Pour avoir eu le privilège du vote depuis le 18 siècle, ce millénaire naissant était attendu avec espoir par tout un peuple, guidés que nous étions par « La vision prémonitoire » de notre tout premier magistrat qui promettait de nous hisser à la hauteur de la grande métropole : « Dakar sera comme Paris aux années 2000!», développait-il dans ses discours solennels à la nation. Léopold Sédar Senghor – immortel académicien-, avait déteint sur ses collaborateurs et son peuple, fascinés par la brillance de son statut d’homme d’Etat et d’homme de lettres. Il s’employa à ériger notre première République post coloniale selon les normes universellement admises, avec des institutions solidement constituées, portées par des hommes hautement chevillés.
Espoir légitime donc pour ce peuple altruiste et pondéré toujours présent aux grands rendez-vous des nations du monde, répondant aux appels de liberté et de fraternité des communautés universelles; donnant à chaque fois que de besoin, le meilleur de son patrimoine – ses fils-, aux faits d’armes honorables et reconnus, partout, pour la sauvegarde et le maintien de la paix universelle.
Léopold Sédar Senghor donc, adossé à un héritage colonial conséquent et opérationnel, l’arachide en appoint (le Sénégal étant premier producteur mondial), battit les fondamentaux d’un Etat et favorisa l’émergence de la démocratie, à quelques coudées de son retrait de la vie politique. Par lucidité et sagesse, il fut le premier de ses pairs en Afrique à promouvoir une cession politique générationnelle en cédant le pouvoir à temps, dans une République où toutes les institutions clignotées au vert.
Abdou Diouf, dauphin constitutionnel, grâce à un décret….largement contesté, en fut l’héritier. Cadre achevé du paradigme sociopolitique de la pensée unique (UPS/PS) – et icône d’une administration néo coloniale – (major de sa promotion) ; Abdou Diouf s’employa à consolider les fondamentaux de l’Etat naissant se trouvant à la croisée des chemins : (velléités d’une démocratie intégrale locale) ; récession économique (flambée du pétrole, dévaluation du F CFA et ajustement structurel).
Homme austère, à ‘’l’ennui distingué’’, guindé dans ses stricts « costumes croisés », Diouf érigea un environnement où l’on ne respirait que “l’air d’Etat”. Mais, bien vite, le méticuleux -homme de dossiers-, imprima sa marque à cet héritage « léonin » en déroulant des stratégies politico-politiciennes jusque-là insoupçonnées qui lui permirent d’engranger mandat sur mandat. Bien sûr, c’était au temps de la sécheresse médiatique où : « bonne gouvernance et transparence » n’étaient point la sacristie des Unes d’une presse libre en balbutiement. Le « téméraire » Dansokho qui en fit référence haut et fort, en solo, fut illico presto débarqué de l’attelage du premier gouvernement d’union nationale libéralo-socialiste-communiste.
Abdou Diouf, par la suite, érodé par l’usure d’un pouvoir ankylosé (stigmates de 40 années d’exercice sans partage), perdit les élections au nom de cette démocratie promut par son prédécesseur. L’histoire enseigne que ses dernières énergies furent consacrées à sécuriser la République et l’Etat.
Survint notre première Alternance politique conduite par un homme ayant traversé des générations. Abdoulaye Wade, atypique visionnaire, adoubé par un sursaut populaire, abrogea 40 années de parti unique. Il n’eut que « le temps » comme premier adversaire. Ainsi donc, pour diligenter ses objectifs, le libéral ne s’encombra guère de la sacralité d’une quelconque constitution.
Il la refonda, et souvent, la mise en mouvement pour valider ses quelques entorses institutionnelles ; il aimait à dire « Nous vivons un monde de vitesse où, ne pas faire vite, c’est céder sa place à d’autres ».
Il entreprit beaucoup, fit rêver et put, «malgré une gouvernance fort[A1] mouvementée, cristallisée par la corrosivité d’une presse (cette fois plurielle et active), surfer sur 2 mandats avant d’en être culbuté par une puissante lame de fond populaire sur fond de (« touche pas à ma constitution »), effrayé par ce qui bruissait dans l’air : « Un 3eme mandat ou dévolution monarchique » et bien sûr l’historique bourde verbale: « Ma waxon waxeet!».
Wade, perdit les élections un 25 mars et sans fioritures ni tortuosités, s’empressa de vite féliciter son vainqueur, fidèle à ses professions de foi : « Je ne marcherai pas sur des cadavres pour le palais….Je ne ferai pas moins que Senghor et Diouf »
La République et l’Etat furent une fois de plus sauvegardés et sécurisés. Les rênes confiées – ô symbole – à un homme né après les indépendances, celui qui eut l’outrecuidance de reléguer aux oubliettes son mythique maitre et son ravageur slogan :SOPI !
Macky Sall, «The realy man born to be President »pour paraphraser l’autre, arborant à merveille la posture de la plus « emblématique victime » de ce que d’aucuns qualifiaient de « dérives libérales », hérita d’un contexte national caractérisé par de fortes perturbations et mutations sociétales et politiques qui lui furent providentiellement, favorables:
§ Les Assises nationales dont l’objectif global était « la Refondation de la République » ;
§ Une jeunesse effervescente dopée par des rappeurs écorchés vifs ;
§ Un déficit énergétique endémique.
Ainsi donc, le moins attendu des présidentiables, auréolé d’un halo de symboles dérivés d’une trajectoire personnelle atypique, sut tirer son épingle du jeu et put distancer ses protagonistes, en devenant, le 4ème Président le mieux élu de toutes nos républiques. L’homme y mit, tout de même, du sien en déclinant une vision : «synthèse de ses (03) trois tournées dans le Sénégal des profondeurs ».
La tonalité du triptyque de sa profession de foi « (i) La patrie avant le parti ; (ii) la réduction du mandat présidentiel ; (iii) la reddition des comptes » amplifiée par la sentence d’un de ses tous premiers discours : « Ma première mission sera de construire un Etat de droit et non de construire des ponts et chaussées » ; convainquirent les plus sceptiques que (La République et l’Etat) avaient trouvé son « bodyguard »).
La sincérité et la sagesse de ses proclamations, ne souffraient d’aucun iota de doute, l’homme voulait incarnait et vivifiait « l’exception sénégalaise ». Mais, c’était sans compter avec les inévitables périodes de clashs entre « les honorables engagements et le réalisme militant » survenant toujours après les torpeurs enivrant des premiers jours de gouvernance. Sans mettre de gant, le plus visible, le plus tonitruant de tous : son « mentor des premiers jours sombres» le sorti de sa candide solennité :« Macky Sall Bou mou niou fonto, nous sommes au pouvoir…da nouÿ noce ! ».
L’homme récidiva encore et encore par la suite sur maints engagements pré ou post campagne électorale du Président :
-La réduction du mandat présidentiel – « cela n’engage que Macky, nous ferons face ! »
-L’attribution de la Présidence de l’assemblée nationale – « cela ne m’engage pas, je fais face! »
Paradoxalement, passé les cris d’orfraies ‘’mesurés’’ des militants, cette rébellion, telle (une prémonition), anticipa sur le déroulement des événements : Macky se rectifia (constitutionnellement) à propos de la réduction du mandat et du par la suite négocier ferme avec -le récalcitrant- pour la présidence de l’assemblée).
Cette attitude de déviance (même feinte) du « pistoléro-aboyeur », tapissa le lit d’un long fleuve agité de dérives qui coule encore de nos jours et où beaucoup d’entre eux, vinrent se gargariser pour divers motifs créant un delirium collectif récurrent. Macky très tôt sevré des effets d’un « état de grâce », fut au four et au moulin, avec d’interminables rappels à l’ordre et des psalmodies sur la discipline et du parti et de la citoyenneté.
A peine n’eut-il crié : « Arrêter…Pour la République ».
Trop d’écarts, de dérives verbales et comportementales « Apéro-Aperistes » (Il serait besogneux et époustouflant de les passer en revue), qui assombrissent toute la symbolique du « Premier Président né après les Indépendances » ; porteur d’espoir et de ruptures profondes.
Des ruptures imperceptibles; non pas que Macky ne puisse les (promulguer); Il en a les capacités eu égard à son exceptionnel parcours. Ne fut-il pas le seul à sortir indemne du « Triumvirat filial libéral » qui tint la république en haleine de 2004 à 2008. Les deux autres s’étant soit (embourbés), soit (embastillés-inéligibles). N’a-t-il pas avec tact et doigté apprivoisé tous les dinosaures politiciens « ante-indépendance » qui désormais, somnolent sur de moelleux strapontins, sans oublier, les plus invétérés et emblématiques contempteurs de son prédécesseur (presse et société civile), aujourd’hui, se prélassant dans sa proximité!
Les jours et années à venir seront déterminants pour le peuple au vu des jeux et des enjeux politiques qui clignotent. Mais, particulièrement pour le « Premier » d’entre nous qui, pour magnifier son quinquennat, proclama le 25 mars 2017 : « J’ai fait en 5 an, ce que tous mes prédécesseurs ne firent en 50 ans ».
Qu’à cela ne tienne ! Mais peut-on vraiment occulter les ombrageuses prémices d’un avenir si incertain que des voix autorisées, pour la première fois au Sénégal « prophétisent » de syndromes de “Guerre civile” si nous ne faisions l’effort d’une introspection collective durable. Puisse le 4ème Président fasse autant que ses prédécesseurs qui, à leur corps défendant et en dehors de tout intérêt crypto personnel, s’employèrent à:‘’La sauvegarde et à la transmission de la République et de l’Etat.’’
Moustapha DIOP
Vision Citoyenne