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Le Franc Cfa Ou Le Symbole D`une Colonisation Cynique: Chronique D`une Veille Arnaque

« Donnez moi le contrôle sur la monnaie d’une nation, et je n’aurai pas à me soucier de ceux qui font ses lois ». Mayer Amshel Rothschild (1743-1812)

De Thomas Sankara à Sylvanus Olympio, en passant par Modibo Keita, les figures emblématiques de l’Afrique libre qui ont croisé le fer, sans succès, avec le Franc CFA, font florès. Ces dernières qui avaient refusé de courber l’échine devant cette forme d’ humiliation que rien ne justifie, ont tracé la voix de la lutte contre l’asservissement et de la domination.

Ils ont œuvré pour une Afrique debout au péril de leur vie, car ils avaient compris le sens de la dignité et de la liberté dans le devenir d’une nation.

Le 25 décembre 1945, la France a créé le franc CFA, le jour où elle a ratifié les accords de Bretton Woods. Cette monnaie est utilisée, aujourd’hui, par 15 Etats, dont huit en Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina Faso, Côte-d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo), six en Afrique centrale (Cameroun, République centrafricaine, République du Congo, Gabon, Guinée équatoriale et Tchad) et l’Union des Comores, utilisant le franc comorien. Ces pays forment la zone PAZF (Pays africains de la zone franc).

Après des siècles de domination, alors que chaque nation du monde se prévaut maintenant avec fierté, d’une dignité égale à celle de ses pairs, l’Afrique continue encore, avec une pusillanimité déroutante, à accepter d’être sous tutelle française, sans gêne aucune.

Au nom de quoi, du haut de son arrogance, la France continue-t-elle de contrôler la monnaie de 15 pays africains, soit 100 millions d`habitants ?

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Oui, osons le dire sans ambages : Le Franc CFA est une monnaie à la fois avilissante et condescendante, le symbole le plus rayonnant de l’Afrique soumise, de la pérennisation de la colonisation sous une pire forme. Cette monnaie coloniale, au-delà des considérations économiques, est une insulte à l’Afrique indépendante, une entorse à la souveraineté et à la dignité des Etats africains.

Signifiant à la base, « Franc des Colonies Françaises d’Afrique », puis à la faveur des indépendances, « Franc de la Communauté Française d’Afrique », le changement de dénomination n’enlèvera en rien, les propensions colonialistes et dominatrices de cette monnaie.

Aujourd’hui, on emprisonne Kemi Seba qui a commis une infraction contre la loi pénale, mais que fait-on de la France qui commet et continue de commettre encore une infraction contre notre souveraineté, contre notre dignité ? Le combat de Kemi et son indignation sont justes. Le procès intenté contre lui ne sera pas le sien, mais celui du franc CFA, celui d’une grande machine d’arnaque cynique.

Ne pas s’émouvoir, ni s’indigner du contrôle de notre monnaie par la France, c’est non seulement cautionner une arnaque à grande échelle, mais aussi courber l’échine devant une forfaiture inédite. Cette monnaie qui nous est attribuée de force, n’est même pas produite en Afrique mais, plutôt en France avec un taux largement inférieur à l’euro (1franc –> 0.0015€).

La France elle-même, est consciente de bafouer notre souveraineté monétaire, car elle avait subi le même sort de la part de l’Allemagne d’Hitler pendant l’occupation allemande. L’occupant nazi, dont l’objectif était de subordonner les ressources françaises à la machine de guerre allemande, avait mis en place une monnaie d’occupation qui obligeait les français de s’y soumettre.

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Ces derniers qui ont tout fait pour s’en débarrasser veulent nous imposer, aujourd’hui, le même système que nous acceptons sans lever le petit doigt.

Il n’est nul besoin d’être un brillant économiste pour sentir l’odeur de l’arnaque qui empeste du franc CFA. Comment peut-on parler d’émergence et de souveraineté alors que la France contrôle trois banques centrales africaines (BEAC : Banque des Etats de l’Afrique Centrale, BCEAO : Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest, BCC : La banque centrale des Comores), où chacun de ses représentant au sein de ces banques, dispose d`un droit de veto qui lui permet de s’opposer à toute décision portant atteinte à ses intérêts ?

Comment peut-on parler d’indépendance alors que les Etats membres de la zone franc déposent sur les comptes du Trésor français, la moitié de leurs réserves de change ? En clair, 50 % des réserves du Franc CFA doivent être déposées sur des comptes du trésor public français (en 2005, cela représentait environ 76 000 000 000 euros de bénéfice pour la France).

C’est sans doute une chimère de rêver d`émergence tant que l’Afrique n’aura pas un contrôle effectif sur sa propre monnaie, tant que l’Afrique n’arrêtera pas de se contenter d’une indépendance formelle, qui nous asservit et nous ridiculise dans le concert des nations.

La monnaie est un instrument de pouvoir, c’est-à-dire un outil de gouvernement et de construction d’une légitimité… En tant qu’institution sociale fondamentale, celle-ci met en jeu beaucoup plus que de simples échanges marchands soutenait, Jérôme Blanc, Professeur de sciences économiques à Sciences po Lyon. Il va alors sans dire que libérer l’Afrique du franc CFA, n’est plus aujourd’hui, une option, mais un impératif, un préalable à tout plan d`émergence.

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Abdoulaye FALL

Doctorant en Droit à l`UCAD

abdoulaye91@hotmail.fr

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