(1) la genèse
Les crises scolaires quasi permanentes préoccupent tout le Monde, chacun s’en émeut, l’apprécie selon son niveau d’information et jette l’anathème soit sur l’Etat soit sur les syndicats d’Enseignants. Il faut dire qu’elles sont devenues une caractéristique de tous les systèmes éducatifs de la plupart des Pays en Développement depuis la période des Ajustements Structurels qui ont visé en priorité les secteurs sociaux à rentabilité économique différée (Santé et Education).
Ces Ajustements présentés comme incontournables, étaient accompagnés jadis de théories démagogiques sur les structures, les profils et les méthodes d’Enseignement, développées par la Banque Mondiale et qui en définitive se sont révélées être aux antipodes d’une Education de qualité et attentatoire à la dignité de l’Enseignant. Pour faire passer la pilule la Banque Mondiale en plus d’y conditionner l’Aide Publique au Développement, s’est appuyé sur des mercenaires-experts recrutés au sein des systèmes éducatifs.
C’est pourquoi la source du mal qui continue à gangréner tous nos systèmes éducatifs, reste leur mise sous perfusion financière permanente par les Institutions internationales (BM et FMI), situation qui a résulté en un déficit de constructions de salles de classe, de recrutement et de Formation adéquate d’enseignants de qualité. Ainsi s’est constituée au fil des Ans un décalage entre l’offre d’ Education et la demande, donnant naissance aux nombreux Abris provisoires, une sédimentation de corps atypiques d’Enseignants ; sans statuts ni formation adéquate (volontaires, vacataires, contractuels etc…), En définitive tous ces artifices télécommandés par les institutions de Breton Woods se sont avérés un coktail explosif de Revendications sociales, corporatistes essentiellement orientées vers les conditions d’existence et de Travail .
2) La nature
La plupart des Revendications posées par les Organisations syndicales sont justes et légitimes et au-delà de l’impression monopolistique qu’elles peuvent donner à d’autres franges de la population, elles participent d’une exigence de rattrapage humaniste, de mise à niveau aussi bien des Acteurs que du système lui-même, pour assurer la qualité et permettre à notre Ecole d’être le levier essentiel du Développement. Elles tournent essentiellement autour de la carrière, de la rémunération, des conditions de Travail, de gestion démocratique et participative de la carrière et du système. Des grèves suivies de négociations sanctionnées par des protocoles d’accords souvent non respectés, ont jalonné l’évolution mouvementée du système. C’est donc des impératifs financiers auxquels nos pays en voie de Développement ont toujours été confrontés qui constituent la véritable Chappe de plomb que seule la fibre patriotique et nationaliste nous permettra de soulever.
3) la gestion
a) Responsabilité des gouvernements précédents
La gestion à la fois de ces crises, des Syndicats et de leurs Revendications, n’a pas toujours été faite dans la rigueur, la rationalité et l‘orthodoxie administratives, mais plutôt sur des bases émotionnelles, de calculs et de manœuvres politiciennes qui ont fini de créer, un désordre, une surenchère et une cacophonie syndicale débouchant surtout sur de multiples Accords irréalistes, signés parfois à des centres de décisions différents.. Cette situation s’est accentuée avec la première alternance où l’on a connu la fragmentation de plusieurs cadres syndicaux et une inflation d’organisations syndicales d’enseignants dont certains ont été créées ou parrainés à des fins de positionnement par des responsables politiques.
Il n’était pas rare que des responsables politiques intercèdent au prés de l’autorité pour que celle-ci s’engage sans se soucier de la Faisabilité d’un tel engagement. Cela a été le cas avec la validation des Années de volontariat et de vacation des enseignants reclassés fonctionnaires ou pas dont toutes les conséquences n’ont pas été bien cernées par le Pouvoir d’alors. Le traitement indemnitaire, partial en faveur de certaines catégories au détriment d’autres, par ce régime, créant iniquité, frustrations au sein de l’architecture de la Fonction publique, a été la goutte de trop qui a fait déborder le vase en milieu Enseignant. Cette disparité criarde au sein de notre Administration pour des Agents de même hiérarchie, créée au mépris de la loi par l’ancien Président, constitue un casse –tête Chinois dont la solution n’est pas pour Demain.
b) Responsabilité du Gouvernement actuel ?
Au nom de la continuité de l’Etat la deuxième alternance de 2012, héritant du brulot qui a failli débouché sur une Année blanche, avait décidé de faire un Etat des lieux de tous les Accords signés avec les Syndicats par les régimes précédents et s’est aussitôt engagée à solder tout le passif de ces Accords mais aussi à ne plus signer, dorénavant, que des Accords réalistes et réalisables. En donnant des instructions à son Gouvernement de ne plus signer que des ACCORDS « réalistes et Réalisables » il le disait au-delà de l’Engagement premier de solder tout ce qui était passif. C’est cet engagement qui a été matérialisé dans le fameux protocole du 17 Février de 2014 qui ne contient aucun engagement nouveau.
qui n’ait pas été pris par les régimes précédents ou bien en résulterait. Il faut aussi le préciser, chaque question dans ce protocole, retenue comme Accord, a fait l’objet de traitement et des propositions de mise en œuvre retenues d’accord parties. IL se trouve que pour la mise en œuvre de certains Accords, l’Etat ne peut pas seul prendre l’initiative, il a besoin d’être aiguillonné par les syndicats dont le rôle ne doit pas seulement consister à poser des problèmes mais aussi à indiquer des pistes de solution, ce qui n’est souvent pas le cas Aujourd’hui, faute d’expertise syndicale.
IL s’y ajoute que la mise en œuvre de certains Accords, comme l’extinction du corps des Instituteurs Adjoints, La Formation diplômante et le reclassement de tous le maîtres contractuels et professeurs contractuels dans des corps à hiérarchie supérieure, la validation, le reclassement universel ont eu des effets boomerangs et des impacts imprévisibles sur les Finances Publiques et faisant monter du coup le volume de la masse salariale qui crève le plafond de la norme de convergence de l’UEMOA, fixée à 35%
Il faut donc rendre à César ce qui appartient à César et reconnaître que le Gouvernement de Benno bookk yaakaar a fait des miracles dans le domaine de l’Education en honorant des Engagements pris par ses prédécesseurs, restés à l’Etat pendant des décennies, au regard du contexte économique Mondial et de l’Etat des Finances publiques légué par le régime sortant (caisses vides). L’.on ne peut pas non plus cracher sur les efforts consentis en termes de Réformes structurelles et d’investissements massifs dans l’Enseignement Supérieur (infrastructures). C’est des centaines de milliards qui sont engloutis en seulement cinq ans, c’est peut être l’entrée par les infrastructures conforme à la structure du PSE en son axe UN, qui reste incompris par les Enseignants, voir tous les Travailleurs dans la rue qui s’impatientent de passer à l’axe II du PSE (protection sociale des Ressources Humaines).
Je l’ai dit dans un précédent article que ce que Wade a réalisé dans le secteur de l’Education en matière de construction de classes, n’importe quel citoyen à la tête de l’Etat durant cette période qui a coïncidé avec la grande initiative de la communauté internationale en faveur de l’Ecole et « de l’Education pour tous », depuis Jomtien 1992, puis Dakar 2002, aurait fait autant ou mieux. C’était la période de grâce et de rectification d’option de la Banque Mondiale, après les dégâts innommables causés par les Ajustements structurels. C’est cette initiative arrivée à terme en 2015 que les Présidents Macron et Macky Tentent de relancer en Février à Dakar, avec le Partenariat Mondial pour l’Education
Quid de cette volonté manifestée de rationaliser le Dialogue social avec les Acteurs par la satisfaction d’une vieille demande aussi bien des syndicats que de toute la communauté éducative, par l’organisation transparente d’Elections de Représentativité syndicale dans le secteur pour y ramener l’ordre ?
4) Quelle solution à la crise ?
Aussi bien l’Etat que les Syndicalistes et leurs mandants doivent toujours tenir compte de leur Responsabilité sociétale, pour toujours créer un espace de dialogue, de concertation permanente autour des questions de l’Ecole et dans ce cadre la Revendication sur la Gestion démocratique qui figure dans toutes les plateformes et qui était un acquis dont la Commission nationale a toujours constitué un instrument technique de pilotage du Système. Elle ne devrait souffrir d’aucune tergiversation du Ministère pour être restaurée.. Beaucoup d’outils avec lesquels le système fonctionne ont été élaborés au sein de cette Commission.
Le Gouvernement doit garder le cap de la mise en œuvre de tous ces Accords qu’il a hérités des régimes précédents tout en ne succombant pas à la pression , au risque de déconstruire les équilibres macro-économiques ou d’hypothéquer certains projets vitaux. A l’avenir le Gouvernement doit éviter de donner des prétextes faciles à la grogne syndicale pour des questions d’intendance comme les indemnités de participation aux examens ou des retenues injustifiées sur les Revenus qui portent préjudice aux acteurs. Pour les perturbations entamées cette année à part ces deux incidents malheureux et regrettables et l’alerte pour le Recrutement d’Enseignants en nombre suffisant, en tant qu’observateur avisé sur les questions syndicales et de l’Ecole, ma part de vérité est que, rien dans les Relations entre le Pouvoir actuel et les Syndicats d’enseignants, ne peut justifier un bras de fer dont pourrait souffrir des innocents. IL faut arrêter cette grève, aller à la table de négociations avec des propositions de solutions pertinentes et réalistes aux questions non encore résolues et ne jamais cracher sur un acquis, mais plutôt voir les voies et moyens de l’améliorer.
J’ose seulement espérer que ni un contexte politique si sensible soit-il ou des schémas stratégiques de survie, de baroud d’honneur pour les uns et de confirmation de leadership pour les autres, au sortir des Elections de Représentativité, ne puissent être une motivation profonde de toute cette fébrilité de responsables syndicaux et du bouillonnement indescriptible de l’espace syndical, ce serait périlleux l’action syndicale et par ricochet sur notre Démocratie. Ne franchissons pas le Rubicon
Les Syndicats doivent intégrer dans leur analyse le contexte régional et Mondial, revenir à la Raison pour arrimer les prétentions aux possibilités du ¨Pays, et en éviter de tomber dans le populisme et l’extrémisme syndical.
Waly Ndiaye
Syndicaliste, ancien SGA SUDES, Ancien Coordinateur des Revendications, Sudes, CSA, Ancien Coordonnateur commissions techniques Cadre unitaire des Syndicats d’Enseignants (CUSE), Ancien Conseiller Ministère Fonction Publique, Travail, Dialogue Social, Organisations professionnelles et Relations avec les Institutions, Témoin des tous les Accords signés depuis 1989.