Face aux aspirations de changement observées un peu partout en Afrique, les autorités au pouvoir sur le continent font tout leur possible pour se maintenir en place. Elles ont souvent utilisé trois principales stratégies.
- Stratégie de la prison
La plus sûre stratégie est de s’assurer que son plus redoutable adversaire soit en prison. Non seulement, on le détruit moralement, mais on l’empêche de faire campagne en toute liberté. Son seul accès est constitué de gens qui n’ont pas le droit de vote. De plus, on lui retire le droit de voter pour lui-même. A titre d’exemple, nous pouvons citer le cas du Niger. En effet, le président sortant Issoufou avec un pourcentage de 48,4 % devait rencontrer au deuxième tour Hama Amadou avec 17,79 %. Ce dernier devait effectuer sa campagne à partir de sa prison. L’élection du président sortant Issoufou avait été assurée d’un score de 92,4 % suite au boycott de l’opposition.
Chez nous, au Sénégal, risquons-nous d’avoir à vivre cette même situation entre le président Macky Sall et le maire de Dakar, Khalifa Sall ? Non ! Je ne pense pas. La loi de parrainage se chargera de se débarrasser légitimement de cette gênante candidature. Ceux qui défient la loi pour effectuer du forcing risquent, comme son inconditionnel Dias, de le rejoindre en prison et ainsi réduire le vote de l’opposition.
- Stratégie de l’exil
L’exemple le plus illustrant est celui de Katumbi Moïse qui, contraint à l’exil depuis deux ans, vient de déclarer sa candidature à partir de l’Afrique du Sud le 12 mars 2018. Katumbi a, en effet, été condamné à trois ans de prison dans une affaire immobilière. Une seconde affaire pour une raison d’atteinte à la sûreté de l’Etat vient d’être relancée par le procureur général de la République qui souhaite entendre l’opposant. Une troisième menace par rapport à la candidature de Katumbi Moïse est sa nationalité. Sa pseudo double nationalité congolaise et italienne rendrait ainsi impossible sa candidature à la présidentielle.
L’histoire de ce KM (Katumbi Moïse) ressemble à bien des égards celui de notre KM (Karim Meïssa Wade). L’avantage de Karim est qu’il soit gracié dans sa première affaire. Cependant sa seconde affaire semble plus corsée. En ce qui concerne la nationalité, Katumbi Moïse a déjà renoncé à sa nationalité italienne le 13 janvier 2017. Karim Wade a-t-il déjà renoncé à sa nationalité française ? Qui sait ? Tous les deux comptent rentrer dans leur pays en juin ou juillet. Cependant des menaces de leurs arrestations sont brandies par certaines autorités. Pourquoi ces menaces ? La raison est qu’il soit plus facile d’appliquer la stratégie d’exil que celle très gênante de la prison.
- Stratégie de la sélection des candidats
L’exemple de sélection de candidature au Sénégal est la nouvelle loi de parrainage. Certains candidats gênants seront légalement et techniquement éliminés par leurs propres erreurs commises au moment de la confection de leurs listes de parrains au niveau régional.
Ces trois types de stratégies seront, sans aucun doute, exploitées par le président Macky Sall, lors des prochaines élections présidentielles de 2019. Lui permettront-elles de se maintenir au pouvoir ? Seul l’avenir et le choix des électeurs sénégalais nous diront.
Dr Youssou GNINGUE
Chair, Mathematics and Computer Science Department,
Laurentian University, Ontario, Canada
Nouvelles stratégies africaines pour gagner des élections (Par Dr Youssou GNINGUE) | .