«Gouverner, c’est prévoir», sous nos cieux cette maxime semble être méconnue des autorités étatiques sénégalaises, dans tous les secteurs vitaux de notre développement, c’est le pilotage à vue qui reste et demeure la seule règle pratiquée.
L’agriculture n’est pas en reste dans ce laxisme indescriptible qui gangrène notre pays. Au moment où, un conseil interministériel est convoqué par le ministre de l’agriculture pour fixer la date du démarrage officiel de la campagne de vente arachidiere, les paysans eux, mes voisins de Ndiebel, Dinguiraye, Birkelane ont déjà écoulé, depuis belle lurette, leur maigre produit au marché noir à de vils prix ( 160 f le kg d’arachide ) à des opérateurs peu scrupuleux.
Peut -on garder des graines chez soi, quand le boutiquier qui t’a fourni du riz , de l’huile , durant les périodes de vache maigre autrement dit pendant la saison des pluies commence à faire les cents pas entre son échoppe et ta demeure, quand le cadet de la progéniture est renvoyé de l’école pour faute d’inscription ou de fournitures, quand l’ordonnance de la dame attend d’être achetée parce que non couverte par la fameuse CMU ( Couverture Maladie Universelle ).
Le ridicule ne tue pas au Sénégal. Pourtant le président avait fait une tournée agricole dans le Saloum pour disait-il constater la réussite de la production annuelle. Que nenni, il s’est fait photographier dans des plantations et champs de riches producteurs, millionnaires, qui sont radicalement différents des millions de petits paysans, pères de familles du monde rural réel.
«Travaillez, prenez de la peine, c’est la fin qui justifie les moyens» ce riche lègue du laboureur de Jean de La Fontaine à ses enfants est rangé aux calendes grecques dans le monde rural. Aujourd’hui, nos Etats s’émeuvent quand des hordes de jeunes ambulants abandonnent le monde paysan pour venir squatter les arrêts et rues de la capitale avec des mouchoirs et autres marchandises sans valeur, pourtant c’est l’échec de leur politique agricole qui est l’origine de cet exode rural.
Malgré les milliards perdus chaque année en subvention d’engrais et de semences, la situation va de mal en pire, les ressources sont captées par des hommes d’affaires et autres politiciens, elles n’arrivent jamais à destination.
Le Sénégal sombre de jour en jour dans la corruption et la lourdeur de la bureaucratie, des séminaires et autres colloques sans fin, organisés chaque jour dans les palaces et salons feutrés de la capitale, au moment où la paysannerie meurt à petit feu.
Babou Touré