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Lettre D’un étudiant à Son Père

Cher papa,

Me voilà dans un autre monde,un autre univers où tout m’est étranger,un monde dont vous et moi avions tant rêvé croyant que c’etait la porte de la réussite, or tout devrait recommencer .Les ambitions sont pleines ,mais les études supérieures demandent de la responsabilité, de l’abnégation ,du courage surtout.Oui ! le courage parce que nos rêves avant le BAC ne sont qu’illusions et desespoirs ,les choses ne se passent pas comme nous les imaginions,de ce fait,il me faut se battre pour ne pas revenir bredouille.

Les conditions sont tellement difficiles qu’on veut parfois jeter l’éponge. On se transforme en vrai sprinter pour ne pas se voir devancer,se reveiller tôt un impératif sinon on s’assoie à terre pour suivre le cours dans un Amphi à plus de deux mille étudiants.Les chambres sont pleines .Au moment où certains travaillent ,d’autres se divertissent et on est obligé de faire avec car nous venons de milieux differents ,les réalités et les objectifs ne sont pas les mêmes.Dans les restaurants universitaires,la qualité de la nourriture nous empoigne .A cours d’argent j’échange mes tickets pour manger du pain au chocolat,le café et l’arachide berce ma faim vespérale.Je ne peux pas vous demander de l’argent car avec celui de la moisson que vous m’aviez envoyé je me suis inscrit or ma bourse est minime par rapport à mes besoins et pourtant ,je la partage souvent avec mes petits frères sans que tu ne le saches parce que comme vous le savez bien, rien ne marche au village ; les champs sont devenus improductifs à cause des déchets chimiques des carrières,nos terres sont ratiboisées par les exploitants miniers .Oh mon pays! Oh la vie estudiantine ! Quel calvaire ! Il faut la vivre pour savoir pourquoi nous tranformons l’université en champs de batailles lors desquelles certains ont perdu la vie.Paix à leurs âmes.

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Les conditions sont scabreuses ,certains succombent en quittant la fac se livrant à d’autres avatars,d’autres trouvent des moyens de s’en sortir ça et là.La reussite me tacle,je ne dois pas perdre du temps car je viens de loin ,les urgences de la vie m’appelent ,il est de mon devoir de transformer vos cases en immeubles,mes frères et soeurs attendent tout de moi ,tantôt je depose pour des concours et là la situation est plus poignante parce que pour trouver des papiers ,c’est tout un arsenal ,les entreprises ne recrutent plus ,que du népotisme dans les lieux de travail.

Trouver un emploi devient un vrai casse tête et même si on en trouve , cela devient dûr car certains metiers ne nourrissent pas leur homme ,je songe parfois à embrasser la politique parce qu’elle est devenue dit on le moyen le plus rapide pour se procurer de l’argent ou à retourner à l’agriculture vu que les grandes puissances se developpent avec, mais l’agriculture moderne demande des moyens.La politique,quant à elle,son sens primitif a été usurpé.sauf qui peut.

Les choses sont chaotiques papa ,angoisse et desespoir m’habitent ,le chemin est parsemé d’obstacles ,l’université est un mirage,seul ma foi et le fardeau social me poussent à continuer la marche sinon je vais sombrer dans la delinquance comme bon nombre de jeunes de ma génération.

La situation changera t elle ? Chose incertaine vu qu’on tend vers une privatisation de l’éducation, les inscriptions deviennent de plus en plus chères,une année vaut deux ans ,les professeurs insoucieux de notre avenir baclent le programme et partent à l’étranger,s’ajoutent à celà les grèves tantôt venant des etudiants ,tantôt des professeurs à cause des mauvaises conditions de vie.Certains fils de nantis qui, par curiosité y etaient venus ,vont se payer une formation.Dommage pour le pauvre .

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J’espère que tes prières et celles de maman illumineront mon chemin et m’aideront à concrétiser mon rêve et là j’aurais au moins un sentiment de satisfaction.

A nous revoir .

Cheikh Bamba Sene AHMADA

Professeur de Français au Cem de Thilogne.

Lettre d’un étudiant à son père .

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