Notre génération doit éviter la dictature de la pensée unique. Combattons-la même.
Elle prend racine quelquefois dans un populisme de bon aloi, et semble sur l’instant légitimée par l’adhésion d’une partie de la populace. Du moins c’est ce que croient les apprentis dictateurs obnubilés par leurs rêves de grandeur, si convaincus de vivre des moments historiques dont ils sont les acteurs principaux qu’ils se laissent griser par leur popularité du moment.
En période de crise ou de précampagne électorale comme c’est le contexte dans notre pays, l’imagination est fertile.
Pour peu que ces grands théoriciens d’une alternative supposée porteuse d’espoir arrivent à obtenir une exposition médiatique aussi symbolique soit-elle, elle leur sert de tribune de propagande pour vendre leur point de vue le plus souvent présenté comme l’unique panacée capable, comme une formule magique, de sortir notre pays du marasme ambiant qui à leurs yeux revêt la forme d’un cataclysme socio-politique qu’il faut nettoyer au Karcher !
Méfions-nous de ces gens.
La pensée d’une seule personne ne peut constituer l’unique panacée applicable à tous les maux, travers et autres contraintes auxquels notre pays est confronté. Et d’ailleurs, toute démarche politique qui formule une vision du monde et décline un plan d’actions destinée au peuple devrait être le fruit d’une réflexion collective, dans le cadre d’un parti par exemple structuré, amendée et complétée en toute démocratie par chacune des parties prenantes qui militent dans cette formation politique.
Une vision sociétale, portée par un seul homme qui se croit investi de la mission divine ou autre de changer le monde est utopiste.
Nous avons connu Hitler et son Mein Kampf !
Quand il est arrivé au pouvoir, nous avons tous vu où cela a conduit le monde.
Et que l’on ne nous rétorque pas que les plus grands de ce monde qui ont accédé aux plus hautes fonctions à la tête de leurs pays l’ont fait. François Hollande ou Nicolas Sarkozy pour ne citer que ceux-là sont à la tête de véritables appareils, entourés d’une foultitude de conseillers et spécialistes de toutes les questions de société qui travaillent pour eux et mettent en forme leurs idées de départ, pour leur donner justement une portée scientifique.
Leur point de vue-présenté comme tel car ils apposent leur signature au bas de la page de ces textes ou les prononcent officiellement comme discours– n’a donc rien de subjectif. D’autant plus que dans le fond, il est inspiré de leur appartenance politique qui charrie une vision de société dont ils portent la défense et la promotion, en tant que leader de la Gauche ou de la Droite.
Avec en plus des convictions fortes, et assumées. Sans hésitation ni tergiversations. Obama a fourni son certificat de baptême quand il a déclaré sa candidature à l’investiture.
Louvoyer n’est jamais bon quand on est interpelé sur ses convictions religieuses en effet. Tous les leaders du landernau politique chez nous ont clairement décliné sans ambages leur appartenance religieuse ou confrérique. D’ailleurs, la transhumance confrérique d’un certain Idrissa Seck lui aurait valu quelques misères qu’on lui aurait faites, par dépit semble-t-il !
Cela cache mal un souci de ne pas se faire juger ou catégoriser qui renseigne à suffisance sur la considération justement que l’on a envers ceux que l’on refuse de frustrer, parce que l’on est conscient de leur nombre, donnée intangible à prendre en compte pour tout politicien, mais on est contre leurs pratiques, condamnées par la communauté à laquelle on appartient !
La seule alternative qui s’offre à soi est alors la fuite en avant. Et l’on tombe dans les travers du NI-NI, dangereux pur un leader politique porteur d’une vision nouvelle qui trébuche dès son entrée en scène !
Les confréries ont toujours été un problème pour certains politiciens au Sénégal. Senghor était catholique. C’est différent.
Le débat sur le rapport à la religion et les considérations intra religieuses rattraperont tout candidat qui soit. D’ailleurs la rupture dans la conception que l’on se fait de notre rapport à Dieu à travers la pratique de l’Islam est si flagrante que nous sommes le seul pays qui chaque année se paye le luxe d’avoir deux korités. Et deux tabaskis.
Certains y auront laissé une partie de leur crédibilité, en même temps qu’ils auront démontré qu’ils n’ont pas encore la recette pour assumer leur leadership et leur appartenance religieuse en parfaite symbiose avec les convictions de leurs concitoyens, et leurs attentes dans ce domaine qui conditionne absolument le reste.
Cela démontre qu’à l’époque du leadership éclaté, il est chimérique et bien vaniteux de se croire génial au point de se revendiquer seul détenteur des solutions aux problèmes de ses concitoyens.
La tyrannie de la pensée unique commence par-là !
Et c’est un aveu flagrant, que dis-je la manifestation éclatante des envies de dictature qui hantent les rêves de ces nouveaux théoriciens de révolutions du troisième millénaire au Sénégal, sans doute touchés par la grâce subite d’une vision qui les a élevés au rang de rédempteur de notre pays !
Heureusement que cette époque est révolue et enterrée, sauf pour ceux qui ont choisi de s’inscrire dans le passé, et de ressusciter l’époque des leaders providentiels. Car ils entretiennent le fantasme secret d’en être un certainement !
Ne nous trompons pas d’époque.
Cissé Kane NDAO
Président A.DE.R
L’article La tentation de la dictature de la pensée unique .