Le mot n’est trop fort ni déplacé. Il relève d’un fait patent et révulsant.
La trahison dans son acception reliée au contexte de l’affaire Talla sylla, équivaut à un « manquement à la parole donnée, à un engagement, à un devoir de solidarité ». Il faut bien avouer cette vérité : Talla Sylla a trahi Idrissa Seck. Ce dernier a affirmé impassiblement sans être démenti : « Quand Talla Sylla m’a sollicité pour diriger la mairie de la ville de Thiès, je lui ai dit que je ne pouvais pas donner ce poste à quelqu’un qui n’est pas de mon parti. Il a donc accepté d’acheter la carte de Rewmi. Il m’avait encore demandé d’attendre six mois pour officialiser son adhésion. Ce que j’ai accepté ». Par la suite et récemment, Thierno Bocoum a fait une sortie digne pour fermement qualifier ce méfait de « woor » (traitrise), en expliquant lors d’une interview : « Talla Sylla a acheté la carte de Rewmi et c’est devant moi qu’il l’a fait signer par Idrissa Seck ». Lui non plus ne peut être démenti, car ce sont des faits avérés.
Aujourd’hui il annonce qu’il dirigera une liste départementale contre Idy et lance en fanfaron présomptueux : « La bataille de Thiès sera une bataille de clarification. Ce sera un référendum ici à Thiès, pour permettre aux populations de décider si la mairie appartient à quelqu’un ou aux thiessois ». La défiance et la déloyauté sont manifestes. Ce qu’on susurrait sous les toits et concoctait dans les officines présidentielles occultes, se révèle au grand jour en meeting « mackysanement » tendancieux. Apprécions l’ambiguïté du discours digne d’un contorsionniste du maire désigné par les rewmistes de Thiès : « L’objectif de l’Assemblée Nationale, ce n’est ni de soutenir le Président de la République, ni de travailler contre le Président de la République, mais de voter les lois et de contrôler le gouvernement ». Voter au parlement, n’est-ce pas se positionner pour ou contre ou alors s’abstenir par rapport aux projets ou propositions de lois ? Contrôler un gouvernement, n’est-ce pas l’approuver ou le sanctionner ? Talla Sylla invente la notion de député ni-ni. En réalité cette posture mi-chèvre mi-chou est un message destiné à un commanditaire masqué pour un objectif maladroitement dissimulé sous le prétexte fallacieux de la référence au « Askan wi » et qui est de déboulonner Idrissa Seck. Ce subterfuge politique ne trompe personne. La Méthode «mackyavélique » est maintenant connue. Il faut renforcer les chances de Benno sur les bastions électorales détenues par l’adversaire, en activant tout à la fois ses partisans, des transhumants et des taupes sous le couvert des «mouvements citoyens indépendantistes » pour répartir et brouiller le vote des électeurs afin de casser la dynamique des élus de l’opposition.
Mais Talla Sylla est un mauvais choix qui risque de se retourner contre Macky, car l’opportunisme « situationniste », l’instabilité de ses convictions et la « démissionite aigue » sont sa marque de fabrique. Sa trajectoire politique en témoigne. De 1996 à nos jours, il est passé de la Jeunesse pour l’alternance(Jpa), Jëf Jël, l’Alliance Jëf Jël, Wallu Askan Wi et enfin à Ar Sénégal avant de rebondir encore avec Fal Askan wi. Il se positionne toujours en wagon pour s’accrocher à une locomotive qui le pose d’une gare à une autre. Djibo Ka, Abdoulaye Wade et aujourd’hui Idissa Seck ont eu à lui tendre la main pour l’aider à monter dans leurs trains. Mais à chaque étape électorale, les vertiges des tourbillons de la valse l’obligent à descendre du train, pour attendre le prochain qui pense-t-il est le bon qui mène vers le Nirvana. Les populations de Thiès sont très certainement plus conséquentes et ont les pieds plus accrochés sur les terres du Cayor, pour accepter l’aventure de la volatilité politique de cet illuminé.
Idrissa Seck très à cheval sur ses valeurs et principes de bon aloi, se trompe parfois dans ses stratégies politiques, mais toujours de bonne foi. Le problème est que ses « obligés » comme ses « notables conseilleurs » eux, ne sont pas toujours de bonne foi. Si pour lui la politique est affaire de loyauté, pour nombre de politiciens, c’est la déloyauté qui est leur fil conducteur. Ministre, député, maire et autres stations qu’il a fabriquées pour des compagnons qui lui doivent jusqu’aux costumes, ont été transformées en tremplins pour sauter de l’autre côté de la barrière où l’herbe est plus verte. Il faut être mû d’une sacrée foi spirituelle pour rester stoïque face tant d’adversité et de traitrise. Mais il est vrai qu’un coup de poignard dans le dos est donné contre soi-même, car le sang gicle d’abord sur sa propre face. Et comme le disait notre vénérable Sy Dabakh (paix à son âme), la vie ici-bas n’est pas une demeure mais un passage pour aller répondre à l’Eternité. Les honneurs de la politique valent-elles les déshonneurs de la vie ?
Chérif Ben Amar Ndiaye