Lors d’un point de presse, tenu récemment sur des questions d’actualité, le candidat Idrissa Seck a insinué des idées dangereuses concernant le vrai lieu de pèlerinage des musulmans et l’historique de la question palestinienne. Spéculant sur la différence entre «Makkah» et «Bakkah», le candidat Seck tranche, tel un savant en la matière : «Dieu, dans le Coran, ne parle pas de Makkah, mais de Bakkah, qui renvoie étymologiquement aux pleurs, pourquoi est-ce qu’on penserait que le lieu de pèlerinage serait la Mecque et pas Jérusalem. Moi, j’ai la preuve de l’endroit exact où c’est, mais j’en parlerai à vous deux réunis : Israéliens et Arabes…», déclare péremptoirement oustaz Idrissa Seck qui banalise la question palestinienne et verse dans une apologie du judaïsme qui frise un délire sioniste.
Selon M. Seck, «Le problème palestinien se résume à de petites querelles (de doomu baay) entre demis frères rivaux…»
Les propos gravissimes de M. Idrissa Seck n’auraient jamais attiré mon attention si ce dernier n’aspirait pas à la candidature présidentielle de 2019. Quand on a la prétention, même illusoire, de diriger le Sénégal, l’on doit se méfier de parler à tort et à travers, notamment sur des questions aussi importantes que l’endroit de pèlerinage de la communauté musulmane agréé par Allah le Très Haut, et la question palestinienne. La première erreur grotesque de Idrissa Seck est d’avoir dit : «Dieu, dans le Coran, ne parle pas de Makka, mais de Bakka…» Dans la sourate 48 (Al Fath), verset 24, Allah Swt dit : «C’est lui qui a écarté leurs mains de vous et vos mains d’eux, en plein centre de Makka, après vous avoir accordé la victoire sur eux…» Dans plusieurs autres versets, Allah, Swt parle de Makka par différentes autres appellations, signifiant toutes le même endroit qui se trouve en Arabie.
Dans la sourate Ali ‘Imran, verset 96, Allah Swt utilise le mot «Bakka» pour désigner le lieu où se trouve la Ka’ba : «La première maison qui a été édifiée pour les hommes, c’est bien celle de Bakka que nous avons bénie et en avons fait une direction pour l’univers.»
Dans la sourate Ash-shoura (la concertation), verset 7, Allah Swt parle de la Mecque en usant du terme : Oummoul Qoura (la cité mère) : «Voici un livre béni que nous avons fait descendre, confirmant ce qui existait déjà avant lui, afin que tu avertisses les habitants de la cité mère et leurs voisins aux alentours.»
Dans la sourate Ibrahim, verset 35, Allah Swt l’appelle «Al Balad» (la bourgade) : «Et rappelle-toi lorsque Ibrahim dit : ‘’Ô mon seigneur, fais de cette cité un lieu sûr, et préserve-moi ainsi que ma progéniture de l’adoration des idoles’’», etc.
Cette fausse version que véhicule M. Seck est empruntée aux apôtres du sionisme, tel David Belhassen et Cie qui tentent de faire croire aux musulmans que la vraie Qibla, c’est plutôt vers Jérusalem et non pas la Mecque. Cette thèse fallacieuse est d’autant plus dangereuse qu’elle semble dire aux musulmans : voilà des siècles que vous vous trompiez de Qibla et de lieux de pèlerinage.
L’autre thèse non moins insidieuse consiste à vouloir banaliser une question aussi centrale que celle palestinienne : «Le conflit israélo-arabe se résume à de petites querelles de demi-frères rivaux», dixit Idrissa Seck.
Cette nouvelle posture pro-sioniste bizarre qu’affiche audacieusement le candidat Seck le disqualifie logiquement de la course à la Magistrature suprême aux yeux de nombreux concitoyens. Dire aux Sénégalais que vos ancêtres et anciens guides religieux s’étaient trompés de Qibla et qu’au lieu de la Mecque ils auraient dû se tourner vers Jérusalem est assurément un blasphème qui heurte la conscience des croyants sénégalais. De même, vouloir banaliser le conflit israélo-arabe pour lequel le Sénégal, à l’instar de la communauté internationale, a longtemps consenti des sacrifices énormes, en acceptant, entre autres, de présider depuis sa création, il y a plusieurs décennies, le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du Peuple palestinien. M. Seck ignore-t-il la géopolitique à ce point ?
Je ne pourrai le croire, en revanche je n’exclurai pas que M. Seck travaille pour des lobbies sionistes qui tentent de saper, par la voie politique, les bases fondamentales de nos croyances profondes.
J’invite les Sénégalais qui auraient été séduits par les spéculations trompeuses de Idrissa Seck de se raviser avant qu’il ne soit trop tard. La spéculation mercantile, enrobée dans des versets et hadiths faussement interprétés, ne doit plus tromper personne. De par son discours, M. Idrissa Seck joue la carte des sionistes.
Mamadou Bamba NDIAYE
Ancien Ministre des Affaires religieuses
ndiabamba1949@gmail.com