Jour funeste et triste festoyé dans une drôle de franquette pour certains. Jour de gloire embuée dans une vaine gloriole pour d’autres. Me demande et par tous les dieux et démons de la terre à quoi rime le 4 avril dans l’imaginaire collectif de ce Sénégal-là. En effet, en 58 ans d’indépendance et rien de concret dans la gibecière ! Un peuple dans la douleur, endormi voire couché. Ce peuple à la parlotte très facile et peu enclin à l’action. Un peuple où du jour au lendemain, l’on se réveille du bon pied, oups du mauvais pied, à la science infuse et l’on peut se permettre de diriger le monde de demain. Drôle de destin commun.
Hélas, ce que je vais dire, choque tout un peuple abonné absent au cercle des décideurs de ce bas monde. Nous sommes un peuple de moutons. Une kyrielle d’ovidés qui se cherche. Même moi, le pauvre mouton du désert, je me cherche et n’arrive pas à distinguer l’abattoir du vert pâturage. Je suis écartelé entre deux cultures. Le « je », ce n’est pas seulement destiné à ma pauvre personne mais à tout un peuple, perdu à jamais dans ses repères historiques et sociaux. En effet, ce qui fait de nous d’authentiques sénégalais, nous l’avons perdu et à jamais. Et depuis belle lune ! En fait, ce qui fait de nous d’homosenegalsensis, n’existe point et cela je peux mettre ma main dans le feu de l’enfer pour le prouver. Nous mangeons, buvons et réfléchissons occidental. Même le sénégalais des champs a perdu ses propres repères et quant au sénégalais des villes, il a perdu son âme. L’éternel dilemme entre le rat des champs et celui des villes. Rire sous cape. Nous sommes les damnés de la terre de Frantz Fanon, l’excellent romancier antillais que j’appelle, l’éternel incompris. Toujours à rebours de la pensée collective et ô combien une source d’éveil de la conscience des peuples noirs. La conscience violée des pauvres esclaves et insoumis que nous sommes. Cri de joie.
Cri de peine. Mais à quoi rime ce 4 avril, bon dieu ? L’on ahane depuis ma tendre enfance passée entre mes deux chers terroirs, Rufisque et Bargny, que le 4 avril est notre jour de gloire festoyée, pour nous sénégalais. Le jour où le peuple, uni tel un homme, debout, dit non au général de Gaulle, le roi de France. Dixit les anciens, sous l’arbre à palabres. De Gaulle, notre papa chéri. Le grand homme. Permettez-moi de pousser un lol. Un rire jaune mêlé à de la douleur, je dirais.
Pauvres de nous ! Peuple larvé dans une dépendance inouïe ! Peuple à la conscience silencieuse et ne jouissant plus de ses droits les plus élémentaires. Regardez autour de nous et amusez-vous à faire un sondage sur cette soi-disant indépendance que nous avons arrachée de la douce France. En effet, vous serez les premiers déçus de l’heure. Ce peuple qu’on disait flamboyant ne l’est plus. Il est devenu un pauvre manguier au goût amer, perdu dans ce harmattan sec qui balaie les visages dépenaillés de beaux traits et à tout bout de champ. Ce peuple volant au gré du vent et ne sachant plus sur quel pied trépigner.
Le 4 avril est un festin d’hyènes! Moi, personnellement, je me fous de cette date ô combien symbolique dans notre mémoire d’insoumis ! Drôle de foutaise ! Le Sénégal, pour ceux qui connaissent sa vraie histoire, est indépendant depuis des lustres. Ce brave peuple auréolé d’une gloire d’antan et à jamais perdue. Et que nous rapporte in fine cette date symbolique ? Et demandez cela au poète-président, Léopold Senghor, plus roi que le roi lui-même ! Plus français que le français lui-même et qui ne nous a apporté que la culture et ses dérivés. Peu de concret. Mais oui, Senghor nous a arrosés de culture et surtout celle du colon. Et Abdou Diouf, ma foi, celui qui ne devrait pas être président, un soi-disant Etat de droit et de démocratie, toujours scellé au modèle occidental comme si les nègres que nous sommes ne connaissons rien à la notion d’Etat et de peuple. Et Abdoulaye Wade, un Etat de développement dans un état de décomposition et de corruption généralisée. Et quant à l’actuel président, Macky Sall, en bon actionnaire de l’Etat français, l’histoire le jugera même s’il est loin des préoccupations du peuple qui l’a porté au cénacle.
Mais ce peuple a bon dos et est très résilient. En effet, nous avons toujours nié notre raison d’être oubliant que l’Afrique a été un peuple de lumière. Le brave Cheikh Anta Diop en sait quelque chose. Merci à cet artiste-là, combattu en son temps et étant éternellement incompris. Ce 4 avril, je ne cesserai de le combattre même si c’est une date auréolée d’une gloriole. Décidément, nous sommes un peuple à la ramasse voire inculte. Ne nous voilons pas la face ! Dire les choses telles qu’elles se dessinent à nos yeux, c’est une vraie vérité. Redondance ! Je joue avec cette figure de style parce qu’elle sert de pédagogie et de catharsis. L’éveil des consciences citoyennes. Gageons que cette date sera un triste souvenir de la mémoire collective pour la vaillante descendance, fruit de notre travail actuel. Mais bon, nous avons ce que nous méritons. Drôles de leaders politiques, drôle de peuple ! Qui n’a pas chien chasse avec gros minet ! Comprenne qui pourra !
POUYE Ibra
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