L’union nationale des commerçants et industriels du Sénégal (UNACOIS/JAPPO) a lancé un «Tous contre Auchan», je me permets de lancer un «Tous avec Auchan».
D’après son président, l’objectif de leur tournée «est de partager avec les commerçants les souffrances et les difficultés qu’ils vivent et surtout sonner le glas de la mobilisation parce qu’il faut qu’on s’organise pour qu’Auchan arrête son mouvement dévastateur et de suppression d’emplois dans notre pays».
Pourquoi pensez-vous que nous vous suivrons dans cette lancée xénophobe ?
Quand les commerçants augmentaient les prix des denrées à l’approche des fêtes, quelles mesures draconiennes effectives aviez-vous prises pour protéger les consommateurs ?
Dans mon article intitulé «Auchan demeure», je disais que le salaire moyen mensuel au Sénégal est de 114 152 francs CFA d’après l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD). Avec un tel salaire moyen, pensez-vous qu’un chef de famille puisse se permettre ces hausses de prix dues uniquement à une forte demande. De mauvaises pratiques qui sont devenues des règles à l’approche des évènements majeurs où les consommateurs n’ont pas du tout le choix ; une hausse vertigineuse des prix peut aussi être notée dans le transport à l’approche des fêtes religieuses Magal, Gamou, Tabaski, Korité.
Le Sénégal est un pays à économie libérale donc si nous voulons que notre pays soit concurrentiel, il faut entre autres exonérer les entreprises étrangères de taxes fiscales. Ces compagnies peuvent aussi être dispensées d’impôts d’installation pour une durée déterminée. Il y a aussi une garantie de nationalisation de leurs entreprises. Et enfin il y a la possibilité de rapatrier leurs bénéfices générés. Même aux Etas Unis d’Amérique, les Etats sont concurrentiels pour attirer les investisseurs nationaux et étrangers. Ceci est le cas de Facebook qui fut créé en 2003 dans l’Etat de Massachussetts. Elle déménagea en 2004 en Californie qui offrait plus d’avantages, surtout fiscaux. Combien d’emplois Facebook a-t-elle emportés avec elle ? Cet exemple est juste pour illustrer l’importance d’être concurrentiel pour la création d’emplois. L’Etat du Sénégal a pour but de faciliter la création d’emplois entre autres ; l’implantation d’Auchan étant un exemple parfait dans ce cas. Une entreprise légalement constituée et respectant les règles juridiques et fiscales du Sénégal.
Les entreprises du secteur informel sont une menace pour notre économie nationale dans le sens où elles ne sont pas pour la plupart légalement constituées et ne s’acquittent pas de leurs obligations fiscales. Elles jouissent aussi d’une très grande flexibilité de reconversion d’activité.
L’Unacois/Jappo joue à un jeu qui consiste à faire croire à la société à un effondrement économique imminent. Non seulement ceci n’est pas scientifiquement fondé mais en plus, c’est une très mauvaise chose pour le marché qui déteste l’incertitude.
Les prix exorbitants à la veille des fêtes sont une chose déplorable dont les autorités compétentes doivent prendre des mesures draconiennes pour un pays où le salaire moyen est de 114 152 F CFA. Auchan pourra aussi jouer le rôle de régulateur du marché local dans ce cas.
Il faut que les acteurs du secteur informel se formalisent pour pouvoir avoir accès au crédit et se développer. Nous disons au Directeur de l’Unacois/Jappo que le patriotisme économique est une forme déguisée de protectionnisme qui n’est pas compatible avec notre modèle économique libéral. L’Etat du Sénégal devrait faire très attention à ce faux débat mené par des gens qui ne pensent qu’à leur propre intérêt. Le débat doit plutôt être axé sur la formalisation du secteur informel pour combler notre déficit budgétaire.
En 2002, le Directeur de l’Unacois ne disait-il pas que «la présence des commerçants chinois au Sénégal ne présente aucune opportunité ni pour le gouvernement ni pour la population. Ce sont nos fournisseurs asiatiques d’hier, qui viennent nous concurrencer d’une manière illicite tout en inondant le marché local de produits contre-faits que les commerçants sénégalais achetaient dans les pays européens, américains ou asiatiques». Qu’en est-il seize ans plus tard ?
En conclusion, nous pensons que pour avoir une croissance économique durable, il faut songer à formaliser le secteur informel. Il est impossible que ces entreprises florissent en dehors du système officiel mis en place. L’Etat doit en faire une priorité et surtout créer des programmes d’accompagnement et de sensibilisation car la plupart des acteurs de ce secteur ne comprennent pas clairement les avantages liés à la formalisation.
Cette concurrence déloyale du secteur informel ne pousserait-il pas le secteur formel dans l’informalité si l’Etat n’agit pas vite ?
Mohamed Dia
Consultant Bancaire
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