Le Train express régional (Ter) reliant Dakar, Rufisque, Diamniadio, l’aéroport international Blaise Diagne et, dans un proche avenir, Mbour et Thiès, répond assurément à la modernisation des transports ferroviaires et participe de façon notable au développement humain durable du Sénégal. Avec un investissement de plus de 600 milliards de F Cfa grâce au concours de partenaires du Sénégal (Bid, Bad, Afd, gouvernement du Sénégal, gouvernement de la France), l’effectivité d’un transport ferroviaire rapide vient à point nommé dans le processus actuel de développement intégré et harmonieux du Sénégal.
En effet, la mobilité dans les agglomérations des régions de Dakar et Thiès polarisant pratiquement 40% de la population sur moins de 4% du territoire national, est à la fois une demande sociale urgente et une question économique essentielle, au vu des nombreux embouteillages qui font perdre plus de 150 milliards de F Cfa par an à l’Economie nationale, en plus des effets de nuisance sur la santé publique des populations, sur l’environnement, de risques plus importants d’accidents de circulation et de nombreux autres goulots d’étranglement. La région de Dakar étant une presqu’ile inextensible au point que l’espace pour de nouvelles infrastructures routières devienne nul, seule la voie ferroviaire s’offre comme alternative crédible et présente un avantage comparatif et compétitif pour relever les défis actuels que pose la mobilité urbaine et interurbaine dans la zone. Nous nous souvenons qu’à son temps, le Président Wade avait imaginé la desserte par voie maritime de localités par des bateaux ‘taxis, notamment entre Dakar, Rufisque et Mbour pour résoudre la question de la mobilité. Toutefois, le projet de bateaux taxis reste non viable sur de courtes distances dans une presqu’ile, si ce n’est pour la satisfaction de la demande marginale de transport maritime de plaisance sur l’axe.
Avant les années 2000, les moyens de transports dans les pays comme les nôtres étaient moins nombreux et plus collectifs qu’ils ne le sont aujourd’hui avec la surproduction de voitures dans le marché mondial résultant de l’arrivée de nouveaux constructeurs de véhicules comme la Chine, l’Inde, le Brésil ou l’Afrique du Sud. Aujourd’hui, il y a une popularisation de la voiture à la portée du Sénégalais moyen au point que l’immobilisme caractérise quotidiennement le décor de la circulation routière urbaine et interurbaine dans nos grandes agglomérations, réduisant considérablement le temps de travail de la population active.
Si bien que la promotion, la rationalisation et la modernisation des transports ferroviaires dans notre pays permettra, de façon efficace et efficiente, le transport optimal de personnes et des biens, au moins sur l’axe Dakar Mbour Thiès où sont concentrés quasiment 80% des structures institutionnelles, industrielles, halieutiques ou touristiques, de service ou de commerce.
La grande innovation consiste de faire rentrer le Sénégal, pour la première fois en Afrique de l’Ouest, dans la civilisation du train rapide à traction électrique avec deux voies à écartement standard pouvant être utilisées en même temps par des trains à traction thermique sur un parcours entre Dakar-Aibd via Rufisque, Diamniadio, extensible à moyen terme jusqu’a Mbour et Thiès, à l’image de l’autoroute à péage. La garantie de temps de parcours et le niveau de confort et de sécurité, répond à la variation sensible à la hausse de la demande de transport et, au report modal dans nos agglomérations engluées dans des externalités négatives liées au transport routier actuel.
La réalisation du Ter permettra aussi la réhabilitation de riches patrimoines historiques de plus d’une dizaine de gares, mais aussi, la restructuration et l’intégration des collectivités locales traversées dans le tissu urbain moderne par de grands travaux d’assainissement avec soixante sept ouvrages d’art et plus de trente passerelles pour la mobilité des populations. Actuellement, les travaux d’érection d’un grand canal longeant la voie ferrée pour assurer la connexion avec les canaux transversaux ceinturant la ville de Rufisque, contribuera assez sérieusement à régler l’épineux problème de l’assainissement dans cette vieille ville et à l’accompagnement du développement de l’occupation foncière et des zones économiques.
Il s’y ajoute la création d’un centre de maintenance et d’une école de formation technologique aux métiers modernes du chemin de fer, participant ainsi à la valorisation du capital humain pour de nombreux emplois induits.
Nous assistons, avec la réalisation de ce projet innovant et structurant, à une rénovation véritable vers la modernité des chemins de fer du Sénégal dont l’histoire glorieuse aura chevillé la vie économique, sociale, politique et syndicale de notre pays et du Mali, depuis le siècle dernier.
La réhabilitation des chemins de fer du Sénégal est assurément une œuvre colossale révolutionnaire au vu du lien ombilical et du rôle que ce mode de transport peut tisser entre les villes du Sénégal pour consolider l’intégration économique nationale et sous régionale, notre seule voie de sortie.
Les détracteurs du projet posent souvent des questions d’opportunité résultant de la confusion entre les problématiques urgentes relevant du court terme et dont les solutions sont urgentes et celles relevant du long terme, à l’image de la réhabilitation du Dakar-Bamako qui demande des volumes de financement dix fois plus importants, si on voudrait intégrer l’innovation technologique dans le transport ferroviaire pour être compétitif. Ce sont là de fausses analogies, comme celles qui évoquent la question de l’endettement, car, s’endetter pour investir dans des projets porteurs, c’est s’enrichir et se développer.
Nous saluons la pleine implication de la France dans la réalisation du projet et de son importance marquée par la visite du Président Macron de la maison du Ter pour un co-développement véritable entre nos deux pays ouverts sur le monde, unis par l’histoire et la culture.
Kadialy GASSAMA
Economiste
Rue Faidherbe X Pierre Verger
Rufisque