Même si je ne partage pas sa vision, j’aimerais tout d’abord saluer le courage du député Ousmane Sonko, d’avoir écrit un livre pour décliner sa vision. Ce que tous les candidats à la magistrature suprême devraient faire d’ailleurs.
Par contre l’homme continuera toujours à surprendre son monde par ses sorties fracassantes et souvent malheureuses. Profitant d’une séance de présentation de son livre intitulé « Solutions », Ousmane Sonko a une fois de plus montré ses limites à pouvoir gérer un Etat.
Je vais juste donner quelques exemples qui montrent qu’il n’est pas l’homme de la situation comme il le prétend. Le premier est non pas seulement qu’il ignore les normes de rédaction ; ce qui lui a d’ailleurs valu des critiques acerbes d’universitaires venus discuter de son livre-programme, mais il manque d’humilité. Répondant aux critiques, Sonko déclare que c’est sa vision qu’il décline dans le livre et que ses critiques sont trop universitaires, au lieu d’accepter ces reproches d’hommes de la matière.
Non Monsieur Sonko ! La rédaction fut-il d’un petit livre ou d’un programme requiert une rigueur scientifique telles que les références. Autrement cela ressemblerait à un monologue empirique.
Vous parlez de vision en faisant une affirmation gravissime que la vision ne peut être scientifique. Alors dites-nous sur quoi repose votre vision, si elle n’a aucune base scientifique, puisque vous venez de démontrer la suffisance dont certains vous qualifient, et d’un manque d’humilité : ce qui ne doit être la posture d’un intellectuel.
L’autre ignorance dont vous avez fait montre, et que je considère comme une gaffe pour quelqu’un qui a l’ambition de diriger le Sénégal, est de considérer que les artisans locaux ne bénéficient pas de préférence nationale dans les marchés de l’Etat.
Quand vous dites que l’Etat doit donner des parts de marchés à nos artisans locaux, vous ignorez tristement que ce problème est doublement réglé par le Décret n° 2014-1212 du 22 Septembre 2014 portant Code des marches publics, en son article 50, qui traite de la préférence nationale, qui octroie aux entreprises de droit sénégalais une préférence de 15% de la commande publique pour les appels d’offres internationaux. Et dans le cadre d’appels d’offres nationaux, cette même préférence est accordée aux groupements d’ouvriers, aux coopératives, groupements d’artisans, coopératives d’artistes et artisans individuels suivis par les chambres consulaires.
La seule chose que le code exige de ces artisans est de joindre les justifications pour bénéficier de cette préférence et une déclaration par laquelle ils demandent à bénéficier de ladite préférence, comme le précise l’article 51 dudit Code.
L’autre solution est venue du President Macky Sall lorsqu’il a pris la décision volontariste et courageuse d’accorder 15% de la commande publique en mobilier national aux artisans sénégalais. Alors Sonko, je ne dois pas vous apprendre qu’avant de prétendre apporter du neuf comme vous dites, vous devez vous informer de l’existant d’abord. Cet existant est le fruit d’un travail communautaire dans l’espace UEMOA qui accorde la préférence nationale aux artisans locaux, que du reste vous ne pouvez remettre en cause. Votre réflexion devrait plutôt être orientée vers le manque d’organisation de nos artisans, qui doivent quitter le monde informel, en officialisant leurs entreprises pour pouvoir bénéficier de ces avantages que leur offre le Code des marchés publics.
Ce même travail communautaire a abouti à la création de forces africaines régionales comme celles de la CEDEAO, avec les armées ouest africaines qui ont permis de déloger l’ancien Président gambien, qui voulait perpétrer un coup d’Etat électoral.
Alors Sonko, si vous dites que l’Afrique doit avoir sa propre force au lieu d’appeler toujours le secours de la France, c’est que vous ne comprenez rien de votre environnement géopolitique.
Encore vous voulez paraitre comme le révolutionnaire qui veut faire « tabula rasa » sur tout ce qui a été accompli depuis notre indépendance, en premier chef notre hymne national et les sceaux qui l’accompagnent, prétextant qu’ils ne refléteraient pas notre société.
Dites-nous en quoi le lion, le baobab, la savane, les koras, les balafons, l’espoir, la fraternité, l’unité africaine, les sources, ne reflètent-ils pas notre société sénégalaise et africaine ?
Par votre conception de la politique, vous me rappelez le roman de l’excellent écrivain nigérian, Chinua Achebe intitulé The Man of the people, traduit en français par Le Démagogue. Ne soyez pas à l’image de ce politicien sans valeur qui n’a d’ambition que de tromper son peuple à travers des déclarations démagogiques et surréalistes pour juste être au pouvoir. Vous parlez de patriotisme, alors que vous n’êtes pas plus patriote que ceux qui exercent le pouvoir.
Les sénégalais veulent d’un nouveau type d’opposant qui ne se limite pas dans la critique facile, mais qui fait des propositions pour le grand bonheur de ses compatriotes.
S’opposer, c’est reconnaitre les avancées notoires en termes d’électricité, le Pudc, le Puma, les bourses de sécurité familiales, entre autres. Allez dire aux villageois dans les zones les plus reculées du Sénégal ; qui n’ont connu l’électricité, les pistes rurales et autres infrastructures qu’avec l’avènement du Président Sall ; que ce dernier n’a pas de bilan, ils ne vous écouteront sûrement pas.
Quant à votre discours guerrier, appelant à la révolte populaire en cas de soi-disant confiscation du pouvoir, celui-ci relève de la pure fuite en avant et d’une défaite dont vous êtes sûr d’enregistrer au soir de l’élection présidentielle de février 2019.
Je terminerai par une citation d’Alexandre Dumas, extrait de son livre intitulé Le Compte de Monte-Cristo : Mon bon ami, je vous prendrai pour un visionnaire, et j’aurai véritablement peur pour votre bon sens, si je n’écoutais de vous que de semblables raisonnements.
Oui Monsieur Sonko, vous êtes un visionnaire, mais un visionnaire aux imaginations extravagantes et aux desseins chimériques.
Augustin Hamad Ngom, Manager Spécialiste en Passation des Marchés publics
Membre du Comité scientifique des cadres de l’Apr (CCR) Conseiller municipal à Ndiaganiao et Conseiller départemental à Mbour
E-mail: ngomaugustin@gmail.com
L’article Non Sonko! Soyez plus rigoureux que cela .