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Karim Wade Après Abdoulaye Wade Et Macky Sall ! Serions-nous à Ce Point Maudits ?

Celui que l’on appelle Karim Meïssa Wade, le digne fils de son père, a été au cœur de l’actualité le lundi 5 février 2018. La Une de nombreux quotidiens n’en avait pratiquement que pour lui, pour la délégation qu’il a envoyée le «représenter» au Colloque international «Islam et paix», sa «contribution» audit colloque qui était d’une «haute portée scientifique». Il signe ce texte : «Karim Meïssa Wade, candidat du peuple aux élections présidentielles de 2019». Ce garçon n’a pas d’oncle. Amul  nijaay, comme on dit en wolof. S’il en avait vraiment, il se serait passé de sa «délégation» et de sa «». Je ne m’attarde pas sur ce cinéma. Livré à lui-même, il ne serait pas capable d’écrire un seul paragraphe du texte qu’on lui prête. Je ne m’attarderai pas non plus sur certains préalables qu’il devrait régler pour valider son hypothétique candidature à l’élection présidentielle du 24 février 2019 ni, par ailleurs, sur les limites objectives à cette candidature. Un vieil ami m’a marché sur la plume – si je puis m’exprimer ainsi – et s’en est chargé dans sa rubrique hebdomadaire «Les lundis de».

A supposer que rien ne s’oppose à la candidature de Karim Wade à l’élection présidentielle du 24 février 2019, comment ses frères du Pds justifient-ils leur choix ? Qu’a-t-il de plus que tous les autres membres qui ont blanchi sous le harnais de ce parti ? De quelles qualités ce garçon peut-il vraiment se faire prévaloir pour prétendre aux hautes fonctions de président de la République ? Qui connaissait ce garçon avant le 19 mars 2000 ? Si, par extraordinaire, sa candidature était acceptée et qu’il fût capable de communiquer avec les électeurs dans les deux langues nationales les plus parlées au Sénégal, quel bilan leur présenterait-il pour les convaincre de voter pour lui ?

Ce garçon a été d’abord nommé Président du Conseil de surveillance de l’Agence nationale pour l’Organisation de la conférence islamique (Anoci). Il a été ensuite bombardé ministre du «ciel et de la terre». Ce garçon-là, nous l’avons vu à l’œuvre pendant plusieurs années ! Le père, qui n’a pas réussi à nous l’imposer comme son successeur, ayant été balayé le 25 mars 2012, l’imposera plus tard comme candidat  de son parti à l’élection présidentielle de 2019. Six ans après, ses frères du Pds maintiennent cette candidature et crient partout que, malgré sa condamnation par la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei), il «est blanc comme neige».

Karim Wade blanc comme neige ! Je fais table rase de l’acte de la Crei qui l’a condamné, puisque cette Cour serait politique et mise en place pour éliminer un adversaire dangereux. J’en fais de même du livre «Contes et mécomptes de l’Anoci» de l’ancien journaliste Abdou Latif Coulibaly. On entend souvent les «Karimistes» crier sur tous les toits qu’aucune structure de contrôle n’a jamais mis en cause la gestion de leur mentor. Ils racontent manifestement des histoires, soit par malhonnêteté, soit par ignorance.

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C’est vrai que pendant au moins quatre ans, ce garçon a géré de façon presque discrétionnaire et écrasant au passage le Directeur exécutif (Abdoulaye Baldé) nommé pour la galerie, des centaines de milliards, sans jamais rendre compte et sans qu’aucune structure de contrôle n’ait osé fouiner dans cette gestion. Il a fallu attendre le départ du pouvoir du père pour qu’une mission de l’Inspection générale d’Etat (Ige) passât en revue cette gestion discrétionnaire. Dans son «Rapport public sur l’état de la gouvernance et de la reddition des comptes» (juillet 2014) qui couvre la période 2004-2009, les contrôleurs de l’Ige ont mis en évidence, dans sa gestion, des  «cas illustratifs de mal gouvernance financière». Ils ont ainsi constaté, relativement au fonctionnement de l’Agence, de graves manquements qui seuls, suffiraient à envoyer le garçon à Rebeuss.

Les contrôleurs de l’Ige se sont notamment arrêtés sur les investissements prévus et ont constaté que :

1 – Les infrastructures hôtelières n’ont pas été réalisées, encore moins les villas présidentielles dont la construction avait été prévue et budgétisée (26 milliards de francs Cfa étaient annoncés pour la construction de ces fameuses villas) ;

2 – Si le projet routier de l’Anoci a certainement contribué à améliorer la mobilité urbaine dans l’agglomération dakaroise, sa réalisation a occasionné de nombreux manquements dont les suivants :

  1. a) – l’absence fréquente d’études d’avant-projet, laquelle a conduit à des modifications qui ont renchéri le coût des ouvrages. Le tunnel de Soumbédioune est l’exemple-type d’infrastructure réalisée sans étude d’avant-projet. C’est en cours de chantier que sa réalisation a été décidée, pour frapper l’imagination des Sénégalais. Long seulement de trois cents (300) mètres, il nous aurait coûté 9 milliards de francs Cfa alors que, techniquement, rien ne le justifiait vraiment.
  2. b) – des violations du Code des marchés publics, notamment le défaut de mise en concurrence dans la rénovation de l’Hôtel King Fahd Palace (ex-Méridien Président) sur financement du Royaume d’Arabie saoudite, pour un montant de cinq milliards trois cent cinquante-trois millions quatre cent quarante-deux mille huit cent six (5 353 442 806) francs Cfa. Quand le rapport de l’Ige a été rendu public, cette rénovation à plus de 5 milliards a soulevé un tollé général d’étonnement et d’indignation à King Fahd Palace, où on se demandait légitimement où étaient passés ces milliards. A l’époque, la presse s’était fait l’écho de ce scandale gravissime.

Au total donc, poursuivent les contrôleurs de l’Ige, dans la plupart des cas, les imperfections notées dans les études techniques préalables ont abouti à des défauts d’exécution majeurs et à de nombreuses modifications ayant entraîné des avenants et des marchés complémentaires. Toutes ces limites ont engendré, au regard de la qualité et des coûts des infrastructures réalisées, un véritable problème d’efficience.

La boulimie financière du futur candidat du Pds a aussi entraîné des surcoûts exorbitants. A titre d’exemple, pour réaliser une infrastructure routière à Dakar (dans le cadre de l’Anoci), il avait demandé un devis à l’un de nos entrepreneurs qui lui en présenta un de seize (16) milliards de francs Cfa. Le garçon le trouva insuffisant et lui demanda de forcer l’addition jusqu’à vingt-deux (22) milliards. L’entrepreneur refusa net cette ignominie et le futur ministre du «ciel et de la terre» sollicita un autre qui accepta l’offre et ajouta six (6) milliards au «maigre» devis du premier. Ce refus marqua d’ailleurs le début de ses déboires avec la tortueuse gouvernance des Wade. Nous le connaissons personnellement. Son entreprise employait au moins six mille (6 000) compatriotes avant le 19 mars 2000. Le père et le fils ont décidé de le détruire, en même temps que les milliers de pères de famille qui travaillaient dans son entreprise. Le président-politicien n’a rien entrepris pour réparer cette injustice flagrante. En tout cas, pas à ma connaissance.

Pour revenir à l’Ige, l’attention de ses contrôleurs a été aussi retenue par ce fameux bateau-hôtel «Msc Misca», loué à cinq milliards neuf cent trois millions six cent treize mille (5 903 613 000) francs Cfa. Or, ce fameux bateau loué à ce montant exorbitant pour sept jours, est reparti au bout de seulement trois. Et, pendant que ce fameux bateau était loué à ce coût-là, des hôtels réquisitionnés à Dakar comme dans la zone de Saly, restaient désespérément vides, ou occupés par des non ayants droit. Le bateau-hôtel grand luxe n’a, lui non plus, reçu aucun hôte de marque. Il a satisfait plutôt la curiosité de quelques Dakarois. Six milliards de francs Cfa pour seulement une présence de trois jours au Sénégal ! A qui fera-t-on avaler que les propriétaires du fameux bateau ont encaissé seuls six milliards, sans renvoyer l’ascenseur à qui de droit ? Rien que ce forfait gravissime devrait coûter plusieurs années de prison au fils de son père.

L’examen des états financiers de l’Anoci a fait ressortir d’autres graves anomalies parmi lesquelles :

1 – l’achat d’un luminaire à 8 782 610 francs CFA, ainsi que de deux appareils photos Canon et de trois objectifs pour un montant de 26 103 276.

2 – l’utilisation autorisée par le Conseil de surveillance de cartes de crédit bancaires pour le Président dudit Conseil (Karim Wade) et le Directeur exécutif (Abdoulaye Baldé). Si M. Baldé n’a pas utilisé sa carte, le fils de son père (c’est mon expression, pas celle de l’Ige) a fait largement usage de la sienne, du 22 août 2005 au 28 août 2007, pour honorer un montant total de dépenses de 276 millions de francs Cfa. Sans justification. Ces millions se sont volatilisés, comme le sont les milliards avec lesquels on devait construire les villas présidentielles, rénover le King Fahd Palace, louer le fameux bateau «Msc Musica», etc.

Il convient de rappeler aussi que,  quand il a été nommé Président du Conseil de surveillance de l’Anoci, le fils de son père a aménagé et équipé ses nouveaux bureaux, dans un immeuble tout neuf (Immeuble Tamaro), pour 750 millions de francs Cfa. On n’oubliera pas, non plus, qu’à l’avènement de la seconde alternance, le Premier ministre de l’Economie et des Finances du gouvernement Abdoul Mbaye, M. Amadou Kane, a révélé que les voyages de Karim Wade à bord de leur jet privé (à lui et à Abbas Jaber) nous ont coûté douze (12) milliards de francs Cfa. Douze milliards pour faire le tour du monde pendant six ou sept ans ! Que personne ne me rétorque que c’était pour aller chercher de l’argent pour le pays ! Le ministre Amadou Ba, qui n’est sûrement pas un ami, fait entrer beaucoup d’argent dans le pays, même si son utilisation pose parfois des problèmes d’efficacité, de pertinence. Et, pourtant, il ne voyage pas en jet privé. En tout cas, pas à ma connaissance.

C’est ce garçon que le Pds présente comme candidat à la prochaine élection présidentielle. Le seul fait d’être le digne fils de son père le disqualifie. Ce père qui a dilapidé l’essentiel de nos maigres réserves foncières, mis sens dessus dessous notre administration, détraqué notre système de rémunération des agents de la Fonction publique, fabriqué des milliardaires qui, avant le 19 mars 2000, étaient de parfaits inconnus tirant carrément le diable par la queue. L’exemple le plus frappant, le plus inacceptable est cette dame qui, entre 2000 et 2012, a amassé une fortune estimée à 47 milliards de francs Cfa. Le plus surprenant, le plus étonnant encore c’est qu’un tribunal a choisi de décerner le non-lieu et de restituer ses biens à cette dame, institutrice adjointe de son état quand elle démissionnait-il semble qu’elle ait quitté la Fonction publique – tout en sachant qu’elle ne peut pas gagner honnêtement un seul milliard en une dizaine d’années. Un milliard, c’est quand même mille millions !

Nous en avons assez de tels gros scandales qui continuent de plus belle encore avec la gouvernance meurtrie du président-politicien. Ne sommes-nous pas suffisamment punis par Dieu ou, du moins, suffisamment punis par nous-mêmes pour envisager un seul instant l’éventualité d’une élection d’un Karim Wade, après son digne père et son digne «frère» ? Nous serions alors vraiment maudits et mériterions le sort de Sodome et Gomorrhe. Nous devons nous employer sans tarder, à tourner définitivement la page sombre des gouvernances socialiste et libérale ; de la gouvernance libérale en particulier avec Wade, ses fils (le biologique comme les autres) et tout individu qui y a écrit un seul paragraphe.

 

Mody NIANG

Mody NIANG

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