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Macky Sall, Un Tyran Au Pouvoir : Et La Démocratie Sénégalaise Dans Tout ça?

La mise en place de la démocratie moderne en tant que principe universel de gouvernement des sociétés modernes a été un long processus et fruit d’un long combat historique. Si le continent africain est entré dans une nouvelle ère de la démocratie  dans les « années 90 » après le Sommet de la Baule tenu en France sous la présidence de François Mitterrand dont l’essentiel est résumé par Roland Dumas : « Le vent de liberté qui a soufflé à l’Est devra inévitablement souffler un jour en direction du Sud (…) Il n’y a pas de développement sans démocratie et il n’y a pas de démocratie sans développement ». Ainsi, la quête du développement de l’Afrique par la démocratie ouvre une nouvelle ère, une nouvelle tournure majeure dans l’histoire politique du continent et favorise l’épanouissement moral et intellectuel.

Cette nouvelle ère renforce la liberté d’expression, le pluralisme politique mettant fin notamment au règne du parti unique tout en favorisant l’organisation des élections libres, mais aussi donne à chaque citoyen la possibilité  d’adhérer à la formation politique de son choix. En effet, cette trajectoire majeure de l’histoire politique du continent réconforte la position de l’Afrique dans les nouvelles  relations internationales au point de certains penseurs de la communauté scientifique  comme Jean François Bayart ont pu parler « d’un processus de décompression autoritaire » au moment où le politologue américain Samuel Huntington qualifie cette phase de « de troisièmes vagues de démocratisation » favorisant le déclin des régimes autoritaires ( HUNTINGTON, Samuel P. Democracy’s Third Wave, University of Oklahoma Press, 1991). Dès lors, la question de la démocratie en tant qu’exigence à la fois morale et vitale se pose et s’impose partout dans le continent, car l’ère néolibérale est incompatible avec la persistance de la dictature et des régimes militaires.

Par ailleurs, le Sénégal a fait exception à cette règle, car il a connu une démocratie riche et moderne bien avant les « années 90 ».Ainsi le Sénégal est le premier pays africain doté d’institutions électives modernes  comme la montre depuis le 31 octobre  1848 l’élection législative de Durant Valentin. Déjà, l’année 1763 marque l’existence des élections municipales  qui consacrent des mairies à Gorée et à Saint Louis. Cette démocratie des valeurs anciennes, mais  à caractère moderne traverse un chaos sans précédent. Le point de départ de cette crise est  la conséquence de la sociogenèse et de la construction historique d’un État basé sur « le contrat social » sénégalais ou le modèle « islamo-wolof », que certains penseurs comme DONAL CRUISE O’BRIEN ont tenté de mettre en exergue à travers des études africanistes. Ce modèle « islamo Wolof » montre que le Sénégal est un pays à majorité musulmane qui cohabite avec une minorité chrétienne tout en célébrant les mêmes vertus et  valeurs. En s’inscrivant de cette logique de DONAL CRUISE O’BRIEN, le contrat social sénégalais, différent de la conception rousseauiste, accorde une place prépondérante aux confréries musulmanes et aux familles maraboutiques dans la vie politique sénégalaise. C’est par là qu’on note non seulement l’absence de sécularisation, c’est-à-dire la séparation entre le religieux et le politique , mais aussi la négation même de la forme institutionnalisée du pouvoir politique tout en bafouant les fondements à la fois constitutionnels et politiques de l’État de droit. Au regard des faits et de l’actualité, le pouvoir religieux et les familles maraboutiques polluent non seulement les médias, interfèrent dans le domaine de la justice et se substituent en pouvoir institutionnalisé dans l’organisation de la société.

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En effet, c’est sous Macky Sall que le recul de la démocratie sénégalaise est devenu une réalité absolue.  Dans la même veine, la décision du président de la République du Sénégal de libérer KARIME WADE, à la suite d’un ordre « Ndiguel » venant des marabouts et d’un complot au niveau international ne favorise point la vitalité et la consolidation de la démocratie sénégalaise. Au contraire, de tels actes continuent à salir et à ternir l’image de notre démocratie. Bref autant de formes de « transactions collusives » pour parler comme MICHEL DOBRY favorisent un handicap à la démocratie. Et pourtant, la véritable démocratie implique une sécularisation radicale, mais aussi la séparation stricte des pouvoirs entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire, car en suivant la logique de Montesquieu : « Tout serait perdu si le même homme, ou le même corps  exerçait ces trois pouvoirs : celui de faire les lois, celui d’exécuter les résolutions publiques, et celui de juger les crimes ou les différends des particuliers.» ( MONTESQUIEU (1689-1755), De L’Esprit des Lois (1748).C’est par là que le Sénégal devrait rebâtir une Assemblée nationale dynamique avec un pouvoir législatif fort et détaché de l’exécutif, mais aussi la mise en place d’un pouvoir judiciaire solide capable de garantir l’indépendance de la justice et le travail autonome des magistrats tout en évitant l’ingérence et des directives venant du palais de la République. C’est à la limite scandaleuse de voir dans un État de droit des magistrats démissionner à cause des tares de l’exécutif qui empêchent l’exercice et la plénitude de leurs fonctions. C’est la raison pour laquelle la démission de Monsieur Ibrahima Hamidou Dème au sein du Conseil  Supérieur de la Magistrature met exergue le manque d’indépendance du pouvoir judiciaire vis- à- vis du pouvoir exécutif, au moment où l’Union des magistrats réclame une indépendance totale. Pourtant la charte fondamentale en son article 105 garantit le principe constitutionnel de l’inamovibilité des juges, mais aussi rappelle que le pouvoir judiciaire doit être indépendant du pouvoir exécutif et législatif, car « Il n’y a point encore de liberté si la puissance de juger n’est pas séparée de la puissance législative et de l’exécutrice.» (MONTESQUIEU (1689-1755), De L’Esprit des Lois).

Par ailleurs, c’est ce manque d’indépendance du pouvoir judiciaire qui explique l’instrumentalisation de la justice par un règlement de compte comme le montrent les prisonniers politiques Khalifa Sall, Bamba Fall et compagnie. Ainsi, la question que le peuple sénégalais se pose est de savoir : le maire de Dakar Khalifa Sall et Bamba Fall seraient-ils en otage s’ils étaient dans la coalition « Benno Book Yakar»? Dès l’instant qu’on soulève cette interrogation, on se rend compte en toute évidence que Macky Sall s’inscrit dans une tentative d’élimination systématique de l’opposition sénégalaise, car les rapports de (l’OFNAC, IGE, CENTIF, COUR DES COMPTES), qui épinglent certains proches du régime ne sont devenu que des papiers de toilette qui ne servent à rien. Par ailleurs, la véritable démocratie doit garantir la justice rendue au nom du peuple sénégalais et sortir de cette machination politique qui ne sert qu’à intimider et à instaurer la tyrannie et un rapport de force insensé. Dans la même veine, la démocratie des valeurs doit promouvoir l’existence d’une société civile solide et une opposition forte qui servent à la fois de contre-pouvoir, mais aussi de contrôle du pouvoir pour éviter certains risques de dérives du gouvernement en place. Mais malheureusement le fait de caser toutes les forces vives de la nation(M23) au palais tout en liquidant l’opposition ne contribue point au renforcement et à la consolidation de la démocratie sénégalaise.

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Par ailleurs ,la véritable démocratie des valeurs  doit favoriser et renforcer la liberté des médias tout en évitant la cooptation de l’élite, car depuis l’accession de Macky Sall à la magistrature suprême ,on assiste à « une presse du pouvoir ».C’est sans doute la raison pour laquelle le Groupe Futur média de Youssou Ndour, le Populaire de Bara Tall, le Quotidien de Madiambal Ndiagne, et le Journal de Libération de Yaham Mbaye sont exclusivement au service du pouvoir en place .C’est d’ailleurs ce manque de neutralité de la presse qui fausse les règles du jeu et qui constitue l’épine dorsale pouvant  salir l’image de notre démocratie car le président Macky est entrain de signer l’acte de décès de la presse sénégalaise. Dès lors, l’interpellation de la CNRA en tant qu’organe de régulation devient une nécessité absolue.

Par ailleurs, la véritable démocratie des valeurs nécessite une prise de distance avec le néo-patrimolialisme mackyste tout en écartant la dynastie Faye-Sall de l’exercice du pouvoir politique, car l’État du Sénégal ne devrait point se réduire à une vache à lait à intérêt mirobolant qui ne sert que des particuliers. Mais malheureusement quand le grand frère gère la plénitude du pouvoir, confie le pétrole au petit frère, et réserve l’hydraulique au beau-frère tout en sachant que certaines directives de nominations ministérielles émanent de la première Dame, c’est parce que  l’instauration de la tyrannie est en cours et suit toute sa logique. En effet, Mbagnick Ndiaye n’a-t-il pas remercié publiquement la première Dame tout en soulignant que c’est à cause de Maréme Faye qu’il est devenu ministre? Bref le partage du pouvoir au sein de la famille se fait au vu et su de tous les Sénégalais.

Dans la même veine, la démocratie des valeurs doit promouvoir la mise en place d’un système électoral transparent. Cela se traduit certainement par l’existence d’une cartographie électorale permettant à chaque citoyen d’identifier l’ensemble des bureaux et centres de vote au sein du pays de même qu’à l’étranger. La persistance des fraudes électorales demeure une triste réalité .C’est ainsi qu’à l’étranger durant les élections  législatives il n’y avait que 553 bureaux de vote pour 200 milles électeurs. Et pour le referendum, on passe de 553 à 1213 bureaux de vote. D’ailleurs c’est ce qui explique l’existence de 660 bureaux de vote fictifs que le ministre de l’Intérieur, le président de la République et la DAF ne peuvent justifier en un si court temps. C’est sans doute ce qui explique que le gouvernement en place pourrait compter sur des fraudes électorales à grande échelle pour se maintenir au pouvoir.

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Dans le même ordre d’idée la démocratie des valeurs, doit favoriser la réforme du code électoral tout en réunissant les acteurs concernés. Par la même occasion, la question du bulletin unique doit mériter l’attention particulière des acteurs politique pour éviter, les magouilles, les achats de consciences tout en favorisant la transparence. De surcroît, l’organisation des élections au Sénégal doit être confiée à une autorité à la fois neutre, indépendante, mais aussi consensuelle et non au ministre de l’Intérieur Abdoulaye Daouda Diallo. C’est par là qu’il faut souligner les efforts d’Abdou Diouf et d’Abdoulaye Wade en nommant le General Cissé et cheikh Gueye comme chargés des élections pour éviter les risques d’un contentieux électoral. Ainsi le président Macky Sall reste muet face à cette question d’importance nationale qui interpelle l’ensemble du peuple sénégalais.

Par ailleurs, l’analyse finirait en mettant l’accent que la démocratie des valeurs doit avoir « une véritable dimension sociale » pour parler comme David Beetham. C’est par là que nos dirigeants doivent formuler des politiques publiques efficaces pour apporter des solutions face à la vie misérable des citoyens. Dès lors, il faut aider les paysans qui souffrent au fin fond du Sénégal tout en apportant une assistance à tous les citoyens. Dans le même ordre d’idée, un regard lucide et un tour dans les prisons deviennent une nécessité absolue, car il me semble que le Sénégal est un pays où la détention est le principe général et la liberté constitue l’exception, car plus de 3000 Sénégalais continuent à croupir dans des conditions carcérales dramatiques, sous détentions provisoires qui ne reposent sur aucune base légale. C’est sans doute en apportant des réponses face à ces questions que nos dirigeants bénéficieront d’une légitimité absolue devant le peuple sénégalais. Dès lors, on sortira de cette démocratie des voyous, pour épouser une démocratie des valeurs accompagnée d’une dynamique de repolitisation démocratique et massive par un peuple capable de prendre sa destinée en main.

MOUSSA KEBE, Étudiant en Science politique (Université du Québec à Montréal)
Membre et Chercheur au GRILA (Groupe de recherches et d’initiatives pour la libération de l’Afrique).
Moussakebe62@gmail.com

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