Il faut appeler un chat, un chat. L’ignoble assassinat du jeune étudiant Fallou SENE par un des membres des forces de défense et de sécurité constitue un homicide volontaire, d’une extrême gravité. Ni plus, ni moins. Aucune justification ne saurait être apportée à ce crime lâche et abominable perpétré contre un jeune étudiant dépourvu de tout moyen de défense.
Le caractère prémédité de cet acte est conforté par le fait que les forces de sécurité et de défense disposaient au moment de l’intervention, d’armes dotées de balles réelles. Toute tentative visant à assimiler cet acte à une simple bavure est vaine. La thèse de la légitime défense ne convainc personne, et constitue une insulte grave à l’intelligence des citoyens et à la mémoire du disparu.
Lorsque les forces de l’ordre ont investi les lieux du crime, sur demande expresse des autorités administratives universitaires, elles n’ignoraient point qu’elles avaient affaire à un mouvement d’étudiants, dont la seule revendication légitime était la mise à disposition des bourses pour permettre aux bénéficiaires de faire face à des besoins matériels élémentaires : acheter des tickets pour se restaurer, se vêtir, payer la location d’une chambre anniversaire, etc.
Face à des étudiants tenaillés par la faim, et dans un état de dénuement qui frise l’urgence vitale absolue, la première erreur grave commise par le pouvoir réside dans l’appréciation et la gestion de ce type de « crises ». Permettre aux forces de l’ordre de disposer de balles réelles lorsqu’elles interviennent dans le territoire national, pour encadrer des manifestations pacifiques ou prévenir des débordements liés à de telles manifestations est assimilable à un « Permis implicite de tuer », et témoigne d’une irresponsabilité totale.
La répression aveugle et disproportionnée à l’encontre des étudiants de l’Université Gaston Berger est le fruit d’une barbarie sans nom, et d’une violence d’Etat abjecte. Il faut rétablir les choses à l’endroit : le Sénégal n’est pas en guerre contre ses propres citoyens. Les étudiants ont parfaitement le droit d’exiger l’amélioration de leurs conditions d’études et le versement des allocations d’études (bourses) à terme échu.
En matière de maintien de l’ordre, tout port d’arme doit désormais être proscrit et formellement interdit. Les forces de défense et de sécurité disposent d’un arsenal dissuasif, d’équipements défensifs (casques, gilets pare-chocs) et de techniques pour disperser des foules (canon à eau), dont l’usage est strictement réglementé (principe de proportionnalité). Le recours aux armes avec balles réelles, pour gérer des manifestations pacifiques relève de la folie (les manifestants ne sont pas des punching-balls pour les amateurs de sensations fortes).
Dans cette affaire, la responsabilité directe du Ministère de l’Intérieur est engagée. Au regard de la gravité des faits, sa démission volontaire ou forcée réclamée par la communauté estudiantine s’impose. Le concert de condoléances qui s’apparente au mur des « lamentations » ne ramènera pas l’étudiant Fallou SENE parmi les siens. Tout comme, exhiber des chèques bancaires, dans une grossière manœuvre de diversion ne trompe personne. Le 25 mars 2012, les sénégalais n’ont pas élu «ECOBANK» à la magistrature suprême, mais bien Macky SALL. Il appartient donc au Président de la République d’endosser toute sa part de responsabilité, dans la survenance de ce drame épouvantable qui suscite une vive émotion et une vague d’indignation sans précèdent dans le pays.
La liste est longue d’étudiants (Balla Gaye, Bassirou Faye, Fallou Sène) fauchés à la fleur de l’âge, par les balles perdues de régimes impopulaires, en quête de survie. Dans quelques mois, des milliards de FCFA inonderont la campagne présidentielle de Macky Sall. Incapable d’assurer le paiement, dans les délais, des bourses des étudiants, le régime débloquera en un temps record le trésor de guerre de l’homme obnubilé par sa réélection. La preuve de l’inconscience et de la folie d’un régime, en totale déperdition.
Seybani SOUGOU – E-mail : sougouparis@yahoo.fr