« Le fatalisme a des limites. Nous devons nous en remettre au sort uniquement lorsque nous avons épuisé tous les remèdes. » – De Gandhi / Lettres à l’Ashram
De culture renforcée dans une forte croyance, l’homo senegalensis a tendance à renvoyer tout ce qu’il pose comme acte positivo-négatif et/ou qui lui arrive vers le Bon Dieu, en se référant, à chaque fois et littéralement, à ces expressions en wolof : “Yalla bakhna et/ou Yalla ko dogaal”. Ainsi, notre destin, certes déterminé inconditionnellement par la volonté divine, repose maintenant sur un fatalisme notoire. De ce fait, pour se justifier dans un pays composé de plus de 95 % de musulmans, nous nous focalisons uniquement, et surtout lorsque cela nous arrange le plus, sur la IIIe sourate du Coran où il y est mentionné qu’à la suite du revers militaire subi à Uhud, durant la guerre sainte en 625 apr. J.-C., et à la démoralisation de certains partisans défaitistes affirmant urbi orbi que « les nôtres n’auraient pas été tués ici s’ils nous avaient écoutés », Mahomet (Psl) rappelait souvent : “L’heure de notre mort est inconditionnellement fixée par Dieu de sorte que nous mourons à l’heure dite, quoique nous ayons fait, que nous soyons restés chez nous ou que nous avons livré bataille. Notre sort est fixé indépendamment de nos efforts et de notre activité”. Or, il nous est également indiqué dans les sourates 67/2 : «Celui qui a créé la mort et la vie afin de vous mettre à l’épreuve : lequel d’entre vous est meilleurs en actes» et 18/7 «Nous avons fait de ce qui est sur la terre une parure pour elle afin de les mettre à l’épreuve : lequel d’entre eux est meilleur en actes», que la vie est aussi une occasion d’épreuves pour l’homme.
En partant de là, nous sommes dorénavant amenés à choisir, par notre volonté, entre les différentes possibilités qui s’offrent à nous. Autrement dit, nous devons agir, en tant que gérants, sur tout ce qui nous entoure, notamment la nature, la société et même nos propres cœurs. Et pourtant, au regard de certains comportements, on pourrait nettement en déduire que la plupart de nos actes s’appuie véritablement sur un fatalisme à outrance, défini comme tel : (mot formé à partir du latin fatum) : le « destin ». Lequel est une doctrine selon laquelle le monde, dans son ensemble, et l’existence humaine, en particulier, suivent une marche inéluctable (fatalité) où le cours des événements échappe à la volonté humaine.
En illustration par ordre d’ampleur, ces différentes catastrophes humaines survenues depuis 1992 et quelques comportements notés par-ci par là, en raison d’un manquement criant du sens de la “notion de gérance” :
– Naufrage du bateau le Joola survenu le 26 septembre 2002 vers 23h : catastrophe maritime sans précédent, devant même le fameux Titanic (1513 morts) avec 1863 victimes officiellement déclarées (plus de 2000, selon les experts, car il était surchargé de plus de trois fois le nombre normal de passagers). Causes avancées parmi tant d’autres : surcharge, insuffisance de canots pneumatiques (2 seulement trouvés en place sur un paquebot de 76,50 m (hors-tout) et incompétence professionnelle et des encadrants et des intervenants au moment des secours. Pour couronner le tout, de simples sanctions de principe en lieu et place de pénales, requises en de pareilles circonstances avec une complicité sournoise du régime d’alors ;
– Explosion d’une citerne d’ammoniac à la Sonacos un jour de Ramadan du 24 mars 1992, en plein jour. Ce jour-là, par négligence humaine, en quelques secondes, une quarantaine de personnes, dont une vingtaine d’ouvriers de la Sonacos, périssent sur le coup sous les flammes avant que le nombre des victimes, accentué par un nuage toxique, n’atteigne les 129 morts, compte non tenu des milliers de rescapés répertoriés après et vivant, s’ils n’ont pas encore rejoint les morts, avec un handicap respiratoire à vie… Pour causes, en plus de la négligence humaine notée, les spécialistes considèrent que le risque demeurera plus que certain (80 %) dû fait à la cohabitation entre les populations et les unités industrielles. Et cela, malgré les feuilles de route existantes en matière de prévention. Le constat est amer au vu de la situation toujours d’actualité ;
– Les routes transformées en mouroir : En 2016, pas moins de 600 morts ont été enregistrés sur les routes. Ainsi, l’insouciance, l’indiscipline et le laxisme des usagers de la route (conducteur, passager, piéton…), en toute complicité avec des agents de la circulation, sans aucune probité, sont les principales causes de ces “suicides volontaires”. Malheureusement, la “tolérance zéro”, principal axe de communication des autorités de tutelle, est devenue un simple slogan plus qu’un objectif réaliste ;
– Incendie de Médina Gounass 2017 : Daaka passe de l’herbe à l’humain malgré les tentes ignifuges mises à la disposition des pèlerins. L’incendie, survenu le mercredi 12 avril 2017, au «Daaka» (retraite spirituelle), occasionne près d’une trentaine de décès et plus de 70 brûlés. D’aucuns pensent que les forces de sécurité et sapeurs-pompiers n’étaient pas à la hauteur pour faire face aux flammes (nombre insuffisant pour les premiers et faute d’eau pour les seconds), d’autres parlent d’un court circuit électrique où de l’explosion d’une bonbonne de gaz ou encore du mégot de cigarette d’un jeune fumeur. L’un dans l’autre, l’inconscience et l’insouciance citées précédemment reviennent à nouveau ;
– Chavirement de la pirogue de Bettenty (Toubacouta) : lundi noir dramatique du 24 avril 2017 avec 21 morts, 1 disparu et plus de 50 personnes en état grave. Drame dû à une surcharge de 42 personnes au moins, du nombre requis de 30 ; compte non tenu du poids des marchandises transportées (huîtres). Là également, l’insouciance et l’inconscience y interviennent à fond ;
– Effondrement d’un mur de la tribune découverte suite à une bousculade au stade Demba Diop : la finale du 15 juillet courant de la coupe de la Ligue de football, opposant les clubs de l’Us Ouakam et de Mbour, tourne en drame avec au moins 8 morts par asphyxie et une centaine de blessés. Pour le moment, l’indiscipline caractérisée de certains supporters serait à l’origine de cette “intifada” ;
– État de vétusté des routes, des véhicules et le fatalisme humain, notamment l’acceptation de surcharges systématiques occasionnant les occupations des marches pieds, dans les moyens de transport, constituent un véritable casse-tête pour les autorités africaines, car d’ici à 2030, si cela continue comme tel, les accidents de la route représenteront, selon les prévisions, la septième cause de mortalité.
Au regard de tous ces éléments d’appréciation, nous voyons clairement que l’insouciance, l’inconscience et l’indiscipline, ponctuées d’une dose consistante de fatalisme, sont les facteurs principaux de ces différents drames.
Par ailleurs, si nous revenons, par exemple, sur le récent événement du stade Demba Diop, nous constatons, avec tristesse, que notre article publié le 24 novembre 2016 et intitulé “Recrudescence de la violence : et si on était tous responsables ?” est plus que d’actualité. Il y était indiqué que “notre société s’est souvent aventurée dans la violence sans s’en rendre compte ! Cette violence se manifeste par nos paroles, nos actes, nos révoltes ou encore nos pensées. Dès que l’on cherche à la contenir ou à la canaliser, elle resurgit ailleurs, sous une autre forme. Aujourd’hui, elle est omniprésente : il suffit d’ouvrir le journal, l’Internet, la radio ou la télévision pour le constater. Dans la rue, au travail, au sein de la famille, nous pouvons tous subir l’agressivité des autres, quand elle ne vient pas de nous-mêmes”. Nous y rappelâmes également que “pour n’avoir pas su sérieusement insister sur les notions de respect des règles de vie sociale, de discipline, de participation, de solidarité et de responsabilité à travers une bonne éducation inclusive sur les lois et les règles qui fondent une société”, nous préférons toujours procéder au “médecin après la mort” où croire, comme souligné dans les Mémoires sur les sciences occultes, parus en 1912, du grand philosophe allemand Arthur Schopenhauer, “à la croyance à une providence spéciale ou encore à une conduite surnaturelle des événements qui font la trame de notre vie individuelle. Cela a été de tout temps une croyance populaire et que même parfois on trouve solidement enracinée dans les cerveaux pensants, éloignés de toute superstition, et même sans aucun rapport avec n’importe quels dogmes donnés”
Alors qu’il nous disait aussi que “s’il est vrai que le hasard domine le monde, l’erreur partage sa royauté”. Et dans beaucoup de cas, osons le dire, en l’espèce, par exemple, la faute prend le dessus sur l’erreur ; d’où cet intérêt capital, pour une meilleure vie en parfaite harmonie de la communauté, de rétablir, avec rigueur, les lois et règlements et de surtout prévenir, par la dissuasion, en réprimandant sévèrement au besoin, au lieu de passer derrière à corriger afin de redorer le blason de notre cher pays à travers un “Ndeup national” sous forme d’introspection qui, nous pensons, permettra enfin de codifier les bonnes mœurs de notre société connues d’antan.
Qu’Allah Swt veille sur notre cher Sénégal… Amen
Elhadji Daniel SO
Président d’En Mouvement ! Défar Sénégal
Ensemble, Construisons le Sénégal !
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