Avant-hier, je suis tombé sur une vidéo intitulée « Cheikh Mbacké Sakho relance le débat des confréries sur le plateau de Tounkara : Loolu dou Diiné». Ayant fait le même constat, un de mes amis chercheur a signifié au site qui l’a publiée que ladite vidéo remontait à longtemps ; bien avant les malheureux évènements bien connus. Ce à quoi l’administrateur dudit site obtempéra et consentit à s’amender, en retirant la vidéo incriminée. Mais le mal était déjà fait, car plusieurs autres portails web l’avaient déjà reprise à leur compte sans aucune vérification sur sa temporalité, si bien que le contenu poursuit toujours son voyage sur Internet.
Sur ce même sujet, j’avais eu accès à une vidéo intitulée «Nouvelle déclaration de Cheikh Sakho », publiée le 3 octobre 2016 par une chaine YouTube sénégalaise. Une autre vidéo l’a été le 7 décembre 2016 avec exactement le même titre alors qu’il ne s’agissait pas du même contenu. D’ailleurs, le sieur Sakho ne portait pas les mêmes habits. J’observe que ces publications sont faites alors que le principal concerné a retiré ses propos et présenté ses excuses suite à la réaction énergique suscitée par sa diatribe anti-mouride.
Loin de moi l’idée d’insinuer que Sakho ait arrêté ses attaques de mauvaise foi contre le Mouridisme ou le Soufisme de manière générale. Mais on peut au moins affirmer, de manière quasi certaine que, officiellement, nous n’avons pas connaissance d’une nouvelle vidéo de sa part après celle qui avait déclenché le courroux de nombreux sénégalais. D’ailleurs, à y être attentif, son silence relève du simple bon sens. En effet, un individu jouissant de toutes ses facultés mentales ne saurait échapper à un lynchage, être sous le coup d’une action en justice et continuer à tenir le même discours qui lui a valu un tel sort.
Je veux en venir au fait que la recherche du buzz doit avoir des limites, surtout quand il est question d’un sujet aussi intime et sensible que le sentiment religieux. Je souhaite attirer l’attention de nos médias sur le danger que constitue la publication sans contrôle, sans limites et sans aucune vérification minimale de contenus offensants et pouvant embraser tout un pays. En effet, dès le visionnage de cette vidéo certains auraient pu être tentés par une réaction épidermique dont nous aurions du mal à contenir les conséquences.
Le laxisme et le manque de rigueur dans le traitement cavalier de l’information peuvent être moins graves s’ils touchent à la vie de nos « peoples » ou à des « célébrités » dans un cadre purement mondain. Ils peuvent toutefois devenir dévastateurs dès lors qu’ils concernent la fibre religieuse. Surtout dans un contexte mondial et sous-régional où les déstabilisations et conflits au nom de la religion dont notre cher pays fut jusqu’ici préservé.
Au fond, cette situation pose la question du discours religieux, de ses contours, de ses canaux de distribution et des limites dans lesquelles il doit se mouvoir. Malheureusement des questions essentielles restent aujourd’hui sans réponses dans notre pays : Qui doit produire le discours religieux ? Quel canal doit-il emprunter ? Peut-on absolument tout dire dans l’espace public, au nom de la « liberté d’expression » et de la « libre pensée » ? Que risque celui qui diffuse ou colporte un discours offensant, fut-il religieux ?
L’absence actuelle de réponses claires à ces questions conduit au fait que chacun s’estime en droit d’exprimer sa foi comme il l’entend, quitte à insulter celle des autres ou à la qualifier d’indigne. Ou, en réaction, à se faire justice soi-même devant l’inefficacité des canaux de régulation. Une situation malheureusement amplifiée par la caisse de résonnance médiatico-numérique, surtout les réseaux sociaux, dont nous avons encore du mal à cerner les dégâts.
Visiblement, certains individus cherchent, par ces publications, à nourrir (volontairement ou non) des tensions entre des communautés. Face à cette situation, le devoir qui incombe à tous, surtout aux sites d’information, est de faire preuve de responsabilité dans le maniement de ces contenus.
Allah le Très-Haut nous ordonne : « Ô vous qui avez cru ! Si un pervers vous apporte une nouvelle, vérifiez la soigneusement (de crainte) que par inadvertance vous ne portiez atteinte à des gens et que vous ne regrettiez par la suite ce que vous avez fait ». (Coran/Sourate 49-verset 6). L’éminent savant A-Sa’di a quant à lui dit :« Il fait partie des règles de bienséance dont les gens doués de raison doivent se doter et appliquer le fait de vérifier l’information qui leur est rapportée par un pervers et de ne pas l’accepter comme elle est. Car il y a en cela un grand danger?»(Exégèse de A-Sa’di page 800).
Dieu garde notre pays !
Omar Ba