« Ils veulent tous ce qu’il veut. Ils ne sont pas avec lui. Ils ne se rangeront jamais derrière lui. Ils n’ont aucune preuve de son innocence »
Le sens sacerdotal de l’action politique est tristement faussé au Sénégal. La classe politique est bigarrée. Sans aucune orientation programmatique fondée sur la responsabilité et la vérité, elle se perd dans une fourberie de boulevard et fait tomber ses masques. Les acteurs politiques, selon qu’ils sont avec le pouvoir ou contre le pouvoir, versent dans une tartuferie qui faut partager entre le rire et la rage.
L’un des principes fondamentaux de l’action politique est l’accès au pouvoir pour une gouvernance soumise à une obligation de résultats et de reddition des comptes. Mais ce principe est tronqué. Le cas de Khalifa Sall et Cie l’illustre. Ceux qui les soutiennent ne font que combattre le pouvoir sans en vérité croire en ce qu’ils disent.
Khalifa Sall est soumis à une reddition de comptes comme tout acteur politique et tout citoyen ayant entre ses mains des responsabilités de gouvernance. Une démocratie de valeur a besoin d’une autorité qui la régisse en garantissant la vie ordonnée et droite de la communauté par un contrôle régulier et normal de l’usage du bien public. Se donner l’image d’un messie aux mains propres est une bonne stratégie de communication.
Mais cette stratégie n’est pas un panégyrique « d’inculpabilité ». En politique, derrière un ange artificiel se cache toujours un démon prédateur. C’est la seule justification de l’enrichissement ostentatoire de certains acteurs politiques et de moyens spectaculaires dont il bénéficie en un temps record.
La culpabilité de Khalifa Sall dans la prédation de finances dûment attribuées pour des cas sociaux spécifiques n’est pas encore prouvée. La présomption d’innocence est un atout juridique. Mais elle ne blanchit pas et ne disculpe pas
Ceux qui apportent un soutien politicien à Khalifa Sall commettent le péché de la fausseté. Ils veulent tous ce qu’il veut. Ils ne sont pas avec lui. Ils ne se rangeront jamais derrière lui. Ils n’ont aucune preuve de son innocence et ne partage avec lui qu’une recette : l’animosité contre le détenteur du Pouvoir. Ce serait donc une tragédie politique s’il s’avère que le Maire de Dakar est fautif et responsable d’un usage désinvolte des finances publiques mises à sa disposition.
Rendre compte : une question de dignité
L’Association des Maires du Sénégal a au moins eu la présence d’esprit de prendre du recul parce que déjà surprise par le contenu du rapport de l’IGE. Mais de futurs candidats de l’opposition aux Législatives et à la Présidentielle s’empestent dans des sorties au vitriol et un soutien spontané avec pour cible Macky Sall qui a commis l’erreur de vouloir une gouvernance vertueuse soumise à une reddition de comptes.
Cette reddition de comptes est valable pour tous et pour chacun, de son camp comme de l’opposition car il y va de sa crédibilité et du respect de son serment. Les jours et les mois qui suivent verront bien la résolution d’un Président de la République à imposer dans la culture de gouvernance la transparence et l’usage vertueux des finances publiques.
Au-delà de la dimension morale, rendre compte est une simple question de crédibilité, d’honneur et de dignité. Mais la seule évidence qui s’impose actuellement est la fausseté d’une certaine classe politique qui, dans le secret de son soutien volontairement aveugle à Khalifa Sall et Cie, sait parfaitement que le cas de Khalifa Sall est surprenant et suspect. Dût-il s’ériger en martyr pour en tirer le simili d’un présidentiable.
Babacar Mbengue
Journaliste / Consultant en Communication Politique et Relations Publiques