Des systèmes de gouvernement du peuple, la démocratie est celui qui présente le plus de gages pour assurer la plus large expression des opinions les plus diverses et les plus contradictoires. C’est un système qui organise un exercice du pouvoir par le peuple, la citoyenneté, via une représentation et des institutions. Il y a comme un principe d’égalité des visions et de liberté des expressions qui serait le moteur du jeu démocratique en ce que la diversité citoyenne est le ciment de la structure. Seulement, cette vision, pour le moins idéaliste des choses, est piégée parce que la réalité est plus accidentée qu’un tableau monolithique d’une linéarité à toute épreuve. La démocratie est dans les faits un champ de compétition de visions différentes et concurrentes du monde, mais aussi un réseau d’inégalités à multiple facettes. Comme le veut la règle dans toute compétition, il faut des perdants par le jeu en l’occurrence de l’élection qui est une modalité parmi d’autres, d’expression de la volonté citoyenne pour se doter de gouvernants. C’est d’ailleurs une approche rousseauiste de la démocratie et de la liberté, car pour Rousseau, la liberté est l’obéissance à une règle qu’on se choisit. Cette règle est la possibilité du choix du gouvernement (élection) et de la norme (loi). La démocratie est donc la célébration triomphale de la liberté et de l’égalité validée par un cérémonial électoral et des rites institutionnels.