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Une Magistrature Outragée, La Justice Humiliée (par Ibrahima Sadikh Ndour)

Il y a trois jours, le 06 décembre, au siège du Comité national provisoire (CNP) chargé de gérer la lutte a eu lieu une rencontre ubuesque : le promoteur de lutteur Luc Nicolaï, entre Khalifa Dia de l’écurie de Fass et Double Less de l’écurie de Guédiawaye, régularisait le combat prévu le 31 mars 2018 entre Gris Bordeaux et Balla Gaye 2. Toute la presse en a fait ses gros titres avec des photos à l’appui. La veille, il a signé un contrat accordant l’exclusivité de la retransmission de ses combats à la SenTV du groupe D-Médias au détriment de la TFM du Groupe Futurs Médias. Avec le caractère ostentatoire imprimé à ses faits et gestes, on croirait avoir affaire avec une personne ordinaire, un citoyen modèle, un homme d’affaires tranquille sur qui ne pèse aucune contrainte ni charge de nature légale. Or, c’est tout à fait le contraire !

Luc Nicolaï : condamné à la prison ferme avec mandat d’arrêt

Faut-il rappeler que c’est ce même Luc Nicolaï qui a été lourdement condamné, le 24 octobre 2017, à 5 ans d’emprisonnement dont 1 an avec sursis des chefs de détention de drogue, association de malfaiteurs et complicité de tentative d’extorsion de fonds ? La chambre correctionnelle de la Cour d’appel de Saint Louis, statuant sur renvoi après cassation, avait rendu cet arrêt assorti d’un mandat d’arrêt, immédiatement exécutoire, qui enjoignait aux auxiliaires de justice ainsi qu’aux agents de la force publique de l’arrêter et de le conduire à la maison d’arrêt de Saint Louis. C’est encore frais dans nos esprits les manchettes de la presse à l’annonce du verdict : « Luc Nicolaï recherché par toutes les polices du Sénégal ».

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Au lendemain du verdict, des personnes sulfureuses et opportunistes étaient montées au créneau pour le défendre à travers d’interventions intempestives dans la presse et de conférences de presse. Elles ont poussé le bouchon trop loin jusqu’à mettre en doute le bien-fondé de cet arrêt rendu par la Cour d’appel de Saint Louis. Nous ne nous rappelons pas, qu’il y ait eu une seule personne, une seule autorité qui s’était levée pour défendre la justice et protéger les magistrats qui avaient rendu cet arrêt. Même l’Union des magistrats sénégalais (UMS), d’habitude très prompte à se fendre de déclarations pour fustiger les attaques contre ses membres, s’était signalée par son silence assourdissant.

Luc Nicolaï en liberté : un sacré coup porté à la justice et aux magistrats

Il est vrai que l’un des avocats de Luc Nicolaï, Me Boubacar Cissé (le même, avocat de l’État dans l’affaire Khalifa Sall) avait aussi dit, qu’ils (les avocats) vont se pourvoir en cassation pour suspendre la décision car, selon lui, le mandat d’arrêt ne peut être exécuté. En conséquence, son client pourra continuer à vaquer à ses occupations notamment en peaufinant l’organisation du combat prévu le 31 mars 2018.

Cette affirmation paraît péremptoire et ne correspondrait pas à la réalité du droit positif sénégalais. En effet, la Loi organique n° 2017-09 du 17 janvier 2017 abrogeant et remplaçant la loi organique n° 2008-35 du 08 août 2008 sur la Cour suprême dispose en ses articles 36 et 71-1 que le pourvoi n’est pas suspensif pour les mandats de dépôt ou d’arrêt décernés en matière pénale sauf, d’une part, en ce qui concerne les condamnations civiles et, d’autre part, l’existence de dispositions législatives contraires. Par conséquent, il est clair et évident que le mandat d’arrêt décerné contre Luc Nicolaï continue à produire ses effets en dépit du pourvoi introduit par ses avocats.

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Pourquoi Luc Nicolaï n’est pas arrêté alors que si c’était un citoyen lambda nous verrions la police ou la gendarmerie débarquer et le cueillir manu-militari avec diligence ?

En fermant les yeux et en refusant de l’arrêter et de le conduire à la maison d’arrêt de Saint Louis, on s’oppose à la justice. On fait outrage à des magistrats qui rendu un verdict au nom du peuple sénégalais. On humilie toute la justice sénégalaise. Si on voulait la ridiculiser, il n’y aurait pas une meilleure manière de le faire, car le message qu’on envoie au peuple est limpide comme l’eau de roche : vous êtes opposant au Président Macky Sall et à son régime, la géhenne vous attend ; vous êtes du bon bord, ne vous privez de rien, faites ce que vous voulez rien ne vous arrivera. L’UMS ne doit pas accepter de se faire ridiculiser de la sorte. Elle doit sortir de son mutisme et surtout rassurer le peuple dans la façon équitable de distribuer la justice à l’orée d’un procès hautement politique, celui de Khalifa Sall, dans lequel la magistrature risque d’être la principale perdante.

Ibrahima Sadikh NDour

ibasadikh@gmail.com

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