le Sénégal !
Le Président Macky Sall a quant à lui déclaré lors de sa récente visite au FMI que « nous ne pouvons pas développer l’Afrique avec des chemins de fer archaïques et délabrés, ce n’est pas possible.
Aujourd’hui il est impossible que l’Afrique reste avec ses chemins de fer qui datent de l’antiquité » avant d’ajouter, très en verve : « Si le FMI ne finance pas les projets de construction de chemins fer allant de Dakar à Addis Abéba, nous le ferons, je travaillerai personnellement pour que nous y arrivions » !
A ces propos du chef de l’Etat Sénégalais, accompagné d’une forte délégation ministérielle dont Amadou BA, ministre des finances, et devant un parterre d’hommes d’affaires américains, Mme Christine Lagarde s’esclaffe et dit au président : « Vous êtes impressionnant Monsieur le président, c’est un honneur de travailler avec le Sénégal ».
Notons au passage le brin de malice et le recadrage contenu dans ses propos, par lesquels Mme Lagarde circonscrit la portée des échanges avec notre président au seul cas du Sénégal ; en effet, précise t’elle, il s’agit avant tout de « travailler avec le Sénégal » ! Tant qu’il y aura le compte d’opérations à la Banque nationale de Paris et que les états africains ne s’émanciperont pas de la tutelle financière de la France, il n’y a pas de fermeté qui soit opérante, ou de succès diplomatique rythmé d’applaudissements à tout rompre utile, en termes de retombées économiques.
Le fait que « le FMI a levé le plafond d’endettement du Sénégal, le seul pays en Afrique à avoir bénéficié d’une telle faveur » n’en est surtout pas un.
Surtout que le FMI est une institution en perte de vitesse lâchée par tous les états et organisations inter étatiques capables de créer eux-mêmes leurs propres fonds d’investissement. En conséquence, aller au FMI défendre la pertinence du financement des projets structurants capables d’accélérer l’intégration économique africaine, c’est comme aller se plaindre de son découvert bancaire chez le prêtre, dans son confessionnal !
Et puis la démarche de notre Président est somme toute contradictoire : le Sénégal est en effet le champion incontesté des partenariats public-privé, avec à la clef la réalisation d’infrastructures comme le CICAD, l’autoroute ILA TOUBA et j’en passe.
Alors pourquoi se rendre au FMI plaider pour la réalisation d’un chemin de fer qui pourrait être financé par la même voie, surtout que c’est un projet d’envergure régional et chaque pays y mettra du sien, en plus de la participation d’organismes comme la BAD? Réaliser l’intégration par les transports pour rapprocher les peuples et impulser un souffle nouveau aux échanges économiques n’est pas une dynamique nouvelle.
Rappelons-nous le NEPAD dont justement la commission des infrastructures est confiée à notre pays. Notre président ne porte pas donc une initiative nouvelle. Et d’ailleurs, à quoi servirait un train pour aller jusqu’en Éthiopie dans ce contexte marqué par la lutte contre le terrorisme, la porosité de nos frontières et la montée en puissance de régimes dictatoriaux aussi instables qu’infréquentables?
Incarner un nouveau leadership pour notre président, ce n’est donc pas aller réclamer l’accompagnement du FMI pour développer l’Afrique. Le FMI y a échoué depuis longtemps. Notre Président devrait plutôt porter le combat de l’émancipation économique de notre continent, à commencer par notre pays, qui est totalement entre les mains d’intérêts étrangers.
En affirmant péremptoirement qu’« assurément, ce sont les hauts dirigeants du Fmi, de la Banque mondiale, de l’Ocde et de la Réserve fédérale américaine qui savent, mieux que quiconque, tous les tenants et aboutissants de pratiques occultes en matière de gouvernance de ressources publiques à travers le monde », Madiambal Diagne n’a jamais été autant à côté de la plaque.
En effet, pour ce qui concerne le Sénégal, nous avons aujourd’hui une classe politique mature, des organismes de la société civile experts en gestion publique et qui sont très au fait de tous les actes posés en matière de gouvernance publique. Et l’Etat sénégalais, à travers ses organismes de contrôle d’ailleurs s’est doté de tout un arsenal d’outils de promotion de la bonne gouvernance qui permet globalement aux citoyens sénégalais de pouvoir apprécier l’action du gouvernement dans ce domaine.
Le visa de ces institutions de Bretton Woods a cessé depuis longtemps d’être un élément viable d’appréciation de la situation macro économique des états. Combien de pays ont été jugés bons élèves et qui du jour au lendemain se sont effondrés sur tous les plans ? Le meilleur élément d’appréciation en ce point reste l’opinion publique nationale.
Et le Président Macky Sall devrait se méfier de ceux qui l’incitent à apprécier son action sous la sanction de ces institutions. De même, il n’y a aucun intérêt à se faire applaudir durant ces assemblées au point de bomber le torse, si vous comptez pour du beurre et que votre présence est toute symbolique.
Les accords qui sont ratifiés durant ces grand-messes de la haute finance internationale, les contrats qui sont signés par des multinationales de ces pays du G20 et autres n’ont aucun impact sur nous. Le leadership de Macky Sall que l’on célèbre en cette occasion n’a aucune retombée sur notre sort.
Bien au contraire. Car les voyages coutent cher. Si à tout le moins notre Président s’y rendait auréolé d’un manteau de porte parole légitime de l’Afrique, sa présence aurait beaucoup plus de sens. Notre Président a en effet les atouts pour incarner le renouveau économique et politique africain, s’il le désire vraiment. A lui de prendre ses responsabilités et de devenir un grand de ce monde. Comment ? En commençant par mener la bataille de l’indépendance financière de l’Afrique avec la fin enfin du CFA. En œuvrant pour la réalisation de l’unité africaine.
En Travaillant à l’émergence d’une élite économique nationale et sous régionale, avec la promotion d’entreprises fortes capables de porter la croissance de l’Afrique. En Concrétisant l’intégration sous régionale par la réalisation de la libre circulation des personnes et des biens, premiers pas vers l’intégration économique, sans laquelle pas d’indépendance. Si notre Président veut être grand, qu’il soutienne ces « grandes querelles » !
Cissé Kane NDAO
Président A.DE.R
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