Mes chers compatriotes, ce TER est un scandale, un scandale gravissime dont nous allons payer les sottes conséquences pendant de longues années. Un TER sur 57 kilomètres dont on nous dit qu’il sera électrique et atteindra une pointe de vitesse de 160 km /heure ! Un TER unique en Afrique de l’Ouest, ajoutent-ils ! Des milliers de nos villages sont plongés dans l’obscurité dès la tombée de la nuit, ainsi que nombre de quartiers dans nos villes. Un TER qui traverse 14 gares entre son point de départ et son point d’arrivée ! Où va-t-il développer cette vitesse dont nos gouvernants se vantent ?
Ce TER va nous coûter les yeux de la tête : 560 milliards de francs Cfa. Bien plus à l’arrivée, affirment certains observateurs bien avertis. Les mêmes observateurs sont formels : avec autant de milliards, on peut réhabiliter une partie importante de notre chemin de fer en agonie depuis de longues années. Ainsi, au moins Dakar-Saint-Louis, Dakar-Kaolack, l’embranchement Kaolack-Guinguinéo pourraient être réhabilités et les nombreuses gares qui les jalonnent ressuscitées. On se rappelle que tout au long des chemins de fer, l’arrivée des trains donnait lieu à d’intenses activités économiques. Les milliards engloutis dans ce TER incertain pourraient aussi désenclaver la région naturelle de Ziguinchor par le train qui transporterait voyageurs et diverses marchandises (fruits, produits de la mer et de l’agro-industrie, bois, charbon, riz, etc). Ce train ferait de la Casamance un pôle de développement prospère qui donnerait du travail à toutes ses filles et à tous ses fils.
Le TER du président-politicien est donc un mauvais choix, un gâchis dont le seul objectif est de frapper l’imagination des populations aux environs de janvier 2019, le même objectif que s’étaient assigné Wade-pére et Wade-fils, quand ils construisaient ce fameux tunnel de Soumbédioune. Ce tunnel long de 300 mètres et qui nous a coûté 9 milliards et que rien ne justifiait sur le plan technique. Wade-père et Wade-fils se vantaient, eux aussi, d’avoir réalisé le premier tunnel d’Afrique de l’Ouest.
Nous pouvons exprimer les mêmes regrets pour ces 460 milliards du pauvre contribuable qui vont être engloutis dans l’Autoroute »Ila Touba », dont la réalisation est confiée aux Chinois. Longue de seulement 112 kms, elle relie Thiès à Touba, à travers un terrain plat, sablonneux, sans autres obstacles que quelques rares arbres. Selon de nombreux spécialistes, 416 milliards, c’est exorbitant pour cette autoroute, surtout s’ils la comparent à de nombreuses autres construites notamment au Maroc à travers des chaînes de montagnes et au Nigéria qui a construit un TGV long de 187 Km pour un coût de 552 milliards de francs Cfa. «Ila Touba» coûte donc trop cher. C’est un mauvais choix, un choix politicien, un investissement plus de prestige que de développement. Avec les 50 ou 60 milliards au plus – et encore -, la route existante pourrait être réhabilitée, élargie avec deux parties à deux ou trois voies, qui contournerait Bambey et Ndoulo, Diourbel l’étant déjà. En outre, si les populations de Touba avaient été consultées, elles auraient sûrement opté pour l’assainissement de la ville, l’extension du réseau électrique qui sortirait des ténèbres les nombreux quartiers périphériques, l’eau potable à la place de l’eau contaminée qu’elles boivent tous les jours. Elles auraient préféré des routes, des centres de santé, des marchés. Une autorité religieuse bien placée m’a parlé d’une abondante nappe d’eau douce située à 5-7 Km de la ville, à Touba Bogo exactement si mes souvenirs sont exacts. Selon ce chef religieux, une étude a montré qu’avec deux milliards, toute la ville pourrait être alimentée à partir de la nappe. L’autoroute «Ila Touba» pouvait donc attendre. Les milliards gagnés – 350 à 360 – seraient consacrés à d’autres priorités. Dieu sait qu’il n’en manque pas dans ce pays.
Des investissements politiciens, calculés, notre président-politicien en raffole. Pour prendre un autre exemple, 60 milliards – sans doute plus – ont été engloutis dans la construction du Centre de conférences internationales Abdou Diouf de Diamniadio. Les travaux ont été confiés aux Turcs. C’était pour accueillir la conférence de l’Organisation internationale de la Francophonie qui pouvait bien être accueillie par l’Hôtel King Fahd, qui en a accueilli de bien plus grandes. Rien ne pressait donc, rien ne justifiait la construction de ce Centre. Combien de forages, d’écoles, de centres de santé pouvait-on construire avec autant de milliards ? Combien de villages pouvait-on doter d’énergie électrique ?
Le pauvre contribuable s’interroge encore sur les 19 milliards (déclarés) investis dans la «réhabilitation» du Building administratif confiée à un «vendeur de carreaux», qui «a eu l’intelligence de nouer un partenariat avec des Italiens, nous a-t-on jeté à la figure. Nous pensions à l’époque, et de nombreux compatriotes avec nous, qu’avec un peu plus d’efforts, une cité ministérielle pouvait être construite à Diamniadio qui a le vent en poupe. Quelque temps après, les autorités annoncent la construction concomitante d’une cité ministérielle dans la localité préférée, qui reçoit l’essentiel des investissements du président-politicien : des centaines, voire des milliers de logements et de bureaux annoncés, un marché international, l’Université Amadou Matar Mbow pour 65 milliards, etc. Signalons la Zone économique spéciale à quelques encablures. Diamniadio va donc grandir, grandir, grandir. Nos autorités qui sont plus des politiciens que des hommes d’Etat, ne se rendent même pas compte – les pauvres – que Diamniadio, c’est presque la banlieue de Dakar qui étouffe, avec ses embouteillages-monstres et sa pression foncière à nulle autre pareille. Dakar concentre, en effet, 80 pour cent des activités économiques du pays, sur ses 550 km2, soit 0,33 pour cent seulement de la superficie totale du territoire national. Nos autorités y ajoutent en concentrant pratiquement l’essentiel des investissements à Diamniadio et alentours. L’Université Amadou Matar Mbow et nombre d’autres infrastructures auraient dû être prévues au centre d’un triangle formé par Thiès-Diourbel-Mbour, ou encore Thiès-Diourbel-Louga.
Pendant cinq ans donc, le politicien Macky Sall a réalisé des infrastructures, des infrastructures coûteuses, à mille lieues de nos priorités et pour l’essentiel confiées à des étrangers (Français, Marocains, Chinois, Turcs). Pour l’essentiel, la réception de ces infrastructures de prestige est prévue pour les trois mois qui précèdent l’élection présidentielle de 2019. Et il déroule tranquillement sa feuille de route, face à une opposition qui ne donne pas l’impression de mesurer à sa juste valeur l’ampleur des enjeux, la gravité des périls qui pèsent sur notre pays. Une opposition frileuse devant certaines questions encore considérées comme taboues. Ainsi, on l’entend rarement s’exprimer avec fermeté sur certains investissements, notamment sur l’Autoroute »Ila Touba » et les milliards incontrôlés consacrés à la construction d’infrastructures coûteuses, dans le cadre de la modernisation des cités dites religieuses. En attendant que l’opposition devienne plus vigilante et plus offensive, les populations qui écrivent l’histoire doivent s’inscrire massivement sur les listes électorales et retirer tout aussi massivement leurs cartes le moment venu.
Salutations respectueuses à tous et à toutes !
Mody NIANG